Chapitre 4 : Idiot

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Eren ouvrit doucement les yeux. Le soleil du matin jetait un rayon paresseux sur le parquet et tout semblait calme. La porte-fenêtre qui donnait sur le petit balcon était entrouverte et une brise légère faisait ondoyer les rideaux blancs. Eren n'entendait aucune agitation en bas de sa tour. Il devait être tôt.

Un sourire endormi illumina son visage. Il aimait ces moments. Ceux qui n'appartenaient qu'à lui, comme dérobés au monde qui dormait encore. Ces instants précieux et espiègles, qui semblaient avoir échappé à la surveillance du Grand Horloger, pour ne s'offrir qu'à lui, dans le plus grand des secrets.

Prenant soudain conscience de la pièce autour de lui, son regard sonda le salon, achevant de dissiper la brume dans son esprit.

Le garçon.

Eren se redressa d'un coup dans le canapé, qui couina faiblement en signe de protestation.

Où était-il passé ?

Le verre d'eau et la boîte de médicaments n'étaient plus là. A la place, quelque chose attira son regard. Le cœur battant, Eren se jeta dessus. Il ne s'agissait que d'un petit morceau de papier déchiré sur lequel avait été griffonné un laconique « merci ». L'écriture était étonnamment fluide, presque féminine.
Eren fronça les sourcils, un peu perdu. Il était partagé entre le soulagement de le savoir encore en vie et la déception, poignante, de ne pas pouvoir discuter avec lui ce matin. Il voulait tant en savoir plus sur lui. N'importe quoi. Son prénom peut-être, ce qui lui était arrivé, son âge, où il vivait, s'il comptait forcer sa serrure à nouveau prochainement..

Est-ce qu'il le reverrait seulement un jour ?

Eren reposa le mot doucement, et passa une main fatiguée dans sa tignasse. La journée allait être foutument longue.



Eren marchait sur le chemin du lycée, les mains dans les poches de son sweat-shirt rouge - trop grand et dont la couleur avait légèrement passé - lorsque Jean lui donna une bourrade à l'épaule.

Le jeune homme eu un sursaut de surprise et lui jeta un regard mauvais.

« Bah alors ? Mauvaise nuit ma biche ? » lança Jean, goguenard.

« On peut dire ça, ouais » se rembruni Eren.

Devant le regard interrogateur de son ami, Eren se lança dans une explication en soupirant.

« 3h du mat, vieux. Un mec qui déboule en trombe dans mon salon. En sang ».

« Hein ? Mais t'as pas appelé les flics ? »

« Non. Il voulait pas d'hôpital non plus ».

« Et alors, t'as fais quoi ? » Jean fronçait les sourcils, de plus en plus perplexe.

« Des foutus points de suture, mec. » Eren secoua la tête, désabusé.

Le rire de Jean éclata dans l'air frais du matin. Franc, grave. Le genre de rire qui réchauffe le cœur de ceux qui ne se savaient pas mourir de froid. Eren leva de grands yeux surpris vers lui, avec un sourire d'enfant ravi.

Jean venait d'apporter un tout nouveau recul sur sa nuit et elle lui sembla soudain bien plus marrante.

Il était comme ça, Jean.



La journée passa à la vitesse d'un escargot rachitique. Eren commençait à désespérer sérieusement de rentrer chez lui un jour. Il n'avait cessé de retourner cette histoire dans tous les sens. Qui était-il ? Est-ce qu'il le reverrait un jour ? Est-ce qu'il souhaitait même le revoir ? Assurément, oui.

Si seulement il connaissait son prénom. Il aurait pu le prononcer à voix basse pour lui-même, comme une litanie, juste pour voir comment ça faisait de lui parler. De le connaître.

Eren secoua la tête, en réprimande muette. Il ne tournait pas rond. Il n'avait vu ce type qu'une fois et il avait forcé sa porte d'entrée. Et pourtant, il avait une envie dévorante de se trouver à nouveau en sa présence.
Etre son ami ? Eren n'en demandait pas autant. Non, il voulait juste pouvoir le regarder vivre, assis par terre à l'observer. Notant chacun de ses mouvements, chacune de ses attitudes, comme on contemplerait un félin – insaisissable et fier - dans son habitat naturel.

Eren sentit son cœur s'emballer tandis que le petit monstre de l'envie s'étirait avec avidité au fond de ses entrailles. Il soupira fort.

« Idiot ». 



Un petit chapitre supplémentaire les petits chats. Désolée pour le temps de latence entre le précédent chapitre et celui-ci, j'ai été accaparée par ce que la vie a de meilleur et de pire à nous offrir. Je vous embrasse <3 
A très vite. Iren

Personne (Ereri / Riren)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant