Prologue

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— Vite ! Attrapez-la ! Dépêchez-vous ! Attrapez cette grosse baleine ! Bougez-vous le cul ou on va la louper ! La grosse va nous filer entre les doigts ! Faut pas la laisser filer ! On doit lui faire comprendre ce quoi la vie ! Choppez-la, la grosse mémère !

Cynara accéléra le pas, cavalant le plus vite qu'elle put, tout ce dont elle fut capable pour une non-sportive malgré son surpoids. Elle parvenait à éviter de justesse la plupart des gens qui se postaient devant elle ou qui faisaient irruption devant ses yeux. Cependant, bien qu'elle fasse preuve de précaution, la jeune fille percuta quelques personnes qui entravaient son chemin et qui ne semblaient pas vouloir bouger et pour lesquelles, elle ne pouvait faire autrement que de les frôler, parfois un peu violemment certes. Toutefois, elle prenait soin d'envoyer quelques excuses dans l'air, mais elle ne s'arrêta pas de courir pour autant ; elle les savait à ses trousses.

Les hommes et les femmes percutés ne se faisaient pas prier pour lui lancer des regards noirs, des insultes ou des cailloux pour celles et ceux qui avaient eu le temps de les ramasser et de les lui lancer à l'arrière de son crâne. Malheureusement, la jeune femme ne pouvait pas faire autrement que de jouer des coudes pour les écarter de sa route ; les rues étaient bondées à cette heure de fin d'après-midi, 17 h 30. C'était le moment de la journée où les employés quittaient leur travail avant d'arpenter les rues de Saint-Pétersbourg pour effectuer leur shopping ou leurs courses. Les étudiants, quant à eux, sortaient de cours. Et puis, les larmes que Cynara versait lui brouillaient sa vue, alors elle ne voyait pas clairement les obstacles qui se présentaient à elle.

La jeune femme avait une idée en tête bien précise, un plan qu'elle avait minutieusement préparé depuis la première heure du matin, dès lors qu'elle avait pris place en salle de cours de chimie, avec l'odieux monsieur Yégor Babkine, le professeur des sciences physique et chimie des lycéens des dernières années au lycée Lomonossov. Elle comptait se rendre au parc municipal avec l'espoir d'échapper à ses agresseurs en se cachant parmi la foule, plus étendue et nombreuse que celle de la rue. Une fête foraine y avait lieu et les gens devaient commencer à y arriver en masse. Malgré le ciel noir, les nuages gris et l'air frais qui se levait en cette fin de mois de novembre, les animations foraines n'étaient pas terminées. Cynara entendait la voix des forains s'élever grâce aux micros lui parvenir et le bruit des moteurs et des manèges en fonctionnement, ainsi que les cris de joie des enfants. Eux, ils s'amusaient certainement beaucoup, ce qui n'était pas son cas. Ce qui n'avait jamais été son cas.

Vite ! Elle devait courir plus vite, presser le pas ! Plus vite ! Enfin, Cynara aperçut au loin les barrières blanches de l'entrée du parc ! Elle n'était plus qu'à quelques mètres ! Encore un peu d'effort et elle pourra trouver une cachette où se réfugier, le temps que ses poursuivants se lassent d'être à sa recherche et décident de retourner vaquer à leurs occupations qui ne soient pas celles de lui mettre la main dessus dans le but de la violenter.

La jeune fille se jeta littéralement sur les barrières humides de l'entrée du parc qu'elle poussa de toutes ses forces sous les regards interrogatifs des personnages âgées concernant sa santé mentale, ainsi que ceux, ahuris des mères de famille, qui veillaient sur leurs progénitures.

Maintenant que Cynara était parvenue à l'intérieur de l'espace public, entourée de touristes, d'hommes et de femmes, de mères, de pères de famille et d'enfants, elle s'autorisa, durant de rapides secondes, à penser qu'elle se trouvait en sécurité ; elle jeta rapidement un coup d'œil par-dessus son épaule. Hélas ! Non ! Ses agresseurs, au nombre de cinq au total, du moins, pour ceux qui s'étaient mis à la pourchasser, étaient encore à ses trousses. Ils ne comptaient pas lâcher l'affaire si facilement ! Ils avaient besoin de se défouler ; c'était presque vital pour eux. Ils ressentaient le besoin d'évacuer leurs mauvaises tensions en lui faisant du mal. Ils ne se sentaient bien et pleinement satisfaits qu'après lui avoir lacéré la peau, après l'avoir insultée, giflée, frappée et qu'ils lui aient craché au visage. Bref, ses agresseurs se sentaient revivre une fois qu'ils l'avaient fait saigner.

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