Pyrrhos

La cohabitation de deux étincelles

Chapitre 7

La cohabitation de deux étincelles

[ΜΕΛΙΟΝΕ]

C'est... étrange.

Je ne m'attendais pas à un truc pareil, c'est tellement domestique et confortable, ça me parait trop beau pour être vrai. Ça fait à peine un jour et c'est comme-ci ça faisait des années, nos habitudes se heurtent parfaitement comme deux faces d'une même pièce. Toute cette hospitalité, me donne envie d'être à la hauteur mais Atë rend la tâche compliquée.

- Déesse, tu peux débarrasser la table ? Je m'occupe de la vaisselle.

Je veux protester, lui dire que je peux m'occuper des tâches ménagères parce que c'est la moindre des choses puisqu'elle n'a pas hésité à m'héberger mais la tentatrice est déjà dans la cuisine. Je me résigne donc à juste débarrasser les assiettes et les couverts, ce qui est plutôt rapide puisque l'on est que deux puis nettoyer la table. Mais mes tâches me paraissent trop peu à mes yeux, j'aurai voulu ranger un peu le salon mais Atë est aussi maniaque que je suis bordélique. Les apparences sont trompeuses, pour une fille qui aime sortir en boite et qui boit, Atë n'est pas excessive, son appart est simple et bien rangé, sa bibliothèque est pleine de littérature classique et son chat est génial ! Tout me parait trop simple et ça me fait peur, parce que je me méfie. J'ai soudainement peur qu'elle soit comme lui.

Plongée dans mes craintes internes, je n'entends pas Atë s'approcher, je sursaute quand je sens ses longs doigts froids se glisser sous mon t-shirt. À ma grande honte, j'ai lâché un cri si aigu qu'on aurait dit une souris et la tentatrice a explosé de rire, je sens que mes joues sont chaudes et mes oreilles aussi.

- C'est... c'est vraiment pas drôle Atë ! J'ai eu peur ! T'imagine si j'avais une crise cardiaque ?!

Je vois bien qu'elle a du mal à reprendre son souffle, suis-je hilarante à ce point ? Je n'ai jamais été une fille d'humour, j'ai toujours laissé ce domaine à mes amis masculins car à chaque fois que je l'ouvrais pour faire une blague et bien... c'est comme si j'avais débranché les platines d'un dj en pleine soirée, je créais des blancs plus que gênants. J'ai appris à me taire pour éviter d'être le centre de l'attention, je ne suis pas drôle alors je me la boucle.

- Désolé Melione mais ce cri !! C'est beaucoup trop mignon !

Mignon ? Moi je suis mignonne ? La tentatrice doit mentir, c'est une démone pourquoi dirait-elle la vérité ? Je suis toujours habillée en noir, je ne suis pas à l'aise avec les gens et la foule, je suis bordélique autant avec mes affaires qu'avec mes pensées, je ne suis pas aimable et puis... je ne suis pas jolie. J'ai comme un frisson, j'ai l'impression qu'il est là, juste derrière moi, j'ai l'impression de sentir son souffle dans ma nuque, ses doigts qui serpentent sur mes hanches. Je me sens sale, cette présence me dégoute, j'ai envie de vomir.

Mon estomac vrille, je ne réfléchis pas et cours vers la salle de bain.

J'entends au loin des pas qui se dirigent vers moi puis une main se pose doucement sur mon dos avant de dessiner des cercles autour de ma colonne vertébrale. Mes cheveux sont retenus derrière mon dos mais ce geste est vain, je vais devoir me relaver les cheveux, certaines mèches ont été malchanceuses.

Quand mon estomac s'arrête enfin, ma bouche est encore pleine de bile, il me faut un dernier crachat pour l'évacuer puis je trouve la force de lever la tête vers elle. Atë est à genoux, à mes côtés une main dans mon dos et l'autre tient un gobelet et une brosse à dent déjà recouverte de dentifrice. Je prends la brosse et le verre en plastique et commence à me brosser les dents au-dessus de la cuvette, je n'ai pas la force de lui dire merci pour l'instant, j'ai juste envie de faire disparaître ce goût affreux qui persiste sur ma langue.