Chapitre 41

48 8 6
                                    

Je séchais une dernière fois mes cheveux bruns, avant de reposer ma serviette sur le dossier de ma chaise de bureau.

Au vue de la puissance de l'orage qui s'était abattu il y a une petite heure sur la côte, madame So avait décidé de rentrer au centre. Mais à peine avait-on regagné le bâtiment principal que la pluie avait cessé. Nous avions donc quartier libre toute la fin de l'après-midi.

J'avais quant à moi décidé de remonter dans la chambre pour me sécher et me changer, préférant éviter d'attraper froid en juillet. C'est donc vêtu d'un bermuda noir et d'un grand t-shirt rouge orné d'un coquelicot des plus simple que je saisis délicatement Pilo entre mes bras. J'attrapais à la va-vite un livre qui traînait sur mon bureau, avant de sortir de la chambre.

Quand j'étais au collège, j'aimais beaucoup lire. Malheureusement, à mon entrée au lycée, j'avais arrêté. Sûrement par manque de temps ou d'envie. Cependant, pendant ce long mois, j'allais en avoir, du temps à tuer. J'avais donc saisi l'occasion pour prendre trois épais romans dans ma valise.

Je sortis du bâtiment des dortoirs, avant de descendre les quelques marches qui me séparaient du jardin. Mes pieds nus entrèrent en contact avec l'herbe rêche encore mouillée, et un sourire fila vers mes lèvres. Je traversais doucement les grands jardins en respirant goulûment l'air rafraîchit par l'orage récent.

Puis, je repérais un petit muret au bout du vaste espace vert. Derrière le petit mur de pierre, une pente abrupte tombait vers une petite forêt une cinquantaine de mètres plus bas. Cette dernière s'étendait sur une vaste parcelle, quelques toits de tuiles noirs perçant çà et là son duvet de feuilles émeraudes. Et puis là, au loin, reposait paisiblement la douce mer de Busan. Le soleil de fin d'après-midi faisait doucement briller ses petites vagues, tandis que les silhouettes des premières îles Japonaises se dessinaient à l'horizon.

Je souris sereinement, avant d'enjamber le petit muret, m'asseyant sur les pierres déjà presque seiches. Je posais ensuite délicatement Pilo à côté de moi, le laissant lui aussi profiter de l'air frais et du soleil de fin de journée.

Après avoir imprimé une dernier fois le paysage dans ma mémoire, je penchais la tête vers mes genoux. Inspirant un grand coup, j'ouvris le livre que j'avais pris avec moi, commençant ma lecture à la première page.

Ce doux moment dura un temps que je ne saurais quantifier. Le ronronnement des vagues venait doucement caresser mes oreilles, tandis que l'air frais détendait mes poumons. J'étais juste bien. Au milieu de nul part, seul, entouré de tout ce que j'aimais. J'aurais tellement voulu que cet instant dure indéfiniment.

Soudain, mon téléphone vibra dans la poche arrière de mon bermuda, et je crus bien tomber en avant dans les fourrés. Avec un soupire, je sortis l'objet du démon, avant de pincer violemment mes lèvres entre elles.

📞

Appel entrant

Maman













Accepter > > > > > < < < < < Refuser


Mon cœur se serra, et comme plusieurs fois déjà depuis que j'étais partis, je refusais l'appel. Je mis ensuite me téléphone en silencieux, avant de le poser un peu plus loin sur le muret.

Je pris une grande inspiration, calmant mon cœur douloureux et ma gorge serrée. Puis, je replongeais dans mon roman, essayant de faire abstraction de mes mains tremblantes. Mais ma concentration était partie.

- Inniiiiiiiie ! Retentit soudainement une voix derrière moi.

Je soupirais, fermant fortement les yeux dans l'espoir de disparaître, mais c'était hélas trop tard.

- Tu fais quoiii ?! S'écria Sumin en s'arrêtant près de moi.

Son odeur d'océan imprégna l'air autour de moi, et je baissais la tête vers mon livre, faisant mine de lire même si je n'y arrivais plus vraiment.

- Oh, tu lis quoi ? Questionna le bleuté en soulevant un peu mon roman pour en apercevoir la couverture. '' Le liseur du 6h27 ''. Lut-il. Ooh ! Je l'ai chez moi ! Ça fait longtemps qu'il faut que je le lise, mais je l'ai jamais fait. Tu me diras si il est bien !

Je levais les yeux au ciel, avant de replonger dans ma lecture.

- Ouaaaaa... C'est beau, ici. Continua Sumin. En plus y'a personne. Et on voit même la mer ! Oh ! T'as sortis ta plante ? Comme ça elle prend l'air ! Sourit-il en caressant doucement les feuilles émeraudes de Pilo.

Je le surveillais du coin de l'œil, m'assurant qu'il ne fasse pas de bêtise avec ma précieuse plante. Quand il s'éloigna enfin de Pilo, mon regard fila à nouveau vers les pages couvertes de lettres sombres de mon roman.

- Oh ! S'écria-t-il soudainement. C'est ton téléphone ?

Je fronçais les sourcils, avant de tourner la tête vers lui. Il tenait dans sa main mon portable, un léger sourire sur les lèvres.

- Tiens, je crois que ta maman t'appelle. Fit-il en tournant le mobile vers moi, le contacte de ma mère s'affichant à l'écran.

Je mordis mes joues, avant de lui prendre le téléphone des mains, raccrochant une énième fois l'appel de ma mère. Sumin me regarda avec de grands yeux, mais je n'y fis pas attention, reportant mon regard vers mon livre, bien que je n'ai à présent plus du tout envie de lire.

J'entendis le garçon senteur d'océan s'asseoir à côté de moi sur le petit muret, et je fermais fortement les yeux. Tout d'un coup, ma fatigue était revenue en masse, alourdissant mes paupières et nouant ma gorge. J'avais envie d'être seul. Juste seul. Étais-ce trop demander ?

Je refermais mon livre, avant de le poser un peu plus loin. De toute manière, je ne lisais plus. Balançant mes pieds nus dans le vide, mon regard se porta vers le paysage qui devint de plus en plus flou à mesure que la boule grandissait dans ma gorge. Bientôt, de lourdes gouttes commencèrent à glisser le long de mes joues. Mon cœur était comme transpercé par un pieu invisible. Et je me contentais de regarder l'horizon. Mon corps entier se crispant de douleur.

Pour une fois, Sumin ne dit rien. Il resta juste assis à côté de moi, observant silencieusement le mouvement hypnotisant de la mer au loin.

Ce n'est que lorsque de lourds sanglots commencèrent à secouer mon corps qu'il prit doucement ma main dans la sienne. Je ne comprenais pas vraiment ce qu'il m'arrivait. En temps normal, je ne pleurais pas devant d'autres. J'avais toujours réussi à me retenir. Alors pourquoi pas là ? Je ne savais même pas vraiment pourquoi mes larmes coulaient. Mais la vérité, c'est qu'essayer de les arrêter ne m'avait même pas effleuré l'esprit. À ce moment-là, je n'avais aucune envie de me retenir. Alors même que je ne connaissais même pas exactement la cause de mon chagrin.

Et alors que mes sanglots se faisaient de plus en plus forts, Sumin passa doucement sa main libre derrière mon dos. Il m'attira précautionneusement vers lui, sans que je n'oppose de quelconque résistance. Il me serra simplement dans ses bras, sans dire mot, ma tête trop lourde s'échouant près de son épaule.

Et je restais ainsi. Blotti contre ce garçon que je ne connaissais presque pas.

Et il resta ainsi. Attendant patiemment que mes joues sèchent.

Et on resta ainsi. Face à la mer, le temps avait semblé s'être arrêté. 

𝐈𝐧 𝐦𝐲 𝐡𝐞𝐚𝐝 ° Jeongin 🔚Où les histoires vivent. Découvrez maintenant