26. Nocturnes : Cursed

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Une fois à la maison, il était temps de tout clarifier. Malgré ce moment intense dans la voiture, tous les deux, on voulait se débarrasser au plus vite de cette situation... gênante.

On s'assoit à table, face à face, comme pour un entretien d'embauche. Pendant qu'on se faisait servir d'une glace pour apaiser nos estomac traumatisés par l'alcool et la météo, Colen me regardait nerveusement ne sachant pas par où commencer.


Moi : Alexa, mets Nocturne Op. 27 No. 2 de Chopin.


Je prends un bout de glace avec ma petite cuillère.


Moi : Peut-être qu'un peu de musique permettra de briser la glace, qui sait ?


Je souris et j'apporte cette même cuillère à mes lèvres – Un sourire se dessine sur le visage de Colen. C'était une réussite... mais je savais qu'il fallait plus qu'une simple musique pour lui donner plus de courage.


Colen : Alors...

Il inspire un coup puis reprend.

Colen : Je sais que j'ai clairement merdé et que... ce n'est pas la première ou je doûte... dernière fois que merderais.

Il lève les yeux un instant tout en expirant comme pour s'échapper un instant. Je le regardais et je l'écoutais en mangeant la glace, sans faire un moindre bruit. La musique continue en fond, ce qui adoucissait ce moment tendu.

Colen : Je me suis comporté comme un gamin. Après la nouvelle... j'ai perdu contrôle et je suis tout à fait conscient que ce n'était ni le moment ni l'endroit pour le faire.

Il baisse les yeux vers sa glace qui fondait.

Colen : T'es déçu de moi, je le sais. Et moi aussi je le suis. Après tout, j'ai gâché la soirée.


Il prend un bout de glace et la mange de suite. C'était comme si j'avais une petit enfant devant moi, tout innocent et en même temps, un homme très mature. Même si je voulais le rassurer, je ne voulais pas l'interrompre.

Colen : Je voulais une famille, tu le sais...

Sa voix craque légèrement, mais il ne se brise pas. Il poursuit en avalant doucement la glace.

Colen : Et pour Rayan... Je sais que tu dois te poser mille et une questions à son sujet, et je vais tout te dire. Il est temps de te confier cette partie de moi.


Je me penche un petit peu en avant et je pose ma cuillère dans le bol vide.


Colen : Rayan a été mon premier copain enfin... Il a été le premier avec qui j'envisageais de construire un futur. Tout ce que je vais te raconter s'est passé avant que j'entre dans le monde BDSM et... bien avant toi.

Il finit à son tour la glace.

Colen : Au début, on avait tous les deux la même vision des choses. On était jeunes... on profitait des plaisirs de la vie sans se soucier du monde extérieur et on adorait faire la fête. Les excès étaient récurrents et c'était ce qui stimulait notre relation. On adorait repousser les limites et le danger ne nous arrêtait pas. Petit à petit, je me suis lassé de ce monde-là... Les partouzes, l'alcool et les drogues ne m'intéressaient plus. Et c'est là que je me suis rendu compte qu'en réalité, Rayan était loin d'être celui que j'ai connu au tout début. Il était devenu addict non seulement à ce monde là mais... aux excès. J'ai essayé... de tout arrêter mais, c'était bien trop tard. Il ne pouvait plus vivre sans tout ça. Il est devenu agressif, manipulateur, malsain et par faiblesse, je le laissais faire... il était malade et je le laissais faire. C'était comme si je le voyais mourir à petit feu. Chaque jour, il mourait et je le laissais faire. J'ai été lâche.



Une larme coule sur le long de sa joue et en voyant toute sa douleur et sa faiblesse, je craque à mon tour. Sans faire le moindre bruit, des larmes coulent et tombent sur mes jambes.


Colen : Quand j'ai vu qu'il... qu'il était à bout... j'ai tout coupé et c'était mon erreur... j'aurais dû l'aider, je le sais et je le regrette... Sans argent, il est devenu dangereux et il s'est mis en danger... dans des situations que je ne peux pas décrire... des mecs ont profité jusqu'à ce que son corps ne lâche... C'était trop tard... je n'ai pas pu le sauver, je l'ai tué... je... je suis le seul responsable.


Mon cœur battait tellement fort que je pouvais désormais l'entendre. Son rythme m'éffrayait –Colen était immobile, son visage était marqué de douleur et sa mâchoire était tendue.


Colen : Je voulais le rejoindre mais... comme un lâche je l'ai laissé partir, seul. Même si je ne l'ai pas tué de mes propres mains... je suis coupable. Je me sens coupable et je resterai coupable.

Moi : Colen...


Je ne voulais pas l'interrompre, mais c'était trop douloureux pour ne rien faire – Je me lève et je vais derrière lui, je l'entoure de mes bras et je pose ma tête sur son épaule.



Moi : Je ne peux pas t'enlever ça et je ne vais pas pouvoir t'aider avec des mots... mais sens-moi. Sens ma présence. Je t'en prie...





Il sert dans ses mains mes bras qui l'entourent. Ses yeux étaient fermés et je pouvais entendre sa respiration. On reste immobiles, la musique continue en fond sans que personne ne l'interrompt. Toute la colère, la tristesse et tout le poids de ses mots étaient désormais divisés en deux. Même si je ne pouvais pas le guérir, je pouvais au moins l'accompagner. Ce n'était que le début, pour nous, en réalité, je venais à peine de le connaître. Comment un homme aussi bon peut-il porter une aussi grande peine ? Toutes ces années, tous ces malentendus, je sais maintenant pourquoi notre relation est aussi intense. Je connais la raison derrière sa peur de perdre le contrôle, de ne pas pouvoir me protéger, de ne pas être là, de me perdre en réalité. Je pensais tout savoir mais je ne savais rien. Rien sur lui. Rien. Je découvre enfin qui il est et je ne peux pas le laisser s'échapper – Je le sers davantage jusqu'à ce que la chanson se termine.














FIN DE LA PARTIE 1

MON DADDY 5 (1 SUR 2) (boy X boy)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant