31. Margot

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♪ Bang bang - GRAE ♪

— OK, c'est parti...

Je pose mon verre de rhum-coca sur le comptoir du club désert. J'ai laissé mon sac de voyage dans la chambre de Pavel ainsi que la cage ouverte de Truite. Pavel a longtemps protesté, mais s'il voulait que je vienne, alors mon chat devait venir aussi. Il a pris congé dans son bureau à notre arrivée, et je me suis baladée dans le club récemment fermé.

Dépourvu de présence humaine, l'endroit semble vaste et désolé. L'air sent le renfermé et un froid spectral me mord la peau mais, bizarrement, j'aime détenir tout cet espace pour moi toute seule. Je me suis installée au comptoir et me suis librement servie d'une bouteille de rhum pour commencer à bosser sur mon rapport de stage.

Je m'empare d'une feuille vierge et rédige un premier plan. Une heure, deux verres et trois brouillons plus tard, une voix espiègle m'interrompt dans mon travail.

— Tu m'écris une lettre d'amour, Ellwood ?

Je coince le bout de mon stylo entre mes lèvres et lève les yeux vers Olek. Il a les coudes appuyés à l'extrémité du bar, une lueur taquine brillant dans ses iris marron.

— Tu ne me parais pas du genre sensible aux effusions de sentiments.

— Disons seulement que tu n'as pas besoin de te fatiguer avec tout ça si tout ce que tu veux c'est me mettre dans ton lit.

— J'en prends note, dis-je en rigolant.

Mon téléphone vibre sur le comptoir, le nom de Pavel affiché à l'écran.

— Allô ?

— Ne bouge plus.

Je me fige, arquant un sourcil dubitatif en direction d'Olek.

— Qu'est-ce que...

— Tourne sur toi-même.

— C'est une espèce de blague ? l'interrogé-je en obtempérant.

Je scanne le club vide de toute âme. Où se cache-t-il ? Comme entendant mes pensées, il précise :

— Plus haut.

Je lève le regard et repère sa silhouette derrière une vitre qui surplombe la fosse. Il m'adresse un rictus machiavélique.

— Maintenant, exécute un petit pas de danse.

Pour seule réponse, je lui décoche mon plus beau doigt d'honneur. Son rire m'arrache un sourire complice.

— Besoin d'aide avec tes devoirs ? reprend-il d'une voix traînante. T'as l'air de ramer.

— Tu es dans ton bureau ?

— En effet. Rejoins-moi, et amène cette bouteille avec toi.

— T'organises une soirée là-haut ? Parce que j'ai bien envie d'une distraction.

— Oh, mais je vais te distraire, petit ange. Et tu demanderas à Olek de s'occuper des poubelles.

— T'es méchant avec lui.

— Il te drague juste sous mes yeux. Je ne fais que le punir.

Il raccroche. Olek, qui s'est avancé derrière le bar durant la conversation, saisit mon verre pour le finir.

— Qu'est-ce qu'il a dit ?

— Que tu as le reste de ta journée de libre, mentis-je en rassemblant mes affaires.

— Cool !

Je vais pour tourner les talons, mais son regard s'attarde et il se mord la lèvre inférieure comme s'il souhaitait me dire quelque chose.

Deadly heartsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant