Deadly hearts

20. Pavel

♪ Villain - Lucy Dye ♪

Quel merdier.

Quel putain de merdier.

Margot n'a pas pipé le moindre mot depuis le coup de feu. Je soupçonne qu'elle respire encore parce que, environ cinq minutes après la détonation, j'ai entendu un long frottement, comme si elle s'était laissée couler le long du mur. Depuis, j'attends comme un con que quelque chose se passe. Trois heures que je suis assis sur la table pour surveiller la porte, une bouteille de vodka à la main. Six mille battements de cœur pour chacune d'elles.

L'horloge affiche cinq heures du matin lorsqu'Oscar revient de sa mission d'éclaireur. Il est trempé de la tête aux pieds. C'est avec un air complètement détaché que je le regarde poser un sac sur le canapé et retirer sa parka.

— Je nous ai rapporté à manger.

— Pas de nouvelles de Mikhail ou Kiran ?

— D'après nos sentinelles, Mikhail est chez lui. On n'a rien sur Kiran. La nuit a été calme. Qu'est-ce que tu fais ici, hijo ?

Je renifle en fixant la porte.

— J'ai attrapé un animal sauvage.

— Va te faire foutre ! aboie l'animal en question.

Le regard d'Oscar passe de la porte à moi. Il secoue la tête de dépit.

— Mais qu'est-ce que t'as foutu, cabrón ?

Il se rapproche de la porte sans attendre ma réponse. Je me planque derrière ma bouteille tandis qu'il actionne la poignée et qu'il enclenche l'interrupteur de la chambre. Margot apparaît dans ma vision, les cheveux en bataille et des airs meurtriers. Elle me braque avec ses yeux revolvers et ses talons qu'elle tient dans les mains.

— Espèce de raclure ! rugit-elle en émergeant de la pièce.

Elle prend son élan pour me jeter un escarpin au visage. Il atterrit plus bas que l'endroit visé, sur le rebord de la table juste à droite de ma cuisse. Avec la force du coup, je ne serais pas surpris que sa colère ait laissé une marque indélébile sur le métal.

— Tu vas rester là sans rien dire ? s'exaspère-t-elle.

De nouveau, je renifle. Je bondis ensuite sur mes pieds pour me rapprocher d'elle.

— Qu'est-ce que tu veux entendre ?

Elle pousse un râle de frustration et lève les mains pour me frapper, mais Oscar s'interpose.

— OK, niños, et si on essayait de discuter ?

— Plus jamais je ne discuterai avec lui ! gueule-t-elle en me pointant de son index, le visage déformé par le dégoût. T'es la plus grosse ordure que j'aie jamais connue !

Elle me balance sa deuxième chaussure qui se cogne contre mon biceps. J'accueille la douleur sans ciller. Même le connard en moi peut reconnaître que c'est mérité.

— Je suis certain que t'as tes raisons, hija, mais...

— Il m'a tiré dessus, un peu que j'ai mes raisons !

Oscar me fait les gros yeux. Imperméable à ses réprobations muettes, j'avale une autre gorgée de vodka.

— Et si on essayait de démêler tout ça devant un bon repas, sí ?

— Il n'y a rien à démêler, je veux rentrer chez moi !

— Je te rappelle que Kiran cherche à te faire la peau, hija. Si Pavel t'a menée ici, c'est pour te protéger. Il a eu plusieurs occasions de te laisser crever, mais t'es encore là.