Chapitre 09

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Il était 07 h 00 quand la sonnerie tonitruante du réveil de Cynara l'extirpa de son sommeil sans rêve. Elle s'est endormie tard à cause de ses charmants voisins qui ont passé plus de quatre heures à se livrer une bataille verbale et physique des plus acharnées. Sur les coups d'une heure du matin, la femme a claqué la porte de son domicile pour se rendre chez sa mère, laissant son odieux mari boire outre mesure et jurer comme un charretier une heure encore. Il n'a cessé de vociférer et d'envoyer toute une série d'objets valser contre le mur derrière lequel le lit de la jeune fille était placé.

Cynara n'en pouvait plus. Elle ne pouvait plus voir ce couple, même en peinture ou plutôt, la jeune fille ne supportait plus ses voisins bruyants qui ne semblaient ennuyer nul autre qu'elle. C'était à se demander si les habitants du dessus ne se droguaient pas ou ne plongeaient pas dans l'alcool pour ne pas avoir à entendre leurs scènes de ménage pitoyables, ou s'ils s'engueulaient eux aussi. Pourtant, à la connaissance de Cynara, il n'y avait pas de couple âgé, hormis celui qui partageait le même palier qu'elle.

Cynara souffla longuement, fatiguée par sa courte nuit et sortit du lit. Elle n'avait aucune envie de se lever... Elle se résigna après de longues minutes à convaincre sa motivation de la faire se lever, puis elle s'étira de tout son long et lorsqu'elle fut debout, Cynara ouvrit les rideaux. Ils ne lui servaient pas vraiment à dissimuler les éclairages nocturnes ou le levé du jour, car le tissu était fin et de très mauvaise qualité, mais ils avaient le mérite de camoufler son intimité du vieux garçon qui vivait en face de chez elle et dont sa chambre donnait sur la sienne. Plusieurs fois, Cynara avait surpris ce voisin en train de l'épier avec une paire de jumelles.

Le temps était gris, maussade et une légère bise se levait avant de laisser place à un vent plus fort et plus frais, mais il ne pleuvait pas. Du moins, pas encore. Toutefois, il persistait sur le bitume humide les vestiges de l'orage de cette nuit. De feuilles mortes et des branches cassées étaient éparpillées sur le trottoir et sur la route. L'hiver s'installait progressivement.

La jeune fille passa dans la ridicule salle d'eau qui lui servait de salle de bains, puis tressa ses cheveux auburn avant de les enrouler autour d'eux pour les nouer en un chignon élégant sur le bas de sa nuque. Elle revêtit ensuite son uniforme scolaire composé d'une jupe blanche plissée, d'une chemise blanche à manches longues, d'un gilet en laine gris clair et enfila une paire de collants épais. Cynara plaça ensuite sa trousse de soins dans son sac de cours en bandoulière avant de passer au coin cuisine. Elle avala une gorgée de jus de fruits bon marché imbuvable, ainsi qu'une viennoiserie qui commençait à être moisie. La jeune fille enfila sa veste et sortit de son petit logement, puis elle prit soin de fermer la porte de son studio à clé. Elle tendit brièvement l'oreille pour entendre son voisin ; il ronflait. Cynara secoua la tête et descendit dans le hall pour se rendre à sa boîte aux lettres qu'elle ouvrit avec difficulté. Elle n'avait pas relevé le courrier de la veille. Vide. Néanmoins, elle gardait l'espoir d'y voir une lettre de son père. Elle espérait de tout son cœur que ce dernier revienne sur sa position, à savoir la réintégrer au sein du clan familial et de l'accueillir à nouveau chez eux.

Au moment d'ouvrir la porte cochère qui donnait sur la rue, la voisine refit son apparition. Elle avait l'œil droit poché et violacé, la pommette gauche ouverte recouverte de bandes strip et n'adressa aucun regard à Cynara qui lui tenait poliment la porte. Ni même un merci. L'épouse ne valait pas mieux que le mari.

La jeune fille se rendit dehors et plaça ses mains dans les poches de sa jupe et marcha jusqu'à son lycée. Elle n'avait pas assez d'argent pour s'offrir un abonnement de bus. Bien malgré elle, son estomac se mit à gargouiller. Elle avait faim et son appétit augmenta quand elle passa devant une boulangerie où une odeur de pain qui était en train de cuire s'échappait. Elle s'autorisa à s'arrêter un instant pour respirer les bons effluves à pleins poumons, puis elle se remit en marche, davantage affamée.

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