Melaquinne sur Plage, baby !
Melaquinne sur Plage. Une charmante station balnéaire bourgeoise, typique du milieu du XIXe siècle, nichée au creux du littoral néerlandais. En cette fin d'août, les grands hôtels commençaient à se vider tandis que la promenade se prélassait sous les derniers rayons du soleil estival. La gare, qui accueillait principalement des trains en provenance d'Amsterdam – à une demi-heure d'ici – retrouvait enfin un semblant de calme, et le ballet des taxis se faisait plus lent. Bientôt, la station retournerait en hibernation.
Le Strandhotel n'échappait pas à la règle. Ce joyau du front de mer, doyen luxueux de la station balnéaire, commençait paisiblement à se vider. Seule la moitié des chambres était encore occupée par des client·e·s préférant le calme à la cohue. Après tout, les paparazzis semblaient enfin avoir déserté la station, se préparant pour la saison des mariages – si l'été était propice à la romance, septembre voyait se concrétiser les plus scandaleuses unions, et il était hors de question de rater LE scoop de l'année.
En parlant de client·e·s... celles et celui qui venaient de se faire déposer par une berline aux vitres teintées devaient être de ces célébrités qui aimaient la discrétion et le calme. Même voyageant léger et se voulant discret·e·s, iels ne pouvaient tromper personne : celle·ux-là avaient de l'argent, et pas qu'un peu – sinon, iels n'auraient jamais pu fouler le sol de marbre du Strandhotel.
Et que dire de la jeune femme, de son port de tête royal, de l'air noble qui imprégnait son visage sombre d'asiatique... Assurément, elle devait porter un titre, que ce soit Lady ou Comtesse, peut-être même Princesse. C'était en tous cas la certitude de la réceptionniste Nineke Klein Rosenboom lorsqu'elle vit ce couple et leur chienne fouler les marches du Strandhotel. Tant mieux, ça lui changerait un peu de toutes ces starlettes et « influenceurs » qui se croyaient important·e·s. Elle pourrait enfin parler d'égale à égale.
Suivant son protocole, Miss Klein Rosenboom salua le couple et vérifia leur réservation. Elle ne s'était pas trompée. Lady Deborah Ulsterson. La célèbre Lady Deborah, disparue depuis des années. L'homme avec elle, à la carrure plus large qu'un taureau, ne pouvait être son garde du corps – trop proche – ni son frère – elle savait que Lady Deborah était fille unique. Non, ce devait être son fiancé.
-Passez un agréable séjour, Lady Deborah, sourit-elle en lui remettant la clé.
Debby remercia la réceptionniste sans se laisser tromper par son visage apparemment humain. Même sans porter d'ailes et enfermée dans son uniforme rouge – qui, soit dit au passage, faisait magnifiquement ressortir sa peau ébène – elle était Fae jusqu'au bout des ongles... et de noble famille.
Contrairement à leurs cousines Pixies, les Fae étaient de taille et d'apparence plus ou moins humaine, leur facilitant les interactions avec les ignorant·e·s. Seules quelques vieilles familles puritaines portaient encore des ailes, la plupart ayant abandonné ces appendices plus gênant qu'utiles dans le monde moderne. Néanmoins, tout·e·s manipulaient la magie de façon innée – une caractéristique de celle·ux que les créaturologues nommaient « le Petit Peuple ». Bien plus ouvert·e·s à la technologie que les Pixies, iels appliquaient tout de même les principes de l'hospitalité les plus strictes... et punissaient de la même manière quiconque les enfreignaient. Rien d'étonnant à ce que les propriétaires du Standhotel aient choisi une Fae comme réceptionniste.
Une fois les porteurs congédiés, Debby se tourna vers son fiancé, Orion, un léger pli de contrariété lui barrant le front.
-La réceptionniste est une Fae. En supposant qu'elle était déjà en poste à l'époque où O'Connor était venu, on ne pourra rien tirer d'elle.
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Indienne McTuffy (La Trilogie - Tome 1)
FantastiqueSi vous héritiez du manoir, de la fortune et de la bulldog de votre voisin farfelu... que feriez-vous ? Photo by Alexandru Sofronie on Unsplash