Chapitre 38: Sweet Oklahoma

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Je sursautai. À quel moment m'étais-je assoupie ? Je me souvenais avoir vu les premiers rayons du soleil, entendu Nadir marmonner dans son sommeil, puis plus rien.

Bon sang, n'importe qui aurait pu nous trouver ici.

Le soleil était encore en bas. Tant mieux, il valait mieux qu'on parte le plus tôt possible. J'ignorai l'endroit exact d'où l'on prendrait l'avion.

Nadir se réveilla et s'étira, un sourire au coin des lèvres.

— Tu as bien dormi ?

— On devrait se dépêcher, je n'ai pas envie qu'on nous voit revenir des jardins à cette heure-ci.

Je m'étais remise debout et lissais ma robe du mieux que je le pouvais. C'était sans aucun doute vain, mon maquillage devait avoir coulé et mes cheveux étaient en bataille.

— Bonjour à toi aussi, c'est toujours un plaisir...

— Oh s'il-te-plaît, n'agis pas comme si tu voulais expliquer à ma mère pourquoi sa fille a passé la nuit dehors.

Il haussa les épaules.

— Ça lui donnerait une bonne raison de me détester.

Pas faux. Quoique je pouvais facilement deviner la raison principale pour laquelle elle le haïssait : il me rendait heureuse – au moins en apparence – cela lui suffisait.

Nous nous mîmes en marche et, force était de le constater, notre balade à l'aveuglette de cette nuit prenait désormais des airs de labyrinthe. Quel chemin avions-nous emprunté ? Cette fontaine avait-elle été construite entre temps ? Une seconde, était-ce le banc sur lequel nous avions dormi ?

Je n'avais aucun sens de l'orientation ; il suffisait de se rappeler la manière dont j'avais lamentablement tourné en rond lors de ma première – et piètre – tentative d'évasion. Les cicatrices qui jonchaient mes paumes et poignets me rappelleraient sans cesse ce que mon incompétence m'avait coûtée.

Nadir marchait avec détermination, affirmant d'une voix assurée qu'il fallait tourner à droite, ou bien à gauche. J'aurais pu lui en vouloir de nous perdre encore plus si j'avais été capable de faire mieux. Comme ce n'était pas le cas, je me contentais de le suivre et de me taire.

Cela me laissait largement le temps de repenser à mes bêtises de la veille. Lui avoir demandé de m'embrasser, puis plus tard, avoir répondu à son baiser. Il avait eu raison, je préférai pouvoir m'en prendre à lui plutôt que d'assumer pleinement. Je me sentais moins coupable. La Violet d'il y a une semaine m'aurait abattu d'une balle en pleine tête si elle avait su. Celle d'il y a un mois l'aurait aidé à cacher mon cadavre.

— C'est bon, je sais où nous sommes. Regarde, la maison est...

Sa voix s'évanouit et il s'immobilisa. J'arrivai à sa hauteur en moins d'une seconde.

Nadir jura.

Bien que nous soyons encore loin, la scène était claire.

Il y avait du mouvement. Beaucoup de mouvement. Une foule se pressait devant le bâtiment, vêtus de peignoirs ou de simples pyjamas.

Puis, le poids du monde me tomba sur les épaules.

Un premier uniforme bleu, un autre. Une dizaine. Ils étaient là. Ils nous avaient retrouvés. Ils allaient leur révéler.

Nadir jura encore et me tira d'un coup sec derrière une haie. L'incrédulité se lisait sur son visage et il respirait rapidement.

— Ça va aller, ça va aller, répéta-t-il plusieurs fois. Ils doivent être en train de fouiller la maison et ce n'est qu'une question de minutes avant qu'ils ne s'attaquent aux jardins. L'aérodrome n'est pas loin, il faut simplement qu'on trouve le moyen de s'y rendre. Je ne peux pas appeler Jamel et attendre, ce serait trop risqué. On doit prendre le maximum d'avance avant qu'ils ne se doutent de notre plan.

FIRES DIE TOOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant