Chapitre 22

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A leur arrivée chez Bobby deux heures plus tard, l'hôte de ces lieux est bien trop saoul pour écouter quoi ou qui que ce soit avec attention. Alors Maeve et les frères Winchester décident de se joindre à la petite sauterie de ce vieux Bobby Singer, armés de quelques bières, d'une bouteille de Whiskey et de cacahuètes sûrement périmées. Avant de pouvoir atteindre le canapé du salon, Maeve est férocement attaquée et projetée sur le sol, le gros Bunny léchant son visage et battant la queue avec force. Dans un grand sourire, la jeune femme caresse la grande tête de son Bun-Bun - elle s'est habituée au surnom que lui a donné Dean - et sourit tendrement.

-Ok Bunny, on y va. Allez, viens.

Maeve approche donc de la sortie du salon, attrape son manteau et se dirige vers la porte menant à l'extérieur. Ici, elle sent quelque chose - quelqu'un - s'approcher ; elle se retourne, sourit.

-Je peux ? demande Sam en montrant la porte du menton.

-Bien sûr.

Les deux vieux amis prennent donc la suite de Bunny, lequel saute tout heureux d'une plante à une autre, d'un morceau de ferraille à un autre, se faisant un plaisir de ramener à sa maîtresse toutes sortes d'objets rares et précieux de sa nouvelle collection. Pendant ce temps-là, Maeve et Sam marchent tranquillement le long de la propriété de Bobby, vérifiant de temps en temps qu'aucune paire d'yeux noirs ne les surveille.

-Tu as été fabuleuse, Maeve, dit finalement Sam en continuant de marcher.

-Tu exagères, répond celle-ci en esquissant un sourire.

-Non, en fait je suis très sérieux. La façon dont tu as déboulé au poste de police, j'ai trouvé ça très fort.

-C'était rien, argue la jeune femme. Je ne sais pas si tu avais remarqué, mais j'ai été avocate pendant quelques temps.

Devant le sourire de Samy, elle hausse les épaules avec nonchalance.

-C'est mon métier, reprend-elle. De savoir parler aux gens pour obtenir ce que je veux ; d'aider les gens, du moins à mon niveau.

-Bon, d'accord, admet Sam, disons que c'est dû à l'expérience - et non pas au talent, comme je le pense personnellement - et que cette partie de l'enquête, c'était la routine. Mais... le reste, ça ne l'était pas. Et tu t'es débrouillée comme une vraie cheffe.

Cette fois-ci, Maeve décide d'accepter humblement le compliment. Aussi, elle reste silencieuse, se contentant de sourire et de remercier Samy d'un geste de la tête. Puis, ils poursuivent leur balade, tranquillement, presque sereinement. Puis au bout de quelques instants, les deux amis presque collés l'un à l'autre, Maeve penche légèrement la tête. Elle plonge le regard dans les yeux profonds de Sam Winchester, lequel arque légèrement les sourcils en signe de curiosité.

-Maeve ?

-Sam, dit celle-ci, je suis inquiète. Je m'inquiète pour toi.

Alors, la jeune femme explique à Sam ce qui la tracasse. Elle lui raconte comment, depuis leur arrivée chez Bobby, elle ne l'a plus vu dormir plus d'une ou deux heures d'affilée sans se réveiller en sursaut. Elle lui raconte ses pressentiments à ce sujet, son impression que Sam se torture l'esprit. A cette idée, ce dernier se pince légèrement les lèvres.

-Hey, dit-elle en attrapant le bras de son ami, Sam. Tu sais que je ne suis pas sous ta responsabilité, n'est-ce pas ?

-Maeve...

-Non, je suis sérieuse. Ton frère, Bobby et toi, vous m'avez accueillie à bras ouverts dès le départ et vous avez érigé cette sorte de... muraille protectrice, autour de moi. Je vous en serais à jamais reconnaissante, parce que je me sens mieux avec vous ici, malgré les dangers, que je ne l'avais été depuis très longtemps. Mais... rien ne vous obligeait à m'aider, rien, pas même notre lien à tous les deux. Ce que vous faites tous les trois, c'est très généreux et je ne vous remercierai jamais assez pour ça. Mais... tu ne dois pas te ronger les sangs.

Sam et Maeve se sont arrêtés de marcher, se fixant désormais l'un et l'autre et ignorant totalement les joujous que Bunny continue de ramener.

-Maeve, soupire finalement Sam, j'ai compris. Tu peux prendre soin de toi-même, tu es forte, apparemment plus forte que moi. Mais je ne peux pas l'empêcher. Tu ne comprends pas ? Je ne peux pas m'empêcher d'avoir peur que l'un de ces démons te fasse quelque chose que je ne pourrais pas réparer !

-Sam, je ne suis pas Jessica.

Les mots de Maeve ne se voulaient pas aussi durs qu'ils l'ont été une fois sortis de sa bouche. En entendant ces quelques mots, Sam recule d'un pas, le visage dur. La douleur qu'il ressent lorsqu'il repense à ce qui est arrivé à Jess, elle ne le quittera jamais vraiment. Puis, il regarde à nouveau Maeve Clarke dans les yeux.

-Tu crois que je ne le sais pas ?

Il baisse le regard, secouant doucement la tête de gauche à droite. Jessica ne savait rien de ce monde qui est le sien, elle n'en faisait pas, et n'en ferait jamais partie. C'était une femme simple qui n'attendait rien de plus de la vie que du calme et de la tranquillité, un foyer sans histoires et sans complications. C'était une femme à qui la vie avait toujours souri, qui n'avait jamais manqué de rien, qui n'avait pas eu besoin d'apprendre, trop jeune, à devenir forte et à encaisser les malheurs. Jessica était une femme que Sam avait aimé parce qu'elle était tellement différente de lui qu'il en oubliait qui il était, malgré lui, et ce qu'il avait en lui au plus profond de son coeur et de son âme. Alors c'est vrai, Maeve n'est pas Jessica ; elle en est tout le contraire. Et ça, il ne risque pas de l'oublier.

-Eh, les amis ? Eh oh... les amis !

Maeve et Sam sont sortis de leur transe par la voix éraillée d'un Dean fortement éméché. Ce dernier se balade entre les ferrailles de voiture une bouteille à la main, déambulant d'un endroit à l'autre les yeux plissés. Quand il arrive face aux deux amis, il prend Maeve dans ses bras, posant sa lourde tête sur l'épaule de son amie.

-Bon alors mes... deux personnes préférées, reprend-il dans un hoquet, vous venez ?

Sam et Maeve se regardent une dernière fois, le regard plus ou moins apaisé. La vérité, c'est qu'ils tiennent trop l'un à l'autre pour retenir le moindre grief l'un à l'égard de l'autre. Alors, après un sourire timide qui signifie : "Oublions ça, ne t'en fais pas", ils suivent tous les deux Dean à travers les carcasses jusqu'à la maison, où Bobby attendait leur arrivée en posant un vieux vinyle des Fleetwood Mac sur son tourne-disque. Les quatre amis restent éveillés une bonne partie de la nuit, chantant à tue-tête des tubes des années 1970 et célébrant le temps d'une soirée la renaissance de Maeve Clarke et son entrée dans la grande famille des chasseurs.

La voie des Anges - Partie 1 (A Supernatural Story)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant