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Quand je rentre chez moi, je jette la cassette DVD pour ma sœur sur la table du salon et pars directement dans ma chambre pour regarder celle que je me suis acheté pour moi.
Je m’installe tranquillement dans mon lit, m'allonge sur une dizaine de coussins et plaids, mets le lecteur en marche et en même temps de regarder l’écran, je fais tourner mon jouet entre mes mains.

Mais évidemment, je ne peux pas être tranquille cinq minutes que le téléphone se met déjà à sonner.
Je souffle, mais ne bouge pas ; un de mes parents va bien y aller.
Eh bien non.

- Papa ! Maman ! Répondez au téléphone ! je crie depuis mon lit.

Mais je n’obtiens aucune réponse.
Quand j’y repense, lorsque je suis rentrée dans la maison, personne n’est venu m’embrasser pour me saluer. Je suppose donc qu’ils doivent travailler, ou être allés se promener.

Je souffle encore plus et me lève en râlant. Je cours jusqu’au téléphone, mais avant que je ne puisse décrocher, la sonnerie s’arrête.
Comme si cela pouvait changer quelque chose, je colle tout de même le combiner contre mon oreille.

- Allô ? je demande. Allô !

Evidemment, personne ne répond.

Je lâche un petit cri de colère et plaque le téléphone sur sa base.

Foutue chose.

Alors que je reprends mon chemin pour remonter vers ma chambre, cette ordure d’objet se remet à sonner.

Non mais ce n’est pas vrai, il se fiche vraiment de moi, ou je rêve ?

Je fais demi-tour, sur les nerfs, et arrache clairement le téléphone de son support. 

- ALLÔ ? je demande, un peu trop violemment.

Oui, impulsivité est mon deuxième prénom.

- Oula, calme-toi ma chérie, j’entends à l’autre bout du fil.

En entendant la voix de ma mère, je me calme directement.

- Désolée maman, je ne voulais pas crier, je dis en soufflant.

- Il n’y a aucun soucis, répond-elle de son habituelle voix douce. Je t’appelle de chez les Robbinson, je voulais juste te demander si cela te dérangeait si avec ton père on restait diner chez eux ce soir ? Ou tu préfères peut-être que l’on rentre pour rester avec toi ?

Je souris et pose mon dos contre le mur du salon.

- Non, il n’y a aucun problème, je me gère et je gère Kally aussi, je réponds simplement. Passez une bonne soirée.

- Passez une bonne soirées aussi, mes amours.

Puis nous raccrochons.

Je remets le téléphone à sa place et remonte les escaliers lentement. Donc, ce soir je suis seule avec ma sœur, génial.
Bien que je sois extrêmement proche de mes deux parents, je ne l’ai jamais réellement été de ma petite sœur. Nous avons toutes les deux un caractère qui ne colle absolument pas avec celui de l’autre, alors ça finit très souvent en crêpage de chignon et en hurlement.
Mais ça a toujours été comme ça, alors au final, je m’en fiche un peu.

Évidemment, si quelqu’un vient à la blesser, je lui rentre quand même dedans. On ne touche pas à Kally, même si des fois je voudrais l’étrangler de mes propres mains.

Enfin bref, en parlant du Diable, la voilà qui claque la porte d’entrée.

- Il est où mon DVD ?! elle gueule depuis l’entrée.

Je lève les yeux au ciel et passe la tête dans la cage d’escalier.

- Bonjpur à toi aussi. Ouvre-tes yeux, imbécile.

Elle me montre son majeur et commence à chercher son butin. Lorsqu’elle le trouve, elle le prend et le fourre simplement dans son sac. Elle se dirige vers moi et monte les escaliers quatre à quatre, en prenant bien soin de me pousser lorsqu’elle passe à côté de moi. Sans un mot de plus, elle part dans sa chambre et claque de nouveau la porte.
Bon, elle a dû avoir une mauvaise journée.

- Surtout ne dis pas merci, je grogne pour moi-même.

Mais j’ai à peine le temps d’ouvrir la porte de ma chambre, qu’elle ressort de la sienne, un grand sac violet à la main.

- Tu vas où ? je demande en fronçant les sourcils.

Elle n’oserait quand même pas faire une fugue devant moi ?
Cette idiote en est capable.

Ma sœur s’arrête, se retourne et me toise de haut en bas.
Elle a beau être plus petite que moi, autant en âge qu’en taille et qu’en maturité, elle n’a jamais eu aucun respect pour moi.

- Bah, chez Nina, tu sais, la soirée, dit-elle en se moquant et en brandissant sous mon nez la cassette.

Je déteste quand elle me parle comme elle le fait actuellement. Si ça ne tenait qu’à moi, je lui aurais déjà crié dessus et je lui aurais clairement mis ma main dans le visage pour punir son insolence. Mais je ne suis pas du genre violente, et je sais que crier ne servirait à rien.
C’est une ado, quand sa crise sera passé, ça ira mieux.
J’espère.

Je ne réponds rien, hausse les sourcils et pars m’enfermer dans ma chambre.
Finalement, je serai seule avec mon documentaire scientifique, ce soir.

*

Le lendemain, je me réveille difficilement.
La veille, j’ai regardé le fameux documentaire, mais après j’ai lu jusque très tard. Et je n’aurais pas dû.
Même si maintenant je sais qu’il y a 42 millions de molécules de protéines dans une cellule de levure, je pense que cela ne m’avancera pas vraiment dans ma vie.
Pas maintenant, en tout cas.

Enfin, je finis par me lever et, une heure plus tard, je suis en route pour le lycée. J’y vais à pied, étant donné que j’habite à côté et que je ne dois marcher que dix minutes. Mais même en dix minutes, les gens trouvent un moyen pour venir pourrir ma journée.

- Annaëlle ! j’entends dans mon dos.

Je ne me retourne pas. Je n’ai pas besoin de le faire pour savoir qu’il s’agit de Zach, alias le plus gros connard de ma classe, qui n’a pas aimé mon changement radical depuis la rentrée.
Maintenant, il n’a plus la possibilité de me tacler sur mes cheveux, mon corps ou quoi que ce soit.
Et il n’aime pas ça.
Son souffre-douleur favori n’est plus, et Monsieur est vexé.

- Annaëlle, je te parle ! il reprend en haussant le ton.

Je ne m’arrête toujours pas, de toute façon, pourquoi je le ferais ? Je continue d’avancer sur la route bitumée en regardant droit devant moi. Cet idiot finira bien par me lâcher les basques, nan ?

- J’ai dit, Annaëlle ! j’entends soudainement très près de moi.

Oui, j'ai entendu ! Je sais reconnaître mon prénom, tout de même !

Ce connard me saisit le bras et me retourne pour me mettre face à lui. Ouah, il empeste l’alcool. Déjà, dès huit heure moins dix du matin ? Il abuse, sérieusement.

- Zach, lâche-moi, je dis froidement en essayant de me dégager.

Je prie intérieurement pour que quelqu’un vienne m’aider, parce que je n’ai pas envie de cogner un des gars les plus dangereux du lycée. Si je fais ça, je pourrais me retrouver six pieds sous terre en même pas deux heures.

- Pourquoi tu réponds pas quand j’t’appelle ? il me demande en serrant encore plus mon poignet.

Je bouge ma main pour essayer de me dégager, mais évidemment c’est impossible.

- Réfléchis cinq secondes, je commence en essayant de ne pas lui montrer que je panique totalement. Si je ne te réponds pas c’est que je n’ai pas envie de te parler. Maintenant, tu me lâche.

Son regard se voile d’un épais nuage noir, et j’ai soudain très peur d’avoir dit ce qu’il ne fallait pas dire.

- Mec, t’as entendu ? Elle t’a dit de la lâcher, alors tu devrais vite obéir avant que je ne sois obligé de t’y forcer, j’entends dans mon dos.



Remember MeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant