La plus atypique de toutes les âmes-sœurs

70 10 0
                                    

Chapitre 15

La plus atypique de toutes les âmes-sœurs

[ΜΕΛΙΟΝΕ]


- Atë, Atë, Atë, Atë !

Mon poing tambourine contre le bois mais aucune réponse, le moindre bruit est étouffé par le boucan que je crée. Mais il faut que je la vois, il faut que je fasse face à Atë, j'ai besoin de comprendre pourquoi.

- S'il te plait Atë ! Je sais que tu es là, pourquoi tu m'as menti ? Qu'est-ce que tu caches au juste ? Atë, t'es la seule capable de me donner les réponses que je cherche !

Rien, absolument rien. J'ai tellement besoin de ces réponses, juste des réponses ce n'est pas si compliqué, je veux des réponses. Atë, qu'est-ce que tu me caches ? Mon poing retombe puis se relâche, mon front rencontre la porte dans un bruit sourd et mes jambes perdent petit à petit leurs forces, mes genoux rencontrent le sol. J'ai besoin de te voir.

Est-ce que ce sont des minutes ou des heures qui passent ? Je n'en ai absolument aucune idée, le temps est infini et infiniment inatteignable. Le silence règne dans l'appartement, même le chat ne fait aucun bruit. C'est trop calme et c'est effrayant, le silence c'est la plus horrible des réponses, elle veut tout et rien dire à la fois. J'ai toujours aimé le calme mais ce silence, je le déteste. Ce qu'Atë m'impose, c'est une punition. Atë, réponds-moi.

Je sais que j'ai l'air pathétique à être là, recroquevillée devant sa porte mais quelque chose m'empêche de m'éloigner. Mes yeux sont lourds, je ne veux pas dormir, pas maintenant mais mes yeux se ferment. Ils allaient se fermer jusqu'à ce que des bruits sourds résonnent contre mon oreille. J'ai du mal à croire ce que j'entends jusqu'à ce qu'un bruit de clé résonne puis des pas qui semblent s'éloigner à nouveau. C'est bien ce que je crois ? C'est compliqué de se remettre debout, mes jambes tremblent, je me tiens à la porte pour ne pas tomber. Mes doigts s'enroulent autour de la poignée de la porte, j'hésite, mais j'ai fait mon choix, je dois l'assumer jusqu'au bout. Une petite pression et la porte s'entrouvre.

J'ose ouvrir un peu plus, juste assez pour entrer. Quand mon pied se pose sur le parquet, une vague de froid m'enlace, il y a le lit et de l'autre côté, il y a Atë contre la rambarde métallique de son mini balcon, sa fenêtre grande ouverte. Elle est dos à moi, évidemment, mais également en sous-vêtements. Il y a plus de lumière que le premier soir, c'est plus facile de les distinguer maintenant, ses tatouages. Elle a une tête de lion sur le dos avec une silhouette féminine, à l'arrière de son bras droit il y a un poisson prit dans une cascade dans un style traditionnel japonais, sur son bras gauche, je distingue des chiffres et sur ses jambes de nombreux dessins dans des styles divers et variés. Pourquoi autant d'encre ? Sa marque devrait à elle seule être suffisante. Je ferme la porte derrière moi puis me dirige vers elle, à chaque pas, mes jambes deviennent plus lourdes, plus molles comme si mon corps refusait de s'approcher d'elle pourtant, mon cœur veut être proche. Je ne suis qu'à quelques centimètres d'elle, il suffirait que je lève un peu la main pour l'effleurer mais je ne le fais pas.

A la place, je me mets à ses côtés, mes bras se posent sur le rebord gelé, je reste silencieuse, prête à l'écouter. Pas un regard, pas un mouvement, pas une parole, rien n'est échangé, juste le silence pesant de l'attente. Elle fume, un tourbillon grisâtre s'échappe de ses lèvres et se mêle au ciel gris et nuageux de ce jour d'hiver. Quand sa cigarette se termine, elle écrase le mégot dans le cendrier puis récupère un nouveau bâton de nicotine dans un paquet presque vide, elle l'allume et recommence son cycle d'inspiration et d'expiration. Ce manège peut durer encore très longtemps.

PyrrhosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant