CHAPITRE DEUX

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Mon sourire s'efface d'un coup et je ne sais pas trop quoi dire, même si l'inquiétude prend la totale possession de mon corps. Que c'est-il passé ? Quel est le problème ? Est-ce qu'ils vont bien ? Je ne pose aucune question et j'attends qu'il m'explique.

— On a eu un accident de voiture, m'explique-t-il.

— Quoi ? Vous allez bien ?

— Oui, je crois qu'on va bien.

— Comment ça tu crois ? Vous êtes où ? Que je vienne vous voir.

— On est à l'hôpital. On est surveillé, ne t'inquiète pas.

Comment il veut que je ne m'inquiète pas ? Ma meilleure amie et son mari ont eu un accident de voiture ! Il me dit aller bien, mais est-ce que je dois le croire ? Si ça se trouve il me dit ça pour que je ne m'inquiète pas.

— Envoie-moi votre numéro de chambre ou l'endroit où vous êtes précisément, que je vienne.

— Tu n'es pas obligé.

— Si.

J'ai besoin de les voir en chair et en os, de les voir vivant. Certes Valentin me parle, mais ça ne me dit rien sur son état physique. Puis même, comment va Judith ? J'ai besoin de voir ma meilleure amie !

— S'il te plaît envoie moi là où vous êtes.

Je vois que c'est bientôt à mon tour de passer à la caisse, depuis le temps que j'attends.

— S'il te plaît, répété-je.

— Je fais ça. Met ton salaire dans les jouets de mes gosses.

Je l'entends rire et c'est presque rassurant. Je raccroche et range mon téléphone. Je n'ai que quelques secondes à attendre avant que ce soit mon tour de payer. C'est rapide, plus rapide que pour les autres, sûrement parce que je n'ai qu'un truc à faire passer. Je me retrouve à l'extérieur puis dans ma voiture. Là, je regarde mon portable et je vois que Valentin m'a envoyé son numéro de chambre. Je m'empresse de mettre mon véhicule en route pour y aller.

Sur la route, je ne peux pas m'empêcher d'angoisser. D'ailleurs, la musique de mon poste radio est si basse que j'ai l'impression qu'il n'y a rien qui en sort. Bizarrement, dans ma tête il se joue plein de souvenirs que j'ai avec Judith. On s'est rencontré à l'école maternelle. Elle était bizarre à jouer avec des fourmis, j'aimais bien les fourmis, on a parlé insectes et on ne s'est plus jamais quitté. Je revois ce jour où elle m'a présenté Valentin et que je me suis dit qu'il était con, trop pour elle. Mais elle l'aimait et lui aussi et dix ans après, ils sont mariés et ont deux merveilleux enfants. Puis maintenant, j'aime bien Valentin, il fait briller d'amour les yeux de ma meilleure amie.

Je me gare avec difficulté sur le parking de l'hôpital, comme d'habitude. Je m'empresse de sortir de mon véhicule et de m'engouffrer dans l'enceinte du bâtiment. Il y a comme un brouhaha et je suis presque perdue. Je dois prendre sur moi pour continuer d'avancer. Sur les panneaux, j'essaie de voir jusqu'à où je dois aller. Ascenseur B. Il est où celui-là ? Ah, à droite. Je me mets en route. Je patiente quelques instants devant l'ascenseur après l'avoir appelé, avant qu'il n'arrive. Quand les portes s'ouvrent, deux personnes en descendent et je suis seule à y monter. J'appuie sur le bon étage et sur le bouton pour fermer les portes.

— Attendez !

Je ne reconnais pas la voix et pour faire ma bonne action de la journée, je bloque les portes avant qu'elles ne se ferment pour faire entrer cet homme avec moi. Cependant, quand les portes sont ouvertes, qu'il débarque un peu essoufflé devant moi, je me rends compte de qui il est. Matt. Oui, le Matt Pokora qui chante. J'aurais dû rester immobile en l'entendant.

— Merci, me dit-il.

— Y'a pas de quoi, répondis-je froidement.

Je me décale de l'ouverture et il entre. Lui et moi dans un ascenseur ? Laissez-moi descendre, je vais prendre les escaliers, même si je dois aller au cinquième étage, ça me fera faire du sport. Les portes se referment et je maudis ce moment. Si je suis la meilleure amie de Judith, Matt est le meilleur ami de Valentin, à mon plus grand désespoir. Depuis plus de dix ans j'essaie de ne pas le croiser, de ne pas lui parler, mais il faut cet accident pour qu'on se retrouve dans le même ascenseur.

— Tu vas voir Judith ? Me demande-t-il.

Même sa voix m'énerve. Tout m'énerve en lui, sa tête, sa voix, son sourire et le pire, ses chansons. Je ne sais pas pourquoi je ne le supporte pas, c'est physique et je crois que c'est réciproque.

— À ton avis ? Je ne viens pas ici pour te croiser.

— C'est vrai.

— J'aurais dû prendre les escaliers, grogné-je.

— Ça ne t'aurait pas fait de mal.

Il a osé. Quel connard. Ça ne m'étonne pas de lui.

Matt ne m'a jamais rien fait, ni même moi, mais moins on se voit, mieux on se porte. Les portes s'ouvrent à nouveau et j'ai cru qu'une année venait de s'écouler à l'intérieur de cet ascenseur. Je sors la première sans me soucier de lui et je tourne à droite. Je sens qu'il ne me suit pas.

— Jenifer, me lance-t-il, c'est par là leur chambre.

Je me retourne vers lui. Un petit hall pour les ascenseurs nous séparent.

— Quoi ?

— Tu t'es trompée de direction.

— Non, c'est toi.

— Fais comme tu veux.

Il hausse les épaules et tourne les talons de son côté. Je continue du mien et ça me fait mal de l'avouer, mais il avait raison, je me suis trompée de direction.


All I want for christmas is NOT you (JENIFER x MATT POKORA)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant