La Malédiction Des Jumeaux : Un Nouveau Chapitre De Dr Djenguè

Chapitre 10: elle disparaît aussi vite qu'elle apparaît.

Déçue que son meilleur ami ait annulé leur ciné, Analyze s'était jetée dans les rues de Fidjrossè avec un short et un débardeur larges. Elle espérait que faire un footing nocturne l'aiderait à noyer ses tourments. Mais à son retour, elle fut interrompue dans sa course par un appel de Romann. Elle décida alors de marcher pour l'écouter et discuter avec lui. Cela devait déjà faire plus de dix minutes que les deux adolescents parlaient de tout et de rien.

Analyze gagna la rue de leur villa, une belle cage dorée. Elle riait à la nième blague de son ami lorsqu'une silhouette au loin attira son attention. Une jeune femme portant de grosses locks s'écroula devant leur portail.

- Lyze, t'es là? Lyze...

- Je te rappelle Romy...

- Attends mais tout va bien? Est-ce que...

Sans le laisser finir, elle raccrocha et accourut. Parvenant devant l'entrée essoufflée, elle tomba sur le gardien qui sortait de la maison.

- Bon retour mademoiselle.

- Merci Muhammad, répondit-elle vaguement en s'accroupissant devant sa sœur.

- Salut sœurette, lâcha cette dernière.

- Bon sang Anabelle, qu'est-ce qui s'est encore passé?

- Quoi, c'est comme ça que tu accueilles ta sœur chérie? Même pas un câlin?

La voix d'Anabelle était gutturale et ses mots s'entendaient à peine. Sans que sa sœur n'eut besoin de demander, Muhammad souleva vigoureusement l'adolescente et la bloca sur son large dos. Avant de refermer le portail derrière elle, Analyze jeta un œil au balcon. Sans grande surprise, elle aperçut Anaëlle arrêtée, la mine inquiète.

En entrant dans le séjour, Analyze tomba sur Jedida qui observait la scène les bras croisés. Derrière Muhammad, elle dépassa sa belle-mère sans lui adresser le moindre regard. Cette dernière remua de la tête et se tapa dans les mains.

- Mais dans quelle famille de malheur je suis tombée? Se demanda-t-elle. Un père alcoolique, une fille droguée, une deuxième fille qui s'enferme à longueur de journée et une autre qui est impolie. Eh Dieu, je suis tombée bien bas hein! Qu'est-ce que j'ai bien pu faire au ciel pour mériter une telle souffrance?... En tout cas, tant que je dors et mange à ma faim avec mes fils, ils peuvent bien continuer à être une famille de fous.

Pour mettre un point à son monologue, Jedida haussa les épaules et prit la route de la cuisine. Seulement, elle ignorait qu'Anaëlle l'avait entendue en allant vers la chambre de sa sœur. Mais comme à son habitude, la triplette garda le silence et rejoignit ses sosies.

- Que se passe-t-il? S'enquit-elle en pénétrant la chambre d'Anabelle.

- Il est évident qu'elle est stone... comme d'habitude.

Allongée dans son lit, la junkie de 16 ans semblait discuter avec des fantômes. Tantôt elle marmottait, tantôt elle rigolait. Les vêtements qu'elle portait n'étaient pas ceux qu'elle avait en sortant une semaine plus tôt.

- Où est-ce que tu étais durant tout ce temps Belle? On s'est inquiétées et on a appelé mais tu n'as pas décroché.

- Comme d'habitude, compléta Anaëlle.

Ce n'était ni la première ni la dernière fois que la jeune femme disparaissait pendant des jours pour ensuite réapparaître.

- Oh arrêtez de dramatiser toutes les deux. Quelles petites natures vous faites.

- Mon Dieu, ma sœur, il faut que tu te fasses aider. Kinklin¹ [Je t'en supplie].

- Moi? Aider? Ha ha ha. Et regardez un peu qui parle, la petite malade mentale qui est incapable de sortir de la maison depuis des années et qui refuse de se faire soigner.

Blessée par les mots de sa sœur, Anaëlle laissa une larme perler sur sa joue et sortit aussitôt de la pièce. Analyze remua de la tête sans tenter de la rattraper.

- Regarde ce que tu es en train de devenir Anabelle. Et à peine rentrée, tu sèmes déjà le bazar.

- Le bazar tu dis? Moi je sème le bazar? Ah non Lyze tu n'as pas le droit de m'accuser d'une telle chose. La seule personne qui est responsable de tous nos malheurs ici, c'est ton imbécile de père qui refuse en plus de prendre ses responsabilités! Alors vous allez tous me lâcher la grappe et arrêter de faire comme si j'étais le problème dans cette maison!

- Il refuse peut-être de prendre ses responsabilités mais toi tu as choisi de te droguer. Tu penses franchement que c'est la meilleure solution?

- Ce n'est peut-être pas la meilleure mais au moins ça me tient loin de cette baraque de malheur! Et remerciez le ciel que je n'y sois presque jamais parce que j'aurais déjà tué cette peste qui se prend pour la maîtresse de maison depuis bien longtemps!

- Parce que la tuer va ramener maman peut-être? Tu ne te drogues pas pour être loin d'ici, on le sait tous. Tu le fais uniquement parce que tu n'as pas encore réussi à faire le deuil de maman. Et figure-toi que tu n'es pas la seule. Mais comment on est censées s'en sortir si on n'est pas là pour se soutenir toutes les trois?

En entendant ces mots, Anabelle devint comme folle et se jeta sur le cou sa sœur.

- Je t'interdis de parler de maman de cette façon, tu m'entends? Je te l'interdis petite fille pourrie gâtée!

Analyze se débattait de toutes ses forces pour ne pas étouffer sous les mains de sa triplette. Mais les yeux de cette dernière étaient noirs de rage. Lyze avait commis une grave erreur. Elle avait oublié à quel point Belle détestait qu'on aborde le sujet de leur défunte mère. Comme si elle était dans le déni, à jamais enfermée dans un monde où sa mère était vivante.

Lyze étouffait et gesticulait sous le corps de sa sœur. Ses yeux rougissaient et sa veine frontale se dilatait. Elle voyait déjà sa vie défiler sous ses yeux lorsqu'un bruit alerta Isaac. Il venait de rentrer et fut étonné d'entendre du mouvement en provenance de la chambre d'Anabelle.

Le père de famille grimpa les marches à moitié ivre et tomba sur le spectacle du siècle : assise à califourchon sur sa sœur, Anabelle essayait de l'asphyxier. Et juste à côté d'elles, la lampe de table à 1000 euros gisait en morceau sur le sol. Sans réfléchir, Isaac se précipita et ôta Analyze des mains de sa sœur. Cette dernière se débattit et finit par envoyer son père au sol.

Alors que Lyze essayait de retrouver son souffle, Belle sortit de la chambre en furie. Trop faible pour l'arrêter, la triplette se résigna à laisser sa sœur s'évanouir dans la nature, encore une fois. Elle posa un regard supplicateur sur son père. Pour elle, il n'était pas encore trop tard pour reprendre les choses en mains. Mais encore une fois, il lui semblait être la seule à s'en soucier.

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1- Langue fon.