Avoir le courage de franchir la ligne rouge

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Chapitre 13

Avoir le courage de franchir la ligne rouge

[ΜΕΛΙΟΝΕ]


Atë n'est pas là, il n'y a plus que moi et son chat.

Je n'ai pas dormi de la nuit, l'image de son dos tatoué est figée dans mon esprit. Le tatouage est une pratique interdite depuis toujours car il est parfois difficile de reconnaitre une marque véritable d'un simple dessin à l'encre gravé dans la peau. Alors, la carte sur son bras ? Le chariot, c'est un tatouage aussi ? Combien de dessins constellent son corps au juste ? Est-ce que c'est ça son secret ? Non, non, ce n'est qu'une partie de la réponse. Qu'est-ce que je croyais au juste ? Ce n'est pas en un mois de cohabitation que j'allais la connaître dans ses moindres secrets, je ne l'ai jamais vue en short ou avec un t-shirt court. Je me sentais bien avec elle, elle m'a mentit.

J'ai décidé de faire un tour, rester m'aurait rendu malade, une dernière caresse au chat, je prends mon manteau, mes chaussures, mon portable et la clé de rechange qu'Atë m'a confiée puis je ferme la porte derrière moi. Je marche, je marche sans savoir où mes pas me mènent, Mes pensées restent focalisées sur elle, elle et tout ce qu'elle m'a apporté, mensonge. Mensonge mais ses yeux avaient l'air détruits. Mes yeux me piquent, pourquoi pleurer pour elle ?

Mes jambes ne veulent plus avancer, autour de moi il n'y a que des rues vides et un arrêt de bus, je ne suis pas loin du centre-ville, un peu de marche et j'y arriverai. Ai-je la force de continuer ? Je ne sais pas si j'ai envie de découvrir son secret, ce truc qui fait qu'Atë est Atë. Je me frotte un peu les yeux pour faire partir les rares larmes qui ont dépassé, l'air froid inonde mes poumons. Je n'ai pas encore de décision certaine mais, je n'ai rien à perdre et puis, Atë m'a toujours aidé jusque-là, elle mérite que j'écoute ce qu'elle a à me dire. Je continue mon chemin, les longs immeubles m'ouvrent la voie, le temps est gris, triste comme mon humeur.

Le béton laisse place aux pavés, aux bancs mouillés et aux plantes en pots, les devantures des magasins sont verrouillées et personne ne déambule dans les rues à part quelques sans-abri. Il y a des beaux bâtiments à voir ici, ils sont immenses et raffinés inspirés de l'architecture haussmannienne avec leur toit en ardoise et leur murs blanc. Il y a une ex église/ ex prison aujourd'hui centre commerciale chic, un ancien bureau de télégraphe devenu restaurant, c'est beau mais ma fascination c'est éteinte en même temps que le sourire de Atë s'est brisé.

Tout est gris et sans âme, il n'y a plus de couleur, c'est encore plus horrible qu'avant, pas pleurer, pas pleurer, pas pleurer, pas pleurer, pleurer. Elles coulent ces traitresses, je n'arrive pas à les retenir, pourquoi elles montent, pourquoi elles me piquent les yeux, pourquoi elles coulent ? Merde ! Pourquoi ?! J'en ai marre d'être fragile, j'en ai marre de pleurer, j'en ai marre, j'en ai marre, j'en ai marre ! Pourquoi mes jambes tremblent ? Pourquoi ma poitrine se serre comme ça ? C'était tellement plus facile avec lui, je n'avais pas à me soucier de ce genres de choses, c'est mon âme-sœur après tout.

Avec Atë, les choses sont compliquées, elles sont dures à interpréter, l'attention doit-être constante. C'était plus facile avant, avant c'était terriblement plus simple, on n'a pas besoin de se soucier de ça, on est des âme-sœur, des moitiés enfin, jusqu'à ce que je le quitte. Pourquoi je l'ai quitté ? Il ne m'a pas autant blessé qu'Atë ? Un pas puis un deuxième et encore un autre jusqu'à ce que j'arrive à un banc à peu près sec, je m'y affale avec toute la grâce que je n'ai pas. Je suis seule, je n'ai plus rien et ma vision devient floue, les larmes sont plus grosses encore.

Faible, faible Melione, même pas capable de s'en sortir seule. Pourquoi je suis comme ça, pourquoi j'ai mal, on n'est pas censé avoir mal, on nous l'a tellement répété, j'en peux plus.

PyrrhosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant