Chapitre 2 part 3

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Aithne

- C'est une plaisanterie, s'écria Adam Leroy, membre de l'équipe Fallon.

Un rictus se forma sur le visage cerné du supérieur et je dus me retenir pour ne pas l'encastrer pour de bon.

- Aies-je l'air d'apprécier faire des blagues, dit-il le regard perçant.

- Et en quel honneur ? commença Ronia. Jusqu'à preuve du contraire cette forêt pour une raison que l'on ignore empêchait aux monstres du pays neutre d'attaquer en masse les populations. Maintenant qu'elle est détruite-

- Je me passerais de vos recommandations après votre prestation pathétique des derniers jours, cracha t-il moqueur.

- Et moi que vous osiez vous exprimez avec arrogance alors que vous étiez assis sur votre chaise à contempler l'accident, renchérit Silas ennuyé.

Pourtant, le vieil homme ne relevait pas. Lui d'habitude si susceptible et fier... Il arborait une sérénité nouvelle. Pourquoi ne criait- t-il pas cette fois ? Bien que cela restait jouissif de le recadrer pour le voir sortir de ces gonds, son impulsivité n'était qu'une preuve de plus de sa soumission ; mais surtout la trace d'une peur irrationnelle qui ne cessait de s'accroître.

Sa soudaine assurance ne présageait rien de bon. D'autant plus que cette mission arrivait comme un cheveu dans la soupe.

Je scrutais les traits du général ; un sourire figé, des pupilles agitées... Son excitation était bien trop grande pour une ambassade d'à peine quelques jours. Cependant, l'interroger serait une perte de temps. Ce type était une vraie tombe et malgré ces airs d'homme sénile ; il ne se trahissait jamais.

Il s'éclaircit la gorge.

- Je disais donc rendez-vous dans cinq jours à quatre heures du matin au port huit, n'en déplaise à certains.

Sur ces mots, notre chère énergumène national partit claquant bien entendu fermement la porte. La mauvaise humeur ambiante s'amplifia davantage. Ce voyage soudain ne ravissait personne sans grande surprise, moi y compris, toute mon attention se portait vers l'incident de la forêt.

- Aithne ! m'appela Kaël.

Je revins brusquement à la réalité pour constater que j'étais la seule encore assise. Tous mes coéquipiers m'attendaient déjà dans le couloir. Je me relevais de mon fauteuil à la hâte pour me faufiler à leur côté.

Il faisait déjà nuit lorsque nous quittions enfin le quartier général. La première partie du chemin se fit dans un silence de plomb. Les Fallon nous suivait de près et l'ambiance ne semblait guère meilleure dans leur équipe. Je tentais de donner le change en conservant le buste et les épaules droites. Malgré tout, mon visage fermé ne trompait personne.

J'observais distraitement le paysage, nous avions dépassé le village depuis quelques minutes déjà. Nous parcourions les plaines bleutées marquées d'un reflet blanc par la lune qui semblait étrangement proche. Le vent soufflait doucement, mouvant quelques mèches rousses rebelles extérieures à ma couette.  Lorsqu'un drôle de personnage muni d'une capuche noire m'administra un coup d'épaule.

Je fis volte-face agacée, il me jaugeait et semblait vouloir me parler. Il se ravisa pourtant et tenta de fuir sans un regard en arrière. J'attrapai au vol un bout de sa tunique et le tirais de force pour qu'il me regarde. Je reconnus alors le même militaire mal élevé d'il y a quelques heures. Je le relâchais brusquement.

- Encore toi ! m'écriais-je. Tu commences à sérieusement-

Malgré le nuage d'ombre formé par la capuche au niveau de sa tête, je distinguais des larmes sur ses joues pâles légèrement rougies par la fraîcheur. A bien le regarder, il possédait la musculature d'un jeune adulte pourtant son visage très juvénile et sa taille trahissait un âge prématuré.

Masters : l'éveil des dominantsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant