9 - A mon tour

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John

Je ne comprends pas son message. Malgré ma nuit blanche et trois relectures de ma conversation avec l'inconnu je ne le comprends pas. Je ne saisis pas le sens de ses mots. Veut-il que je lui dise ce que j'ai toujours voulu faire ? Ou veut-il que je reproduise son propre rêve ?

Oh non pas ça. Tout mais pas ça. Ok j'ai du cran, un bout de charisme quand je m'en donne les moyens et j'ai la tête d'une personne de vingt ans. Seulement aller en backroom... non merci. Je lui ai légèrement laissé croire que c'était le cas avec mon smiley, mais c'était faux. Je ne suis pas majeur et pour moi cet âge-là est important. Je transgresse beaucoup de choses c'est vrai, voir carrément toutes les règles mais pas celles liées à l'âge - sauf pour l'alcool. De toute façon ma mère ne pourrait jamais rien redire là-dessus vu son état.

De mon point de vue un âge c'est sacré. Pourquoi faire tout avant nos dix-huit ans ? Si l'on tente tout que nous reste-il ? 
Je trouve ça dommage de transgresser les règles de l'âge. De plus je n'ai pas envie d'être adulte avant mon dix-huitième anniversaire. Je joue déjà le rôle du parent à la place de ma maman, je vais pas en plus m'occuper des factures ou autre. J'ai des projets à mener et des diplômes à valider.

Alors qu'il est deux heures du matin bien avancée, j'entends des bruits de pas dans la maison. Je distingue des voix plus ou moins grave  et des cris. Je perçois île bruit de vaisselle que l'on casse. Je recul comme pour me fondre dans le mur. J'ai peur. Mon sang se glace dans mes veines. Mes yeux démolissent de larmes. Mon coeur s'emballe et se serre. La pression monte. L'air devient irrespirable. Je suis tétanisé. J'ai beau être habitué à ce genre de scène je ne les supporte toujours pas. Comment peut-on être si violent ?

La maison dans laquelle je vie est un taudis, ça n'a rien d'une vraie demeure. La vérité est tout autre : je vis dans un bungalow rouillé qui empeste l'alcool. La seule sortie est la porte d'entrée. La fenêtre de ce que j'appelle ma chambre est beaucoup trop étroite. J'envoie un message à Steve pour le prévenir que je débarque chez lui. Je sais que je suis enregistré dans ses numéros d'urgence. Son téléphone sonnera même s'il est étaient. Je m'en veux de le réveiller et de lui imposer la présence mais je n'ai pas le choix. Je ne veux pas finir qur un lit de mort.
S'il se passe ce que je pense, mes parents seront endormis d'ici une demi-heure. Plus qu'à espérer qu'ils ne se souviennent pas que j'existe.

‡ ‡ ‡

Une bonne heure plus tard je n'entends plus aucun bruit. Alors je sors de la pièce exigu dans laquelle je dors et me dirige tout de suite vers l'entrée à pas feutrés. Je récupère ma doudoune et mon sac de cours avant de m'enfuir dans la nuit. J'ai toujours peur que l'un d'eux se réveille et vienne me punir. Je ne crois pas que mes parents aient déjà levés la main sur moi mais ça pourrait arriver, et ça me terrifie.

J'ai peur que ce moment arrive et qu'il me mette plus bas que terre.

Je connais le chemin par coeur jusque chez Steve alors je trottine dans le noir presque complet pour rejoindre sa porte d'entrée. Je slalom entre les voitures mal garé et évite les petits recoins afin de tomber sur personne de louche.

A quatre heures du matin je suis enfin devant chez lui et je me sens respirer à nouveau. J'ouvre la porte d'entrée grâce au double des clés qu'il m'a donné il y a des années. Il n'a jamais su ce qu'il se passait chez moi, et il ne m'a jamais forcé à lui dire. Malgré toutes mes cachotteries il m'a fait confiance. Steve m'a offert un foyer quand j'en ai eu le plus besoin.
Quand mes parents ont arrêté de s'intéresser à leur fils c'est lui qui m'a pris sous son aile. Quand ai voulu abandonner et tout laisser, il a été là. Quand j'avais envie de sauter il m'a retenu. Il est mon meilleur ami, il sait tout de moi, ou presque. Il connaît mes failles, mes erreurs et mes cicatrices. Même si je ne suis pas quelqu'un de rose, Steve m'a ouvert sa porte sans même me demander pourquoi j'en avais besoin. Il a été là et c'est tout. Aujourd'hui, dans nos coeurs nous sommes des frères car rien ne nous séparera. Et je l'aime plus que tout.
Certains pourraient mourir pour d'autres, tandis que je pourrais vivre pour lui.
Il est mon tout.

J'entre dans sa maison à pas feutré et au lieu de monter directement dans la chambre de Steve je me dirige vers la cuisine. J'ai besoin d'un verre d'eau. Je dois m'hydrater et me poser trente seconde. Ensuite j'irai lui dire bonjour et me doucher. Puis seulement après je prendrai le temps de me reposer.

Alors que je passe le seuil de la pièce à manger qui donne sur la cuisine, je reste sur le côté et me cache dans l'ombre de l'ouverture. Malgré la vision plutôt nette que j'ai eu je ne peux m'empêcher de rejeter un coup d'oeil à l'intérieur de la pièce.
Là, derrière le bar, deux hommes dont je ne distingue que les torses nus et les têtes sont en train de se rouler une pelle magistrale. Leurs mains se cherchent. Ils se caressent partout cherchant à tout prix le corps de l'autre.

L'un d'eux doit sentir ma présence car il relève la tête et me fixe. Les lumières allumées aident beaucoup il faut dire. Je tente de me rabattre derrière la porte mais c'est trop tard.

Le père de Steve me regarde avec un sourire rieur et des yeux hurlant le défi pendant qu'il continu d'embrasser un inconnu.

Bordel de...

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J'espère que la suite de cette histoire te plaît. Bonne lecture <3

Le jeu perdantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant