Parade Nuptiale [Romance fantastique - Terminée]

Chapitre 27

Il m'a fallu plusieurs semaines pour me remettre de ma blessure à la jambe, ainsi que de tous les autres hématomes et plaies. Je garderai une cicatrice au niveau de la gorge, mais c'est assez discret et je le masque avec mes cheveux la plupart du temps. Mais la douleur physique n'est rien en comparaison du trou béant à la place de mon cœur depuis que Craig est parti de la chambre d'hôpital. Entre les séances de rééducation et les longues soirées de solitude, j'ai eu tout le loisir de me rendre compte qu'il me manquait beaucoup.

Mes géniteurs sont sortis du pays, sans vague visiblement, ils ont dû prendre les menaces de Craig au sérieux. Il y a quelques jours, j'ai reçu des papiers m'indiquant que le logement m'appartenait désormais et que mes frais de scolarité pour l'ensemble de mon école vétérinaire avaient été réglés par mes parents. J'ai été surprise, mais une lettre expliquait qu'ils avaient vendu leur manoir, et avec l'argent, ils avaient remboursé Craig pour l'appartement, avaient financé mes études et... je souris à cette nouvelle. Ils ont payé une cure de désintoxication à Sélène qui a pu quitter l'affreux immeuble de Mira. Avec le fric restant, ils lui ont acheté une petite maison dans un village à la campagne, loin de l'influence de vampires malintentionnés. Il est écrit que Sélène me contactera à sa sortie dans quelques mois. J'étais si soulagée que j'en ai pleuré de joie. Tout s'était réglé grâce à Craig.

J'ai respecté son silence, mais, je ne peux pas, alors que je suis à quelques jours de l'entrée en première année de cursus vétérinaire, faire comme s'il ne m'avait pas aidé. J'ai pris la décision de revêtir une robe, des ballerines assorties pour me rendre au laboratoire. Je n'ai plus de béquilles et marche à peu près sans tomber.

Sur le chemin, j'ai acheté un bouquet de fleurs et j'ai ajouté une étiquette avec simplement noté : Merci pour tout. C'est assez banal, mais je me suis déjà bien épanché sur mes sentiments pour Craig, je ne veux pas le mettre mal à l'aise. Il sait ce que je ressens et je vais le laisser continuer sa vie sans moi, malgré ma souffrance face à cette idée. Je dois devenir une adulte responsable et assumer mes choix.

En arrivant devant le bâtiment principal du laboratoire, je marque un temps d'arrêt. Mon traitre de cœur bat la chamade à l'idée de retrouver Craig et je me dis que je ne supporterai pas de me faire rejeter à nouveau. Je prends mon courage à deux mains et entre dans le hall d'accueil. Au passage, je salue l'agent de sécurité et vais vers l'étage où se trouve le bureau de Craig.

Quand j'arrive dans le couloir, je vois qu'un laboratoire n'est pas fermé. À travers la vitre, j'aperçois la porte de la zone restreinte entrouverte. Mince, ça doit être un oubli, je m'y dirige pour y remédier, une sorte de réflexe. Au moment où je pose la main sur la poignée, je suis projetée à terre, une ombre qui sent très mauvais me pousse, avec un hurlement strident. J'essaie d'éviter de me prendre des coups de griffes, ses ongles sont très longs. Dans un élan, je donne un coup de pied qui envoie valser mon agresseur au sol. Je me recule, me plaque contre le mur. La personne se lève avec difficulté, l'œil hagard, elle a l'air très malade. Les cheveux gris sont sales, il y a en peu. Le visage est blême, abimé, c'est une femme et elle me montre les dents, dont plusieurs sont manquantes. Cela ressemble à un zombie, les monstres imaginaires trouvés beaucoup dans les films d'horreur.

— Rose, ne bouge pas ! crie Craig qui entre dans la pièce en courant, suivi par des laborantins.

— Qui est-ce ? demandé-je en le regardant, tétanisée par la peur.

Il me dévisage avec peine avant de dire :

— C'est ma mère...

— Pardon ?

Je ne comprends rien, je croyais que c'était une humaine et qu'elle était décédée. Les rouages de mon cerveau se mettent en place, je me souviens de l'histoire concernant l'expérimentation qui avait raté et des organismes génétiquement modifiés avaient attaqué des individus. A-t-elle été contaminée ?

— Attention !

Un cri interrompt mes pensées et je tourne la tête vers la maman de Craig qui cherche à se jeter sur moi, mais elle est arrêtée en pleine course, une balle traverse son corps au niveau du cœur et elle s'effondre, me laissant voir Craig, qui tient une arme et me regarde avec les larmes aux yeux. Il va vers elle, pendant que les autres personnes présentes passent la porte de la zone sécurisée. Moi, je ne sais comment réagir, Craig caresse les cheveux de sa mère, assis par terre, les épaules basses.

Face à sa détresse, je m'avance, fébrile. Il y a peu de sang qui a giclé, mais j'évite de marcher dans les gouttes. Je m'accroupis à hauteur de Craig et pose une main qui se veut gentille sur son dos. Je murmure :

— Craig... Je suis désolée.

Alors que je pense qu'il va m'envoyer sur les roses, il n'en fait rien et dit :

— J'aurais dû mettre fin à sa vie il y a longtemps, mais je n'y arrivais pas. Depuis toutes ces années, j'essaie de trouver un remède à cette maladie, mais sans résultat. Tout est de ma faute, tu as failli être blessée et ma mère est morte de manière brutale, j'aurais pu éviter tout ça.

— Tu l'aimais Craig, je comprends pourquoi tu as agi comme tu l'as fait.

Je presse son épaule, il se redresse et me fixe, ses beaux yeux embués de larmes. Sa détresse me bouleverse. Dans un élan spontané, je l'enlace et il pose sa tête contre mon cou. Il glisse ses bras autour de moi et me serre contre lui.

— Je suis désolé Rose, j'ai été en dessous de tout. Tu m'as ouvert ton cœur et j'ai fui comme un lâche. Je suis loin d'avoir eu une attitude irréprochable moi aussi.

Il s'écarte et jette un coup d'œil vers sa pauvre maman, étendue sur le dos, les yeux fermés.

— Ce n'est peut-être pas le moment de parler de tout ça. Je vais appeler quelqu'un qui va te conduire chez toi. Il faut que j'enterre ma mère, que je comprenne comment elle a pu sortir de la zone de sécurité et puis, quand tout sera terminé, je viendrai te trouver.

Je ne peux qu'acquiescer, je voudrais être avec lui dans ce moment important pour lui, mais j'ai l'impression qu'il a besoin d'être seul pour régler cette partie de sa vie, à laquelle je n'appartiens pas. Il sera alors temps de penser au futur.