32 - Partie de sa vie

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John

— Pourquoi me regardes-tu comme ça ? me demande Steve.

— Je... Non rien, je t'écoute.

— Mon père m'a enfin parlé d'elle après dix-huit ans, m'explique-t-il. Je crois que c'est parce qu'il avait honte.

— Honte de quoi ?

— De son adolescence, m'annonce-t-il.  C'est à cette période qu'il a rencontré ma mère et qu'elle est tombée enceinte de moi. Je pense qu'il n'aime pas se remémorer cette partie de sa vie.

— Tu ne m'as jamais parlé de ton désir de savoir qui elle était. J'aurai peut-être pu t'aider.

— Je ne pense pas que tu la connaisses, les chances sont trop minimes et quand bien même, comment aurais-tu pu la retrouver ?

Il n'a pas tord et pourtant, je sais qui elle est. Je ne lui réponds pas, je ne sais pas quoi lui dire. Je ne veux pas lui avouer que notre sang est lié. Même moi je n'arrive pas à y croire.

— Quand ils étaient jeunes, ils étaient tous les deux dépendants aux drogues, me dit-il les yeux toujours embués. Mon père venait de rentrer dans l'adolescence alors qu'elle approchait de la majorité. Elle m'a mise au monde et ne m'a jamais reconnu. Elle ne voulait pas d'enfant et préférait prendre de la drogue. Alors mes grands-parents ont soutenu mon père pour qu'il m'élève et continu ses études.

Mon coeur bas plus vite, entre panique et amour tout se mélange en moi. Gaëtan est l'inconnu, l'inconnu est Gaëtan. Il n'y a pas de doute possible. Il s'agit de la même histoire.

— Il ne voulait pas que je juge ses déboires de peur que je ne le prenne plus au sérieux et que je remette en doute ses capacités de père, alors qu'il a toujours été le meilleur à mes yeux. Je l'aime plus que tout.

— Je sais que tu l'estimes beaucoup Steve, je le rassure. Ce que je veux savoir c'est comment tu vas par rapport à ça.

— Le fait que ma mère soit morte sans que je la rencontre me fait mal. J'ai l'impression qu'il me manque une pièce, que le puzzle de ma vie ne se terminera jamais. Je ne me suis jamais vraiment posée de question sur elle, mon père me suffisait, me confie-t-il. J'avais un parent mais il me donnait assez d'attention et d'amour. Mais au fond de moi, j'ai toujours eu ce désir de savoir à quoi elle ressemblait et pourquoi elle ne faisait pas partie de ma vie.

— Et ça t'a fait du bien d'apprendre qui elle était ?

— Finalement je n'en suis plus si sûr. Sur le moment oui, mais maintenant je ne sais plus, m'avoue-t-il.

— Qu'est-ce qui te fait douter ? le poussé-je à réfléchir.

— Je n'aurai jamais de réponse sur qui elle était.

Je prends une grande inspiration avant de me lancer :

— Je peux demander à mon père.

— Pourquoi ?

— Il l'a connu quand ils étaient jeunes. Je peux peut-être essayer de me renseigner auprès de lui.

— Tu m'as dit qu'ils ne bougeaient pas du canapé, se rappellent-ils. Je ne veux pas que tu fasses quelque chose qui pourrait te coûter.

— Je veux t'aider, j'affirme déterminé. J'ai fait silence radio pendant des semaines, je ne veux pas te laisser seul dans ton coin.

— Merci beaucoup.

Il me sert dans ses bras avant de se lever de son lit et de m'attirer à sa suite.

— Où allons-nous ? je lui demande étonné par sa vivacité.

Le jeu perdantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant