Partie 4 - Les amis.

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« Comment c'est trop chiant, bordel... C'est tout pareil, la routine infernale du lycée, sauf que là, ben vous êtes pas avec moi. Et qu'en plus, quand je rentre, y'a six autres gamins à la maison ! »

Son ami Matthieu exhala un petit rire quand il dit ça et il sentit son ami Claude tapoter son avant-bras de sa main, alors il se tourna vers lui. Claude avait un air dépité sur le visage et il fut content de pas être seul à se sentir frustré par la situation.

« Mais pourquoi ils t'ont changé de lycée, je comprends pas ? demanda Ablaye en face de lui et il haussa les épaules, irrité.

— Bah parce que ma nouvelle famille d'accueil n'habite pas dans le même coin de la ville qu'habitaient mes vieux.

— Mais c'est trop con. T'avais tous tes potes là-bas... T'avais même commencé l'année scolaire, dit Matthieu en fronçant les sourcils. C'est différent sans toi.

— Ouais, bah fallait dire ça à mes parents avant qu'ils aient la bonne idée de clamser en plein milieu alors. »

Il sentit l'atmosphère se faire plus lourde quand il dit ça et il releva la tête pour regarder ses amis. Ils se regardaient tous d'un air embarrassé et il se retint avec peine de lâcher un juron. Et merde.

« Désolé, ma biche. On voulait pas te mettre mal, hein, lui dit doucement Claude à sa gauche et il haussa les épaules, pas habitué à autant de prévenance de sa part.

— T'inquiète, ça va. Mais ça me saoule, putain. D'abord, je perds mes parents. Et maintenant, vous ?

— Tu nous as pas perdu, Guillaume. On sera toujours là pour toi, lui sourit gentiment Matthieu et il exhala un petit rire, bien trop habitué au contraire de sa bienveillance à lui.

— Je sais, Matthieu... Mais c'est pas pareil...

— Bien sûr, je comprends. Et si tu nous parlais des gens avec qui tu vis maintenant ? Ils ont ton âge ? Y en a qui ont l'air sympa ? T'as dit six gamins tout à l'heure ? Ça fait beaucoup, punaise... Déjà que je m'en sors pas avec mes deux petites sœurs moi... »

Il exhala un petit rire en entendant Matthieu essayer de changer de sujet ainsi pour lui éviter de trop se morfondre dans sa tristesse. Puis il pensa à ce qu'il avait dit : six gamins. Pourquoi avait-il dit six ? Ils étaient huit en tout. Est-ce qu'inconsciemment il avait enlevé Aurélien en disant le mot gamins ? Pourtant c'était pas le plus grand de tous, ni celui qui semblait le plus dégourdi... Il sortit de ses pensées en voyant la serveuse arriver avec leurs boissons et il lui sourit doucement. Ça faisait du bien d'être hors de cette maison ne serait-ce qu'un instant.

***

Il leva la tête de son livre en entendant la porte d'entrée s'ouvrir et il patienta un moment afin de voir de qui il s'agissait, étant assis dans le salon. Guillaume entra alors dans ce dernier et – il ne comprit pas bien pourquoi – il se sentit aussitôt soulagé de le voir. Pourquoi est-ce qu'il ressentait ça ? Ce soulagement ? Est-ce qu'il avait eu peur qu'il ne rentre pas après être sorti toute la journée ? Mais c'était bizarre, habituellement il s'en moquait si un de ses... frères ?... partait pour la journée, ou même le week-end. Il s'en serait foutu même s'il ne revenait pas du tout. Mais ça, ce n'était jamais arrivé jusqu'ici. Aucun d'eux n'avait de raison de vouloir s'en aller en plus. Pas comme lui. Il écarquilla alors les yeux en voyant Guillaume se diriger vers lui et quand celui-ci fut devant lui, il lui jeta un petit regard effrayé :

« Qu'est-ce que tu lis ? lui demanda le plus grand et il cligna des yeux, surpris qu'il lui adresse la parole encore une fois.

— Euh... bredouilla-t-il, perdant l'usage de la parole un instant, avant de baisser la tête en direction de son livre. Ju-Jules Vernes... Vingt mille lieues sous les mers... Tu connais...?

— De nom seulement. C'est... un roman d'aventure, c'est ça ? lui demanda Guillaume et il hocha la tête, surpris qu'il connaisse. Ma prof de français nous en a déjà parlé de ce bouquin. T'as envie de t'évader ? »

Il écarquilla les yeux en l'entendant lui demander ça, son cœur se mettant aussitôt à battre plus fort dans sa poitrine au sous-entendu, avant de voir le petit sourire que lui adressait à présent Guillaume. Il rigolait. C'était une blague. Bien sûr qu'il ne pensait pas qu'il avait envie de s'échapper d'ici juste parce qu'il lisait un livre d'aventures. Le plus grand lui fit un clin d'œil, puis tourna les talons pour s'en aller, sans un mot de plus. Il se sentit rougir fortement et, en tournant la tête pour cacher sa gêne à Guillaume au cas-où il se retournait, il croisa le regard de Paul sur lui. Celui-ci le fixait attentivement et il frissonna sur le canapé à ce regard. Qu'est-ce que ce dernier pouvait donc bien signifier ?

Fiction OrelxGringe - Parle-moi.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant