Arthur pourrait mentir mais il sait que cela serait vain, il est tout de même face à un enquêteur. De plus, il n'a rien à se reprocher, il a le droit de parler à Delph, d'autant plus que cela ne concerne pas l'affaire de la Bête. Une civile lui a demandé de l'aide, il ne peut pas refuser de servir son prochain. Enfin, c'est surtout lui qui a insisté auprès de Delph, mais ça, il ne le dira pas à Bertrand.
— Tu étais avec cette influenceuse c'est ça ? Lui demande son commandant d'un ton sec et cassant.
Voilà, il n'a même pas besoin de parler que Bertrand sait déjà ce que faisait Arthur. Ils se fréquentent depuis plusieurs années, ils se connaissent donc l'un l'autre et Bertrand sait très bien qu'Arthur ne peut jamais résister à une demoiselle en détresse, tel le super-héros qu'il aspire à devenir.
Arthur secoue donc la tête de haut en bas en pinçant les lèvres et en baissant les yeux, comme pour s'excuser d'être si prévisible.
— Voilà, j'en étais sûr. Je te connais comme si je t'avais tricoté moi-même mon petit Arthur.
— Je suis désolé.
Arthur ne l'est pas vraiment, ce qui le désole c'est seulement de s'être fait attraper. Mais afin de ne pas se mettre à dos son supérieur il décide de se comporter comme il l'attend. De cette façon, cette conversation sera moins désagréable. Et cela fonctionne comme prévu car Bertrand détend chacun de ses muscles petit à petit et son visage retrouve une couleur normale.
— Allez suis-moi gamin, j'ai deux trois trucs à te révéler.
Des révélations ? Serait-il possible qu'en son absence, l'enquête sur la Bête ait avancé ? La police a-t-elle des indices qui pourraient permettre de connaître le tueur ? Car il est vrai que depuis la mort de Yaël et la libération de Delph, l'investigation est au point mort. La police scientifique n'a trouvé aucunes preuves matérielles, ni empreinte, ni goûte de sang inconnu, pas même un cheveu. Et la liste des suspects a fondu comme neige au soleil avec l'alibi de Léandre pour les premiers meurtres et celui de Delph pour le meurtre de Yaël. Non Arthur le sait, il n'y a aucun indice. C'est triste à dire, mais pour avoir une chance d'en découvrir il faudrait alors un nouveau meurtre. Donc quelles peuvent être ces révélations ?
Bertrand essaye d'attraper Arthur par les épaules pour le guider comme un enfant, mais il est trop petit pour y parvenir. Il se contente donc d'un mouvement de tête pour indiquer à son collègue, géant, de le suivre ce qu'exécute Arthur sans discuter. Il s'attend à être conduit dans une salle de réunion où bien même dans une petite salle d'interrogatoire qui serait alors recouverte de dossier en pagaille et de photos des scènes de crimes accrochées aux murs.
Mais il n'en est rien et Bertrand s'arrête au niveau de la machine à café et regarde Arthur comme s'il attendait quelque chose. Il comprend alors que son chef lui demande de lui payer le café. Il lui doit bien cela à cause de son retard. Mais est-ce un lieu approprié pour discuter d'avancées majeures dans une enquête criminelle ?
Arthur ne sait pas ce qu'il doit faire, il décide donc de se taire et d'attendre. Il regarde alors anxieux son supérieur boire plusieurs gorgées du café brûlant avant d'enfin ouvrir la bouche.
— Tu dois arrêter de fréquenter cette fille mon petit père.
— Qui donc ? Vous parlez de Delph ?
Bertrand hoche la tête de haut en bas comme unique réponse pendant qu'il continue de boire l'horrible café du commissariat. Mais cela ne suffit pas à Arthur.
— Pourquoi ? Pourquoi je ne peux pas la fréquenter ? Elle a été écartée de notre affaire, elle n'est plus officiellement suspecte pourquoi n'ai-je donc pas le droit ?
— Cela n'a rien à voir avec l'affaire. C'est juste que je t'aime bien gamin, je ne veux donc pas que tu t'amouraches d'une folle.
Quelle appellation violente pour parler d'une personne. Arthur sait très bien que Bertrand n'apprécie pas Delph, mais il reste surpris face à cette virulence. Il fronce donc les sourcils, tant par surprise mais aussi par colère qu'il puisse parler d'elle de cette façon.
— Pourquoi dites-vous cela ? Demande Arthur en s'efforçant de rester le plus calme possible.
Bertrand ne remarque pas le trouble d'Arthur et fini sa boisson avant de répondre.
— Il ne faut pas se fier aux apparences. Elle fait bien, avec ses jolis vêtements et son beau visage mais la réalité est toute autre. Elle vend du rêve sur internet, mais sa vie est un vrai cauchemar.
La colère d'Arthur disparaît petit à petit pour laisser place aux interrogations, il penche donc la tête sur le côté pour laisser Bertrand continuer ses explications. Mais avant, toujours pas pressé, il se sert à nouveau un café avec supplément de sucres.
— Elle a déjà été internée en hôpital psychiatrique.
— Internée ? Mais pourquoi ?
— Ça, je ne sais pas, ils nous emmerdent avec leur secret médical. Pourtant, quand des cinglés vivent à côté de nous, j'estime que l'on devrait en être informé car Dieu seul sait ce qu'il pourrait nous faire. Tu comprends donc mieux pourquoi je me méfie d'elle.
— Mais... Aller en hôpital psychiatrique ne signifie pas que l'on est dangereux. Beaucoup de personnes sont internées et sont inoffensives.
— Mais elle n'était pas dans un simple hôpital, mais dans un des plus équipés. Il fallait sûrement la surveiller de près, ce qui m'encourage à penser qu'elle est dangereuse. Donc arrête d'aller la voir. Pour ton bien. Et n'enquête pas sur son ami. Lui aussi est fou.
— Lui ? Mais son amie n'est pas une femme ?
— Non c'est un homme qui se prend pour une femme. Rodolphe Lucine tu connais ? C'est sûr tu en as déjà entendu parler, il se fait appeler Lou maintenant. Il n'a jamais été enfermé contrairement à son amie mais il n'en mérite pas moins. Ce monde part en vrille, c'est effrayant.
— Lou Lucine... Pourquoi ce nom me dit-il quelque chose ?
— Car il fait partie de l'association des, comment ils s'appellent déjà... Transgenres ? Tu sais ces emmerdeurs qui viennent se plaindre tout le temps parce que l'un des leurs a eu un petit bobo.
Et soudain, tout s'éclaire pour Arthur. C'est pour cela qu'il a reconnu la photo de Lou dans son appartement. Il ne se doutait pas que Delph et elle étaient amies, pourtant toutes les preuves étaient sous son nez, il s'en veut alors d'être passé à côté d'une telle information, le policier qu'il aspire à devenir ne peut pas laisser passer de telles évidences.
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Allumette
Mystère / ThrillerCommencez ce roman policier par la fin. Et voyons si cela vous aidera à démasquer le ou les coupables. « - Si gamin, tout le monde meurt, les enfants meurent, les adultes meurent, les vieillards meurent, tout le monde. - Pas les morts. - Comment ça...