Réaliter

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Six heures du matin et je n’ai toujours pas réussi à fermer l’œil de la nuit. Je pouvais entendre à travers mes murs les pleurs de ma sœur, mais j’étais incapable de la réconforter, incapable de trouver les mots ni les gestes.Mon corps ne répondait plus. J’étais comme aspiré par mon lit, j’étais incapable de me lever, je basculais d’un flanc à l’autre, rien de plus.
J’entendais ma mère faire des allers-retours dans sa chambre, puis dans la mienne. Elle avait tenté une approche, mais j’ai reculé, comme si tout était de sa faute, alors qu’au fond je savais très bien qu’elle souffrait autant que moi. Elle n’est pas revenue me voir de la nuit après ça.
Dès que je fermais les yeux, je voyais le visage de mon père, son sourire. Je tournais en rond, je tapais contre le mur, je voulais extérioriser cette peine. Je tapais contre ma poitrine tellement j’avais mal, je ne supportais plus cette douleur.

Je finis par m’allonger en étoile de mer à regarder mon plafond en espérant trouver une minute de paix dans mon esprit quand ma mère frappe timidement.

Je la regarde, elle semble aussi vide que moi mais elle paraissait si forte. Je me dresse et me décale puis elle s’assoit et contemple les photos accrochées sur celui-ci.
Je n’ai jamais été très proche de ma mère. Elle a toujours été très sévère, ne faisait jamais rien avec moi, prétextant qu’elle n’avait pas de temps alors qu’elle ne faisait rien de ses journées. Mon père lui, c’était autree chose, cetzit ma vie et on me lavait arrachée

- Aujourd'hui, c'est la veillée. Il faut que tu te prépares, dit-elle tout bas.

- Je peux aider ?

- Non, tout est déjà organisé.

Elle est partit aussi vite qu'elle est venue.

Je crois bien que le sommeil a eu raison de moi. Mon portable affichait déjà 11h00. Je supprime les innombrables messages de condoléances et autres messages à la con de personnes que je pensais ne plus connaître et marche jusqu’à la salle de bain. Je n’avais pas eu de nouvelles de l’état de mon frère et Ryu ne répond pas au téléphone.
Après la veillée, j’irai voir mon frère.

Je prends une longue douche chaude, à m'en brûler le corps. Les mains contre le mur, je laisse les gouttes tracer leur chemin le long de mon corps. J'étais en mode pilotage automatique, je faisais les choses machinalement. J'enfile un jean noir avec un pull noir que je fourre à l'intérieur. Je détache mes cheveux qui m'arrivent jusqu'à la taille, mon père aimait quand je les détachais. Je souris à cette pensée et continue de me maquiller histoire de masquer le manque de sommeil.

Une fois prête, je respire un bon coup et descends rejoindre ma mère et ma sœur. Ryu était là. Il s’approche de moi, pose délicatement sa main sur mon épaule et me propose un café. J’acquiesce et m’installe à côté de ma sœur. Vu son visage, elle n’avait pas plus dormi que moi. Un silence de plomb régnait dans la maison et dix minutes plus tard, nous voilà tous dans la voiture, Ryu au volant.

La veillée se passe dans une grande salle spécialement aménagée pour l'événement.
Il y avait une trentaine de voitures, des Yakuza à perte de vue, de tous les niveaux, de tous les âges. Tous étaient venus nous soutenir, pour rendre un dernier hommage à mon père et de les voir tous ici présents me donne envie de fondre en larmes.

J'avance machinalement, suivie de ma sœur et de ma mère. Dans la salle, des rangées de tables étaient alignées où trône une immense toile de mon père. J'avance avec hésitation jusqu'au portrait. Il était tellement beau dessus. Je pose ma main sur la toile, caresse son visage délicatement, comme si je pouvais le blesser. Mes yeux se brouillent une fois de plus à cause de mes larmes. Je ne pourrai plus entendre sa voix, ni le voir. Je n'entendrai plus son rire ni l'entendre hurler contre moi.

Hina : Vie De YakuzaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant