Chapitre 4

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 Les brouhahas régnaient en maître dans l'amphithéâtre numéro deux de l'université de Sendai. Yuna rasait les murs afin d'éviter tout contact physique avec ses camarades qui s'étaient amassés dans la salle. Elle était dépassée par le stress des autres membres de sa promotion qui s'impatientaient de connaître leurs résultats au devoir de la veille. Yuna, elle, ne ressentait pas ce besoin futile de connaître sa note. Elle, se moquait éperdument du résultat, sûre et certaine d'appartenir une fois de plus au haut du panier. La seule chose qui différenciait des autres fois et qui avait le mérite de l'intéresser, était l'enjeu qui découlerait probablement des résultats de cette interrogation. Dans quelques minutes, elle allait enfin savoir si ses hypothèses étaient fondées ou non.

Yuna les regardait tous s'affoler sans mot dire, se retenant d'afficher un sourire moqueur. Elle ne pouvait s'empêcher de penser à quel point le monde était ironique. Si le gouvernement avait effectivement décidé de mettre le nez dans ses affaires, il était évident que les stratagèmes employés pour tenter de la coincer allaient se retourner contre eux. En se fiant aux mauvaises notes pour débusquer les membres du gang de Pégase, les autorités auraient le temps de passer au crible presque tous les étudiants du pays avant même que Yuna ne puisse paraître sur la liste des suspects. Et Yuna savait parfaitement que le gouvernement n'aurait pas la patience d'attendre ce stade et arrêterait les frais bien avant.

Yuna avait toujours perçu les choses différemment des autres. Depuis sa plus tendre enfance, elle s'obligeait constamment à analyser avant de foncer. Parce qu'elle était née dans ce monde qui ne semblait pas l'accepter, elle s'était juré de devenir la meilleure dans n'importe quel domaine pour créer un univers dans lequel elle aurait une chance de véritablement exister.

Elle avait toujours été capable de faire deux choses diamétralement opposées pour tromper cette fichue société bafouée. Il était donc ironique de penser que, elle qui avait déjà paradoxalement tout fait dans sa vie, serait incapable de mêler les études et le crime.

Après tout, Yuna faisait bien mieux que ça. Elle se servait de ses études censées lui apprendre à préserver la vie pour faire régner la mort durant la nuit. Depuis près de vingt ans, elle avait appris à sourire pour mieux dissimuler, à mentir pour mieux tromper, à apprendre les limites de la vie pour mieux donner la mort.

Son éternel sourire en coin rivé sur le visage, Yuna prit place sur une chaise à l'écart de tous les autres étudiants. Elle ferma les yeux pour tenter d'atténuer les effets des brouhahas sur son esprit qui aurait tout donné pour les faire taire à jamais.

L'excitation qui régnait jusqu'alors en maître laissa soudain place à un silence mortuaire. Yuna ouvrit lentement les yeux, devinant que leur professeur avait fait son entrée.

— Ne sortez pas vos affaires, annonça-t-il directement. Certains d'entre vous n'en auront pas l'utilité.

La porte de l'amphithéâtre s'ouvrit brusquement, laissant apparaître une dizaine de policiers qui prirent place aux côtés de l'enseignant. Yuna laissa ses oreilles trainer pour capter les sujets des murmures inquiets qui envahissait désormais la salle. Chacun se demandait ce que les flics pouvaient bien faire ici, ne se doutant à aucun moment que certains d'entre eux seraient sûrement soupçonnés d'être des assassins sans foi ni loi.

— Bonjour à tous, je suis le commandant Saguro. Tous ceux dont je mentionnerais le nom sont priés de suivre mes collègues sans faire d'histoire.

Yuna se délectait de la scène. Ses hypothèses commençaient à se vérifier et tout portait à croire qu'elle avait vu juste. Elle avait sous les yeux la preuve que le gouvernement était à l'origine de toute cette mascarade. Il ne lui manquait plus qu'à retenir les noms de l'ensemble des personnes qui allaient être citées.

La Sentence Des Astres (Terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant