Chapitre 04

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Son-Shay arriva enfin chez lui sur les coups de 18 h 30, après qu'il ait eu des difficultés à trouver un automobiliste particulier susceptible de le prendre en stop et qui passait non loin de sa demeure. En outre d'avoir été agressé et à deux doigts de passer de vie à trépas, le jeune homme s'était fait voler les quelques billets qu'il avait négligemment laissés dans la poche de son pantalon, au lieu de les ranger dans son portefeuille, comme lui suggérait régulièrement son aîné. Heureusement que ses agresseurs n'avaient pas mis la main sur ses papiers d'identité, ni sur son trousseau de clés ! Cela aurait déclenché la colère du premier-né de la fratrie et ce dernier se mettait souvent en colère contre lui. Pour un rien d'ailleurs. Il était tellement impulsif et soupe au lait qu'il en devenait imbuvable par moments, voire carrément insupportable et Son-Shay en faisait les frais.

Le jeune homme poussa la grille argentée du portail d'entrée de l'immense domaine qu'il partageait avec ses neuf frères. Il s'agissait d'une grande maison d'architecte de 700 m² bâtie sur deux étages et érigée sur un terrain situé à une quinzaine de minutes en voiture en dehors de Saint-Pétersbourg. Le petit groupe d'hommes aimait garder leur intimité et puis, ils passaient assez de temps en ville pour vouloir décompresser en dehors de celle-ci.

La notoriété des frères Rykov, dans la continuité de celle de leur père, était telle qu'ils ne pouvaient pas se déplacer en ville sans qu'un fanatique, une jeune fille, une mère de famille ou un journaliste ne leur tombent dessus pour prendre une photo avec eux, leur poser quelques questions, demander un autographe ou proposer une nuit d'amour ou le mariage. Les frères Rykov étaient réputés comme faisant partie des personnalités les plus fortunées de la ville, voire du pays, mais également comme étant les plus jeunes et les plus beaux des entrepreneurs russes. Surtout, il se disait qu'ils étaient tous célibataires Il n'était donc pas rare de voir une jeune fille tenter sa chance avec l'un des frangins.

Un an, jour pour jour, après le décès de leur père voilà quatre ans, les neuf garçons ont hérité de la magnifique demeure familiale et de tous les biens de leur paternel, ainsi que de son entreprise à raison de 11 % des parts pour chacun d'eux. L'aîné de la fratrie, Akano, âgé de 28 ans, a été désigné par les membres du conseil d'administration pour reprendre le poste de P.D.G. d'A.S.C.O. occupé par leur père durant plus de quarante ans. Le père avait scrupuleusement veillé à ce que son premier-né reprenne l'affaire après son départ. Chacun des huit autres frères s'est vu octroyer un poste, avec des tâches et des missions au sein de l'entreprise, hormis pour le petit dernier, Son-Shay, qui n'avait que 19 ans. Tous s'affairaient au travail afin de ne pas déshonorer le nom de famille illustre des Rykov, ni d'entacher la mémoire de leur défunt parent.

Son-Shay affichait sa mine contrariée des mauvais jours, une moue boudeuse, tout en mettant des coups de pied dans les petits cailloux qui composaient l'allée centrale, cernée par des lampions qui éclairait l'allée dès la tombée de la nuit et qui menait à l'entrée de la somptueuse demeure au fur et à mesure qu'il avançait, les petites talonnettes de ses bottines claquant le sol.

— Alors ? C'est fait ? demanda une voix grave derrière lui.

Son-Shay, les mains dans les poches, se retourna et avisa son frère Phei venir à sa rencontre. Le jeune homme sortait du kiosque de sécurité à l'entrée. Il guettait l'arrivée de son cadet pour lui sauter dessus, comme s'il ne pouvait pas attendre que ce dernier franchisse la porte d'entrée pour le questionner sur ses activités de la journée.

Phei était le deuxième enfant issu du couple Rykov, Lev et Angela. Âgé de 27 ans, il occupait le second poste le plus important au sein de la société A.S.C.O. En tant que responsable des ressources humaines, il était chargé, entre autres, du recrutement du personnel et des stagiaires, des promotions et des licenciements. Il était, par conséquent, à la fois craint, à la fois adulé par les employés.

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