Il était entre mes mains. Ce bijou des forces de l'ordre et de la sous-racaille. Les deux mains sur le bijou, celui-ci visait Jugnio. Je le regardais avec des yeux dangereux. J'avais le pouvoir de tuer. J'avais ce pouvoir d'arrêter toute cette merde ! C'était lui le poison... Autant en finir !"Ca va aller."
Jugnio - Hahaha... Vas-y, Serrano, tire ! TIRE ! Putain d'merde, tire !
Il semblait prendre à la rigolade mes faits et gestes. Je ne blaguais pas, j'avais très sérieusement envie de lui coller une balle au milieu du front !
Jugnio - Tu ne tires pas ?! Qu'est-ce qui t'arrives, reprit-il rieur. Ce sont des événements traumatisants qui te font hésiter ? Un changement de vie important ou une situation du stress ? Pourtant, tout ça, ça provoque un fort besoin de commettre l'irréparable parfois... Ou alors tu as une peur atroce, causée par moi... Tu n'arrivas pas à te maîtriser, tu ne réussiras pas à te contenir. Tu ne peux pas contrôler tout ça, c'est plutôt paradoxal pour toi. T'avais dit que tu voulais me tuer, tout à l'heure ! T'étais à genoux, avec les trois filles ! Enfin, les deux-et-demi. Haha. ALORS BROOKE ! Qu'est-ce qui te fait si peur ! VAS-Y ! TIRE ! VAS-Y ! HAHAHA ! VAS-Y !
Je commençais à trembler. De grosses gouttes de sueur luisaient mon front. J'avais la nausée, l'envie de lui vomir dessus était à son apogée.
Jugnio - Hahaha... C'est le coeur, hein ? dit-il rieur. T'es même pas fichu d'aider les tiens, parce que tu dois d'abord t'aider toi. C'est vraiment triste, les Serrano sont si fragiles... Si j'avais pu éviter la souffrance à ta cousine, j'aurais pu...
Moi - NE PARLE PAS D'ELLE !
Jugnio - Ooh, je vois, je vois... soupira-t-il. J'ai tout de suite vu ton handicap à la con, une malformation cardiaque putain, ça claque. J'avais un voisin qui avait une malformation aussi ; son coeur n'était pas au bon endroit. J'te raconte pas les problèmes qu'il a dû subir étant enfant... Mais bon, reprit-il, lui il est toujours en vie. Je doute que tu aies une aussi grande vie que lui. Il te reste combien de temps, tu penses ?
Mes bras commençaient à me lâcher. Mais il ne fallait pas craquer. Le flingue était toujours pointé sur lui. J'avais un doigt déjà posé sur la détente. Si mon index bouge, pu de Jugnio. Haineuse, je restais fixé sur sa silhouette qui tortillait comme un ver de terre qui sortait des ténèbres. Il allait tenter quelque chose. J'avais raison. Il s'était redressé. Il était simplement assis, les mains appuyaient le sol, comme pour le retenir. Il souriait toujours, me regardant d'un drôle d'air. Il tentait de comprendre mon comportement, il cherchait une échappatoire. Il savait qui j'étais, mais il n'était pas dupe à ce point. Lui aussi m'avait grandement sous-estimé. Je n'étais plus la même d'il y a quelques semaines. J'étais différente. J'étais une nouvelle Serrano.
Il continuait de parler et de parler, j'allais craquer. Il évoquait ma mère. Mon père. Mais surtout ma mère. Il disait qu'avec son père il pourrait retrouver la trace de mon père, qui nous avait abandonné ma mère et moi. Que, comme ça, je pourrais me venger de ces années de souffrance sans lui. Il parlait de maman. De maman. Il expliquait qu'elle s'était sacrifié pour moi. Qu'elle n'a jamais eu le temps de comprendre ce qu'était la vie. Ce que c'était que tout ça. Il riait de temps en temps de mon état, de mon visage grave, à faire peur. Il disait de poser ce flingue, que ce n'était pas à lui que je devais en vouloir, mais à ceux qui avaient fait de ma vie un cauchemar : mon père. Tout simplement. Il disait que je me trompais de cible, que j'allais faire une bêtise. Il disait qu'il pourrait m'aider. Qu'il allait m'aider même ! Il était prêt à faire des efforts si j'en faisais de mon côté ; c'est-à-dire de poser cette putain d'arme à feu.
J'étais quasi-prête à exécuter ses ordres. Il ne fallu pas grand chose pour me remettre dans le droit chemin ; un clignement des yeux, et revoir les yeux rouges et envoûtant de ce spectre. Les sourcils à nouveau froncés, les bras de nouveau tendu avec l'arme sur lui, j'étais redevenue moi. Il a failli m'avoir, il a failli réussir cette ultime manipulation. Son visage rieur et enfantin laissa place à un visage sombre et menaçant.
Jugnio - TU VAS BAISSER CE FLINGUE OUI OU...
Il fut assommé par Peyan, d'un coup, venant par l'arrière. Un seul coup, poing serré, sûr de lui. Le jeune du Toman s'approcha ensuite de moi, m'arrachant des mains l'arme à feu.
Peyan - Ce n'est pas un jouet !
Moi - Je sais, lâchai-je haineuse. Je n'suis pas débile.
Peyan - Si tu l'es. Et il faut vraiment être idiote pour faire ce que tu viens de faire ! Je sais pourquoi t'as pris le flingue. Même si tu ne te blesses pas avec ce truc, à la seconde où tu tiras sur Jugnio, ta vie sera foutue ! C'est la définition même d'un débile !
Je me mis à respirer bruyamment. L'air ne venait plus comme je le souhaitait. Je me laissa m'écrouler sur les genoux. La tête penchée, les mains ancrées dans le sol, je tentais de respirer. Les larmes venaient s'échapper, laissant par la même occasion un passage pour l'air.
C'était terminé. Le crew et le Toman venaient de faire fuir Austral qui avait laissé Jugnio sur la touche. Quelques blessés parmi nos rangs, mais personne d'abattue... Ou presque. Je me remémorais toute la pellicule de ce soir. La course avec Lisa, le piège d'Austral, l'arrivée en panache de Jugnio, les filles séquestrées depuis plus ou moins longtemps. Charlotte. Loïs. Les révélations, les commentaires, les essaies de s'enfuir ou de provocation peu glorieux. Cette histoire de batte de baseball à la con, la comptine enfantine, les cris étouffés, les séquences sur la violence de Jugnio à l'égard de la violoniste, le sang, la chair, les os, les craquements, le vomis. Les larmes. Les pleures. La frustration. La colère. L'envie irréfutable de vouloir commettre un autre meurtre. L'arrivée du crew, du Toman. L'arme à feu. Le check. Blake et Miles. Miles...
"Il n'y a que les faibles qui pleurent" ; si je connaissais le con qu'a dit ça. C'était peut-être moi... Mais là, j'avais besoin d'être faible. Toujours à terre, je laissa tous ces sanglots que je retenais depuis ces dernières heures sortir. Ils étaient accompagnés de frustrant cris. Je disais des choses qui semblaient incompréhensibles. Je tapais sur le sol, l'air con. Mais qu'importe. Ce terrible bain de sang était fini, mais je continuais de voir cette batte foncer dans le crâne sans vie de Loïs. Je continuais de voir le corps de Miles tomber au ralenti, avant de se fracasser contre le sol.
Lisa ?! Charlotte ?! Je m'étais redressée. Juste en face de moi, à genoux, Marley. Mes yeux devinrent encore plus blessés qu'ils ne l'étaient. Effondrée, je me jeta dans ses bras qui étaient grands ouverts. Ses cheveux étaient mouillés par la sueur. Il avait le visage sale par la poussière et par le sang. L'une de ses mains lui faisait mal ; il avait relâché l'un de ses bras pour le laisser tomber. Il soupira, voyant que je n'avais rien, ou presque... De son autre main, il caressait mon dos pour me calmer. Silencieux nous étions. Mitsuya s'était rapproché aussi, me demandant si j'allais bien. Cette question n'était pas anodine pour lui. Je n'avais pas répondu. Il avait compris que ça n'allait pas. Echelle de douleur ; neuf. Neuf, sur dix. Il n'avait cependant rien dit...
Quelques temps après, l'un de nous avait contacté la police. Le Toman s'était éclipsé ; être mêlé à ce genre de problème allait leur coûter cher. Nous avions compris. Certains du crew étaient aussi parti ; à la demande de Blake qui avait tout géré à lui tout seul : la police, les explications, le piège, JUGNIO, prétendu seul coupable.
La nuit fut courte. Bien trop courte. Entre l'hôpital, et tout le reste... C'est dans cet état d'esprit que la nuit du gala du lycée Varran s'était terminé.
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LES PAS DU 403 (Tokyo Revengers)
FanficLES PAS DU 403 Dans les années 80, un phénomène est né dans les rues d'Amérique. On appelait ça le street dance. Des personnes se mettaient à danser dans les rues, reproduisant de nombreuses figures. Très vite, ça a pris une si grande ampleur que de...