Un

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AURORE

J'avais tenté de m'y faire. J'avais tenté de faire de ce don une partie de moi. J'avais tenté de m'y habituer.

Mais c'était impossible.

Chaque fois que je quittais la sécurité de ma chambre, j'étais assaillie par les pensées de mon père. Bruce était quelqu'un de calme et réservé, mais son esprit ne l'était pas pour autant. Au contraire.

Dans sa tête, c'était un tumulte d'inquiétudes, d'angoisse, de flashbacks de son enfance. Il était constamment sur le qui-vive et couvait en lui une colère grandissante.

Mon père, je le connaissait par cœur. Ce n'était pas très difficile de me concentrer sur autre chose que ses pensées contradictoires.

Mais lorsque venait le temps d'aller à l'école, c'était une tout autre histoire. J'avais toujours des écouteurs dans les oreilles. En cours, je me focalisais sur la tête du professeur, puisqu'elle regorgeait d'information. C'était ainsi que je passais mes années.

Malgré tout, je ne pouvais pas empêcher quelques bribes de pensées de s'immiscer dans mon esprit. Parfois, c'était la fille populaire qui fantasmait sur le prof, d'autres fois, c'était le garçon discret qui s'imaginait entrer dans l'école avec un fusil d'assaut et tuer tout le monde.

Le meilleur moment de la journée, c'était lorsque je rentrais à la maison. Papa habitait à dix minutes de l'école et c'était une libération pour moi que de marcher à l'air libre avec ma musique qui noyait les réflexions de ceux qui m'entouraient.

Je me préparais donc mentalement, en ce moment même, à ouvrir la porte de ma chambre protégée par des murs en acier, et à faire face au monde extérieur.

Pieds nus sur le carrelage froid, j'hésitai, la main en suspension au-dessus de la poignée. Cette pièce se barricadait de l'intérieur, donc si je décidais de rester enfermée, papa n'aurait d'autre choix que me laisser faire.

Mais je n'étais pas faible. Je pouvais faire face à tout ça.

Je l'avais toujours fait.

Je poussai la porte, me préparant à être happée par le fourmillement des pensées de Bruce. Le silence qui m'enveloppait fut repoussé, comme une simple brise serait enfouie sous l'orage.

«Et si elle refuse? Et si elle est en colère contre moi d'avoir prit cette décision? Et si elle fugue?»

Surprise par les pensées agitées de mon père, je toquai sur le mur pour attirer son attention.

- Seigneur, Rory! s'exclama-t-il en plaquant une main sur son cœur.

- Désolée... je souris tristement.

Non, ce n'est rien. J'étais... Absorbé... Par le comptoir, se défendit-il maladroitement.

Je haussai un sourcil et penchai la tête sur le côté. Je n'étais pas dupe, mais c'était plus fort que lui. Il cherchait toujours à me cacher son mal, même s'il était évident.

Qu'est-ce qui t'inquiète? demandai-je en versant du café dans une tasse.

Je m'assis à la table, le regard levé vers lui. Même si c'était inutile, je tenais à le regarder dans les yeux pour déchiffrer ce qu'il ressentait. 

OUR STORM OF PAIN || Bucky Fanfiction || 18+Où les histoires vivent. Découvrez maintenant