Indienne McTuffy (La Trilogie - Tome 1)

Chapitre 17

Deux pots de rillettes.

Le début du procès express d'Hespéride Cherchebruit, le lundi 31 juillet 2017, se déroula quasiment à huit clos tant il y avait peu de personnes dans la salle. Le juge, les juré·e·s ; l'avocat de Mme Cherchebruit, l'avocate de Léona, Léona et Indienne McTuffy ; un journaliste local et deux policiers pour encadrer l'accusée – et c'était tout. Ce drame familial n'intéressait personne, en partie parce que Maître Faun avait effectué un travail incroyable pour que l'histoire passe inaperçue dans le journal local. Même Neto ne savait pas ce qu'elle faisait en ce moment.

-Faites entrer l'accusée.

Léona refusa de se tourner vers sa mère. Elle ne put s'empêcher de penser à son père, à sa disparition et son étrange retour. Où était-il ? Était-il impliqué dans cette folie ? Elle secoua la tête. Son père n'avait jamais été courageux – le genre à rabaisser les plus faibles et à s'écraser face aux plus fort·e·s.

L'adrénaline la secoua bien avant qu'elle n'entende le hurlement dément.

-Toi !

Hespéride se débattait comme une possédée, son visage maigre soudain écarlate.

-Petite trainée ! Tu m'as tout enlevé ! Mon argent ! Ma vie ! Tu aurais dû mourir !

Le juge appela vainement au calme, mais rien ne semblait capable d'arrêter Hespéride dans son délire. Les juré·e·s reculèrent dans leurs fauteuils, fixant Léona avec stupéfaction. Interrogation. Jugement. Elle devait faire quelque chose.

Ravalant ses larmes, elle se leva et quitta la salle, Indienne sur les talons. Elle n'avait toujours pas posé les yeux sur sa mère. Son avocate hocha la tête. Peut-être que cela calmerait l'accusée.

Moins de cinq minutes après, Maître Faun et Maître Bernillac – l'avocat de sa mère – la rejoignirent à l'extérieur de la salle d'audience, passablement agacé·e·s.

-Elle ne s'est pas calmée, déclara mornement maître Bernillac, et le juge a ordonnée qu'elle soit renvoyée à l'hôpital. Une audience sera fixée prochainement, mais il y a de fortes chances qu'elle soit reconnue inapte à comparaitre et qu'elle finisse tranquillement ses jours dans un hôpital psychiatrique. Dans tous les cas, elle ne pourra plus vous atteindre, mademoiselle. Soyez forte.

Léona acquiesça, avant de demander du bout des lèvres :

-Et Charles Cherchebruit ?

-Les recherches n'ont rien donné, déplora maître Faun, et comme il n'est poursuivi que pour « non-assistance à personne en danger », les forces de l'ordre semblent avoir abandonné. Mais il refera surface bientôt, si vous voulez mon avis.

Léona remercia l'avocate et se tourna vers Indienne qui baillait.

Bientôt.

Pourvu qu'elle ait tort.

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Dès son retour au manoir, Léona prit à peine le temps de passer des vêtements plus confortables avant de s'enfermer dans le bureau « autrichien ». Cette pièce, située en face de sa chambre, s'apparentait à présent en tout point à un cabinet de détective privé·e. La jeune fille y avait transféré une partie des carnets de notes de O'Connor – en plus des siens – autant dire qu'il y en avait une belle montagne.

Elle s'agenouilla religieusement devant la poubelle à papier et en dégagea le coffret à bijoux de la Sanseverina. Le même frisson la traversa, comme à chaque fois qu'elle ôtait la clé de la chaleur protectrice de sa poitrine. Elle ouvrit le coffret et contempla l'intérieur. Il n'y avait rien d'autre qu'un morceau de miroir brisé incrusté dans le couvercle, et une montre. La plus belle que Léona ait jamais vu.