Chapitre 13 : conversation imposée

138 15 0
                                    


Naomy

J'ai appelé Julie, afin qu'elle vienne passer la nuit avec moi. Nous avons terminé par faire une soirée pyjama dans le salon, avec Andrew. La nuit fut très difficile. Une grande sensation d'angoisse ne semble pas vouloir me quitter. Et ce n'est pas pour rien : il y a deux jours à peine, un homme est rentré par effraction chez moi pour... Je ne sais même pas pourquoi ! Si ce n'est qu'il en avait après moi. Cela me fiche une frousse indescriptible.

Le pire dans tout ça, c'est que nous sommes allés à la police le lendemain et ces incompétents ont annoncé qu'ils ne sauraient rien faire pour moi. Ils n'ont pas su retracer le trajet de la personne. J'ai hésité à appeler mon père, afin qu'ils les forcent à enquêter. Je ne l'ai pas fait, de peur qu'il ne me force à habiter dans une résidence partagée ou pire, à retourner vivre chez eux. Il semblerait donc que je vais devoir rester avec la peur que mon assaillant revienne un jour. Je suppose que cela finira par passer... De toute façon, Andrew est devenu encore plus protecteur. Et je l'en remercie ! Je ne sais pas ce que j'aurais fait sinon. D'ailleurs, ça lui a permis de se rapprocher un peu de Julie. Même si Clément s'est légèrement réveillé et est resté en contact avec elle depuis. Ça sent le bon triangle amoureux. Je n'aimerais pas être à sa place...

Mon cours se termine enfin. Cette journée a été interminable. Heureusement que nous sommes vendredi ! Je dois aller rejoindre Andrew qui m'attend avec Julie devant la résidence.

Je range mes affaires dans mon sac lorsque j'entends mon téléphone vibrer. Je le saisis et constate que j'ai reçu un message d'un numéro que je ne connais pas : "Serait-il possible de récupérer le livre pour quelques jours ? Il se trouve que j'en ai besoin.", et c'est signé V. de Chastenet.

Je fixe le message pendant plusieurs secondes, incrédule.

— Comment a-t-il eu mon numéro ? murmuré-je.

Un deuxième message s'affiche : "Je suis dans mon ancien bureau. J'aimerais le récupérer cet après-midi au plus tard.". Donc il veut mon bouquin, mais en plus de ça, il le veut pour aujourd'hui. Il n'est pas du tout gonflé. Il a de la chance, je l'ai justement terminé lors de ma pause ce midi. Je comptais de toute façon le rendre à la bibliothèque. Mais... est-ce que je ne risque pas des ennuis pour ne pas l'avoir rendu moi-même ? Enfin, c'était mon professeur quand même, je suppose qu'il est responsable. Bon, on dirait qu'un détour s'impose avant de profiter pleinement de mon vendredi soir.

Je préviens Andrew que j'aurai quelques minutes de retard. Ensuite, j'enfile mon sac à dos et sors. Tous les étudiants ont déjà quitté la classe et les couloirs. Ça me donne un grand sentiment de déjà vu. D'ailleurs, c'était lui qui me rendait le livre à ce moment-là. Sauf que vu que c'est le printemps maintenant, il fait encore jour, même si le soleil ne va pas tarder à prendre congé.

Il ne me faut pas longtemps pour atteindre son bureau. Une fois arrivée devant, je toque trois timide coups. La réponse ne se fait pas attendre.

— Entrez, souffle une voix sombre.

Lorsque j'ouvre la porte et pénètre dans l'espace, il me parait encore plus effrayant qu'avant. Déjà, il y a fait plus froid. Et... je ne sais pas. L'ambiance y est austère. À nouveau, la pièce est plongée dans le noir. Le store est fermé et seule la petite lampe de chevet posée sur son bureau éclaire une partie modérée de la pièce. Très modérée, même.

Il est assis sur la chaise de bureau en face de ce dernier. La bas de son corps est faiblement illuminé grâce à la lampe. D'ici, je ne distingue pas son visage. Tout ce que je vois, c'est qu'il semble porter un costume gris foncé, avec une cravate noire. Je ne peux m'empêcher de penser que si quelqu'un le prenait en photo là, maintenant, ça ferait le cliché parfait. Le magnifique businessman bien habillé, devant son bureau. Ou alors le mafieux prêt à signer un contrat avec un assassin. En tous cas, il exulte la masculinité. Je ne peux empêcher les battements de mon cœur d'accélérer. Finalement, il ne fait plus si froid que ça...

Il m'indique le siège de l'autre côté du bureau.

— Assieds-toi.

Je ne sais pas pourquoi, mais soudain, je me sens comme un mouton prêt à être dévoré par le grand méchant loup.

— Je...

Je fouille dans mon sac afin de sortir le livre.

— Je ne peux pas rester. Je suis juste venue vous donner le livre.

— Assieds-toi, gronde-t-il.

Je relève subitement la tête vers lui. Ses mots ont été prononcés d'une voix si rauque que j'en ai des sueurs froides. Inexplicablement, mes jambes se mettent à trembler. Mes mains aussi.

Je m'approche du bureau, à contrecœur, et y dépose le livre. Tout en évitant soigneusement de le regarder.

Je m'apprête à retirer ma main lorsque ses doigts s'enroulent autour de mon poignet. Là, je relève la tête vers lui malgré moi, et croise son regard sombre. Ses iris de la couleur d'un océan si pur ont maintenant laissé place à une mer houleuse, prête à avaler tous les navires assez courageux pour braver ces eaux...

Je me sens flancher. Je pose mon autre main sur le bureau dans une tentative de stabilisation.

— J'ai dit assieds-toi. Ne me fais pas me répéter encore une fois.

Sa prise me fait légèrement mal. Pourtant (et cela semble devenir une habitude à chacune de nos rencontres), un tas de pensées pas très catholiques me passent par la tête. J'aime sa prise autant que je la déteste. Et à nouveau, il m'effraie autant qu'il m'attire.

Il me relâche doucement sans me lâcher du regard.

— Il faut qu'on parle.

De quoi est-ce qu'il veut discuter ? Je prends de profondes respirations et tente de garder une voix qui ne vacille pas.

— Ah bon ?

Je parviens à garder une petite consistance.

— Ouais, alors assieds-toi sur le siège avant que je ne t'y attache.

Malgré moi, et pour une raison que j'ignore, je lui obéis et m'assieds, toute tremblante.

— Merci, soupire-t-il d'une voix plus douce, mais toute aussi grave.

— De quoi devons-nous parler ? l'interrogé-je timidement.

Il me détaille d'un air sérieux. Je me demande à quoi il joue et surtout ce qu'il me veut...

Sombre vengeance [terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant