XIII : Vers la psychiatrie.

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J'ai longtemps gardé des douleurs de mon combat contre la porte, on m'a assez vite fait passer à la sonde qui me gêne pas mal. Psychologiquement, c'est terrifiant.
Je me suis excusée auprès de M.Klein de l'avoir dérangé alors qu'il n'avait pas l'air en forme, il m'a dit qu'il fallait surtout pas et que tout allait bien pour lui. Qu'il aurait justement voulu être au courant plutôt que de l'apprendre dans le tas et que là, c'est moi qui compte. J'ai aussi remarqué qu'il avait les yeux bien rouges... Il a dû avoir peur...
J'ai été voir maman en fauteuil roulant car je ne parviens même pas à tenir debout donc il a fallu m'y emmener. J'ai honte de cet état d'incapacité...

Quand on m'a pesée le lendemain de mon réveil, je faisais 34 kg, j'étais redescendu bien bas en peu de temps mais cette fois mon corps ne l'a pas supporté... C'est décevant, peut-être que si je n'avais pas mené ce combat contre mon foyer j'en serais pas là à être obligé d'admettre que je suis malade sinon je meurs.
J'avais envie de me réjouir parce que c'est la première fois que je vais aussi bas mais j'essayais de paraître de marbre face au médecin.
J'ai mal partout, quand j'essaye de marcher j'ai des crampes, j'ai des palpitations, des vertiges et j'en passe...
J'ai froid, constamment. J'ai l'impression que je peux m'éteindre à tout moment.
J'essaye de manger petit à petit mais la nourriture me dégoûte, je n'y arrive pas. Je ne contrôle plus ça. L'ai-je vraiment eu ? Le contrôle ?
J'ai tellement peur de grossir...

Le moment est venu et est urgent de passer dans la clinique psy de l'hôpital après une semaine d'hospitalisation... Sans ça, je n'y arriverais jamais, malgré la mort qui me pend au nez...
Je me pose énormément de questions : Combien de temps je vais y rester ? Aurai-je droit aux visites ? Est-ce que je vais guérir ? J'ai peur de comment ça va se passer, surtout peur de prendre du poids alors que c'est le but et que je sais pertinemment qu'on va m'y obliger pour vivre... Et... que j'en ai besoin...
Je prépare mes affaires, Kévin m'aide, en fait il prépare plus mes affaires que moi car je peine à tenir debout et l'effort demandé me donne trop de vertiges.
Je passe voir ma mère m'efforçant à marcher un peu pour qu'elle n'ait pas l'image de moi qui ne sait plus marcher en tête. Au moins c'est que mon corps commence à aller mieux ? Même si une forte douleur me prend aux jambes... Peut-être que je force juste, il faut pas que je me fasse de faux espoirs, je vais juste mal.
Maman... elle a l'air si mal et je m'en veux de la laisser et je n'arrive plus à lui ouvrir mon cœur, je ne lui dis rien à propos de la proposition de la plainte ni à propos de comment je me sens réellement. Je me suis fermée à elle, peut-être dû à son état ou alors... Il faut que je l'admette, je la rends coupable qu'on en soit arrivé là. Mais ça je préfère me voiler la face, la situation est déjà assez compliquée...
La première à fois où je suis allée la voir depuis qu'on est ici...
Elle...
Elle m'a demandé pourquoi.
Elle m'a demandé pourquoi j'avais appelé la police...
Qu'est-ce que je suis censé comprendre dans ce genre de questions ? Dans ce genre de mots qui résonnaient comme des maux ?
Dois-je comprendre qu'elle m'en veut de l'avoir sauvée ??
Cette culpabilité qu'elle me met dessus est compliquée à comprendre et à gérer... Parce que oui, une partie de moi culpabilise depuis cette question. On a beau me dire que c'était la meilleure chose à faire, cette question, son regard, son ton... Ça me hante comme tout le reste.

Je finis par dire au revoir à ma mère et je sors, suivie de ma sonde et de mes douleurs. Kévin m'attend dans le couloir avec la chaise et mes affaires pour pouvoir y aller.
Mon prof m'avoue être désolé et triste de me laisser seule face à tout ça mais il m'assure que ça va être un mal pour un bien. Il me prend dans ses bras puis je m'assieds sur la chaise, le regardant tristement et une infirmière prend le relais, c'est l'heure d'y aller.
J'envoie un message sur le groupe de la classe car je sais que je n'aurai bientôt plus mon téléphone, ils vont le savoir de toute façon que je suis à l'hôpital alors autant que ce soit par moi. C'est bien mieux que de partir avec des rumeurs et que de laisser mes amis dans le blanc...
Une photo de moi, sonde au nez, visage pâle marqué par les cernes, joues creuses, sourire aux lèvres, pouce en l'air. La réalité en une image...
Le masque est tombé.

Jade, un trouble sous contrôle...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant