Chapitre 25

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- La vue est magnifique

Il ne fit qu'hocher la tête.

Lorsque Keigo avait dit à Hanae qu'elle pouvait aller lui parler elle avait d'abord cru à une mauvaise blague. 

- T'es pas très bavard ..... 

Elle essayait tant bien que mal de faire la conversation. Mais que dire après tant d'année gâchées. Des mots doux ? Des mots durs ? Son regard glacial était bien plus dur que n'importe lequel des termes grossiers qui venaient à l'esprit de la jeune policière. 

Mais pourquoi l'insulter ? Fallait-il qu'elle le dispute pour être en vie. Pour avoir existé sans elle. Qui était sorti de la vie de l'autre en premier au final ? 

- J'ai rien à dire donc je dis rien

Sa voix était si rauque. Elle faisait si adulte.

- Tu n'as vraiment rien à me dire

Il fit mine de réfléchir. Comme par magie ses doigts meurtris saisirent une cigarette plaquée dans sa poche, et, la roulant dans ses doigts quelques instant, il se mit à penser à voix haute.

- La mort c'est vraiment de la merde.

- Le tabac aussi. (Elle ne le regardait plus, se contentait de scruter le paysage qui se dessinait sous son nez) 

- T'es une emmerdeuse. 

Il alluma l'instrument infernal, la fumée semblait se glisser hors de ce tunnel morbide et s'échapper vers le ciel.

Une si belle évasion. 

Hanae s'agitait. C'était pas de le revoir qui lui faisait peur, c'était l'idée même que plus rien ne les liait ensemble maintenant. Ils n'avaient plus rien en commun, juste des souvenirs brutaux, et une sorte de malaise perpétuel, une vasque de désir, transportant un océan de regret.

- Arrête de bouger autant tu vas perdre l'équilibre. 

- En même temps qu'elle idée de nous rencontrer dans un tel lieu. 

Assis sur le toit d'un immeuble, les deux adultes à l'esprit encore enfantin se parlaient à la lumière des néons publicitaires qui décoraient les buildings de la ville. 

Hanae jeta un coup d'oeil hésitant à la clope fumante, il intercepta son regard, sembla comprendre, décoinça la tige de ses lèvres, et la lui donna en exhalant un soupir tremblant. 

Elle porta la sèche à sa bouche, et la fuma avec passion. 

- Comment tu te sens Hanae ? 

- Vide .. mais heureuse au fond. 

- T'arrives à être heureuse malgré tout ce qu'il se passe ? 

Elle respira un bon coup. Ça sentait le froid, la nuit, et le tabac. 

- Devrions-nous nous enfuir ? À cause de .... (Elle fit un geste vague  et circulaire de la main pour illustrer ses propos) tout ce qu'il se passeEt pour aller où ?

Il réfléchit un instant. Au loin, les gyrophares d'une ambulance berçaient ses idées.

- Plus loin. 

Ce toit était parfait. Hanae s'inquiétait mais au fond, le panorama que lui offrait cet endroit était à nul autre pareil. 

- Mais les problèmes sont partout

Il lâcha un petit rire. Jaune et froid. Mais au moins sincère. 

- Ferme les yeux Hanae. Imagine toi l'endroit parfait. Un endroit possédant une beauté capable d'éblouir tes problèmes jusqu'à les rendre aveugles. 

- Je ne suis pas sûre qu'un tel endroit existe.

- Essaie.

Elle s'exécuta, mais la luminosité des néons était trop forte pour qu'elle puisse fuir la réalité l'espace de quelques secondes. Alors il l'aida, posa sa main sur ses yeux pour boucher la lumière. Et alors elle vit cet endroit. 

Qu'elle beauté qu'elle poésie. 

Mais qu'elle solitude. 

Elle lui prit la main, l'écarta et rouvrit les yeux. La lumière vive de la capitale lui transperça la rétine. Elle fit mine de refermer les yeux. 

- Ne les ferme pas. Ne les ferme plus. Accepte la réalité. 

Puis le silence revint. Un silence moins pesant. Plus intime et familier. 

Il se racla la gorge. Hanae le connaissait par cœur, comme une œuvre. Comme Mozart connait chacune des notes de musique de ses partitions, et Monet le plus petit des coups de pinceaux de ses tableaux. Elle savait que lorsqu'il faisait rouler ses cordes vocales de cette manière c'était qu'une questions risquée le travaillait.

- Comment va t-elle ? 

La question qui fait mal.

- Elle va bien. Les infirmières s'occupent bien d'elle. 

Un sourire étira son visage, des souvenirs fusèrent dans son regard azur. 

- Tu te rappelles quand on faisait des potions magiques dans ta chambre ? (Il ne prit pas la peine de mettre ce terme entre guillemets. C'était des potions magiques. Et rien d'autre)  Avec tout ce qu'on trouvait ? Elle buvait tout sans hésiter, de peur de nous faire de la peine en cas de refus. 

- Tu parles chui sûre qu'elle vomissait tout en cachette. 

Elle sourit à son tour. Cette envie de ressentir la mélancholie semblait plus forte que le reste. 

- Et quand en jouant au foot on avait brisé son vase favoris ? 

- Hey c'était de ta faute. 

Elle ne prit même pas la peine de se défendre. À la place elle leva les yeux vers le ciel nocturne. Une étoile filante passa devant eux, et mourut derrière les colline. Il se leva, en grognant. Leur rencontre était terminée, il était temps maintenant pour lui de rentrer.

Il sonda du regard Hanae. Elle n'avait pas bougée de sa place, n'avait pas essayé de le retenir, trop occupée à faire son vœux. Mais à en juger par ses yeux pétillants de larmes nostalgiques, elle avait bien remarqué qu'il s'apprêtait à s'en aller. 

- On se reverra Hanae. 

- Quand ? 

- Lorsque ton vœux sera exaucé. 

- Je n'ai pas fais de souhait

- Tous le monde fait des souhaits quand une étoiles filante apparaît.

Et il tourna les talons. 

Et dans son dos il cru entendre Hanae murmurer 

" Au revoir Dabi "

𝑳𝒂 𝑫𝒆𝒓𝒏𝒊𝒆̀𝒓𝒆 𝑻𝒐𝒅𝒐𝒓𝒐𝒌𝒊 (𝑯𝒂𝒘𝒌𝒔 𝑿 𝑶𝒄) Où les histoires vivent. Découvrez maintenant