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Jerry m'aborda aussitôt.
- Cette robe te va à ravir.
- Merci, souris-je timidement.
- Je t'inviterais bien à prendre un verre mais je dois parler à Salvatore. Tu sais où il est ?
- Aucune idée! fis-je sèchement.
-Ah. Du coup, partante pour le verre?
- J'aurais bien aimé... , débutai-je sans finir.
J'aperçus alors Salvatore se diriger furtivement vers le couloir annexe suivi de Suzie. C'est la meilleure celle-là. Je détournai rapidement le regard et revint à mon interlocuteur.
- À bien y penser, une coupe de rosé me tenterait bien.
- T'as bon goût décidément.
- On peut le dire, répliquai-je en avançant un rire jaune.
Nous atteignîmes un bar installé dans le jardin du domaine et nous nous y installions. Nous discutions un long moment en enchaînant des coupes de champagne. Et à vrai dire, cet homme avait de la conversation et apparemment bon goût également. Il reçut un mystérieux appel suite auquel il me quitta avec regret. Je n'avais pas trop le choix. Je devais me faire à la solitude. Fais chier! J'ai les nerfs à fleur de peau à juste repenser à la sale gueule de Suzie.
- Un autre verre, demandai-je au barman en posant rudement la flûte de champagne sur le comptoir.
Il me le servit finalement et à l'instant où je voulus saisir le verre, une main, large et froide se posa sur la mienne. Je reconnus aussitôt ce toucher. C'était son odeur; il n'y avait pas de doute.
- Ne touche plus à ce verre! m'ordonna-t-il.
- Retire ta main, repris-je calmement.
- On rentre. Je t'attends dans la voiture!
Il dégagea sa main sur ces mots puis s'en alla. Je bouillonnais de l'intérieur. J'avais envie de lui arracher ses doigts un par un. Je n'arrivais plus à gérer mes émotions. Était-ce son rejet qui me faisait autant mal ou le fait qu'il ait disparu un long moment avec Suzie? Je n'en avais aucune idée. Mais qu'y faire... Je pris le temps de finir mon verre avant d'aller le rejoindre dans la voiture.

Lorsque j'arrivai, il semblait plongé dans ses pensées. Il avait déjà retiré sa veste et désormais ne vêtait qu'une chemise blanche. Sa voix résonna pour me faire planer sur ses paroles aiguisées.
- Je suis désolé qu'on ait pas pu passer assez de temps ensemble cette soirée .

Ah ça alors. Monsieur est désolé? Quel beau salaud! Faudrait vraiment qu'il aille voir un psy. Il doit sûrement être bipolaire.

Je ne répondis pas. Ma colère s'estompait peu à peu mais je n'avais pas le cœur aux sentiments et déclarations. Je voulais juste me trouver en face de la mer et sentir le vent dans mes cheveux. Je voulais oublier tout ce qui me tracassait, mes peines de cœur et ma vie. Je voulais également avoir une épaule sur laquelle m'apitoyer mais c'était pas gagné. Une autre fois peut-être...

Il démarra la voiture sans broncher le moindre mot et me laissant, malgré moi suspendue aux échos de sa voix. Nous roulions tard cette nuit étoilée, froide et sobre sur les routes bordées d'herbes moyennes et de sable fin qui s'étendaient jusque dans l'immense bleu océan. J'étais nostalgique, une fois de plus.
La voiture ralentissait et Salvatore finit par la garer sur le bord de la route vide et lumineuse. Je fus alertée et me tournai automatiquement vers lui.
- Pourquoi tu t'es arrêté? lui demandai-je.
Il ne daigna point m'adresser la parole puis sortit de la bagnole. Je n'hésitai pas à en faire de même. Je l'entendis ricaner et le vis passer sèchement ses mains sur la tête. J'étais plongée dans une incompréhension totale. Je ne savais pas ce qu'il avait. L'avais-je énervé peut-être? Ou avais-je dit ou fait quelque chose de travers?

Il contourna ensuite la voiture et vint se poser devant mes yeux grands ouverts et inquiets.
- Dis-moi! Tu crois en l'amour toi? me questionna-t-il contre toute attente.
- Je ne sais trop quoi dire , fis-je en retour tout en hésitant.

Il ne dit plus rien et continuait à me reluquer, faisant battre mon cœur comme si j'eus couru un marathon. J'étais fragilisée par son regard dévastateur ainsi que par la brise côtière qui infiltrait chaque pore de ma peau. Je voyais sa tête se rapprocher de la mienne et je ne pus me retenir de lui lancer un « et toi? ». À cet instant là, l'un de ses doigts se logea sur mes lèvres avant de dévier sur ma joue gauche. Il ramena derrière mon oreille quelques mèches de cheveux rebelles qui retombaient sur mon visage. Il s'abaissa par la suite, me plaquant contre la carrosserie givrante de la voiture avant de me souffler délicatement à l'oreille:
- J'y ai jamais cru. Mais je commence à en douter.
Il ne me lâchait guère de ses yeux purs noisettes. Il posa agilement l'une de ses mains sur mon fessier avant de plaquer ses lèvres indociles contre les miennes, sans jamais les embrasser. Tout en les frôlant, je pouvais sentir son souffle chaud se répandre sur mon visage, laissant mes pommettes toutes rouges. J'avais déjà l'esprit chamboulé mais j'étais loin d'être rassurée. Je lui retournai:
- Qu'est-ce qui t'en fait douter?
Il embrassa subtilement mon cou puis remonta vers mon hélix qu'il lécha habilement d'un coup de langue. Je fus étonnée de l'entendre me dire:
- Toi!
Comme si je ne m'y attendais pas en réalité...
- Tu ne me donnes pourtant pas cette impression.
- Laisse moi toute la nuit pour te le prouver.
Je sentis mon cœur s'arrêter un instant et j'eus la sensation de suffoquer. Salvatore me saisit soudainement par la taille, essayant de me porter. J'essayai d'y résister mais en vain.
- Je veux descendre, insistais-je.
- ¡Eres más bonita cuando estás en silencio! ( Tu es plus jolie quand tu te tais!)
Je rougis à sa réplique et me laissai faire. Il me porta jusqu'au bord de la mer. Je pouvais sentir les battements de son cœur de même que toute la chaleur qui émanait de son corps de demi-dieu. Je me sentais en sécurité dans ses bras quand bien même j'avais encore des doutes. Il me posa finalement raide dans le sable se mettant par la suite au dessus de moi. Nos yeux fusionnèrent et je n'arrivais plus à bouger encore moins détourner le regard. Sa respiration chaude et accélérée s'abattait à nouveau sur mon visage . L'atmosphère était étrange et très intense. Je le vis diriger sa tête vers ma joue où il commença à m'embrasser avant de descendre dans mon cou. Je n'avais aucune envie de lui résister. Sa langue tournoyait dans l'immense vide de mes clavicules puis remonta en harmonie avec ses lèvres pour me suçoter chaque partie du cou. J'aimais ça !
Je l'entendis soudain grogner:
- ¿Puedo follarte? (Puis-je te baiser?)
Ces mots dits, il releva légèrement la tête et je percutai ses iris à l'éclat déterminé. Mon cœur tambourinait dans ma poitrine pendant qu'il reprit , sûr de lui:
- ¡Por favor! (S'il te plaît!)
Je baissai les yeux, gênée et mon corps décida de répondre à ma place.
Sur un simple hochement de tête, je pus ainsi goûter au fruit défendu telle Ève dans le jardin d'Eden...

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