Le Palais des Rois

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Vellin contourna l'imposante statue en la gloire de Razhan et poursuivit sa route jusqu'aux portes massives du Palais des Rois.

Chemin faisant, il contourna un groupe d'ouvriers occupés à installer l'un de ces Bâton-de-Feu qui fleurissaient partout en ville. Dernière création de Razhan et de ses sbires, les Bâton-de-Feu exploitaient les nombreuses poches de gaz souterrains, et sous l'action d'une flamme, pouvaient brûler toute une nuit durant. L'invention était en passe de remplacer toutes les torches en ville et le rues, continuellement éclairées, en devenaient beaucoup plus sûres.


Un calme relatif régnait à l'entrée du Palais des Rois, contrastant avec l'agitation du reste de la ville. Cinq gardes en armures lourdes et large épées bâtardes, – au couleur de chacune des Maisons -, surveillaient les portes l'œil éteint, assommés par la chaleur cuisante du soleil.

Vellin les salua d'un signe de tête en rentrant dans le bâtiment.


Le grand hall d'entrée était magnifique. Deux rangées de quatre colonnes en quartz rose conduisaient le visiteur jusqu'au large escalier central. Des petites fenêtres rondes garnies de vitraux en rosaces apportaient une douce lumière bleutée à la pièce. Une immense fresque peinte représentant l'union entre la Reine Semira et le Roi Darius ornait les voutes au plafond.

Seule une trentaine de gamins de douze ans pas plus, discutaient silencieusement dans la vaste salle. Vellin reconnut les premières années à leurs tuniques en lin grises, signe qu'ils n'avaient pas encore intégré de Maison. La plupart des cours de première année avaient lieu dans les grandes salles au premier niveau du Palais des Rois. Il était primordial d'inculquer comme valeur principale aux nouveaux entrants l'amour de l'empire et de sa Reine, surtout maintenant que les recrues provenaient des quatre coins des anciens Territoires Libres.


Vellin n'accorda aucune attention aux regards curieux des gamins, vulgaires première année, et traversa la grande pièce à pas vif et tête haute en direction des escaliers. Maitre Willnus l'attendait au premier étage.


Un lumière diffuse inondait faiblement le petit couloir par d'étroites fenêtres en haut des escaliers, jurant curieusement avec la démesure du premier niveau. L'endroit se voulait plus intimiste, plus élitiste aussi. Et pour cause, seuls les Maitres Magistères et exceptionnellement leurs disciples pouvaient se rendre à cette étage. Vellin lui-même ne s'y était rendu qu'à deux occasions jusqu'à présent, et toujours en compagnie de son maitre. Deux gardes aux armures grises symbole de neutralité, surveillaient l'accès aux salles latérales où devait se dérouler la réunion.


- Messieurs. Vellin Ombrépine, disciple de Maitre Willnus Lunepâle. Le Maitre m'a convoqué pour une réunion de grande importance mais je ne crains de ne pas savoir dans quelle salle de cette étage elle se déroule.


Les deux gardes échangèrent un bref regard. Après quelques instants, l'un d'eux répondit.


- Maitre Lunepâle est effectivement passé par là, jeune disciple. Mais vous vous fourvoyez sur un point. La réunion à laquelle il était convié n'a pas lieu ici.


A ces mots, l'homme en armure grise ouvrit la porte qui se trouvait dans son dos.


- La réunion a lieu à l'étage, dans le salon du Doyen. Mais je dois vous prévenir que vous êtes en retard.


Chez le Doyen ? Mais par le Néant Glacial, pourquoi intervient-il à une simple réunion ?


De multiples questions se bousculèrent dans la tête de Vellin alors qu'il montait doucement les marches conduisant à l'appartement du Doyen.

La présence du chef des Magistères signifiait que la réunion était d'une importance capitale et dépassait les simple prérogatives d'une unique Maison. Vellin n'avait vu cet homme jusqu'à présent qu'à une seule occasion, lors de sa cérémonie d'intronisation à la Maison du Savoir.

C'était également pour lui une chance unique de se faire remarquer.

Vellin venait de terminer ses huit années d'enseignement mais comme le voulait la coutume au sein de la Maison du Savoir, il resterait au rang d'apprenti tant qu'il n'apporterait pas de nouvelles connaissances. Nombreux restaient ainsi apprenti des dizaines d'années durant, et finissaient par tomber dans l'oubli. Ils préféraient alors quitter l'ordre plutôt que de continuer à se couvrir de honte.


Vellin ne serait pas de ceux-là ! Son esprit était plus affûté qu'une lame de couteau et sa curiosité insatiable ! Lui, surement le meilleur de sa promotion, disciple de Maitre Lunepâle, ne pouvait prétendre qu'à un grand destin !


C'était sa chance, et il allait la saisir.


Arrivé à la lourde porte cerclée de bronze, il s'arrêta et tendit l'oreille. De l'autre coté des planches de bois épaisses, lui parvient des bruits de voix étouffées.

Le jeune homme se maudit d'être une nouvelle fois en retard. Mais il ne pouvait plus faire marche arrière.


Il retint son souffle, prit son courage à deux main et ouvrit la porte.



Celui qui rêve sous la montagneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant