Chapitre 2: orphelines d'un père vivant.

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Romann gara sa grosse routière devant un portail marron foncé: c'est là que la famille d'Analyze avait déménagé depuis le décès d'Auriane.

Elle descendit de la moto et retira son casque.

- Tu peux retirer ton casque un instant s'il te plaît ?

Romann s'exécuta sans discuter. Elle afficha un sourire timide et posa un long baiser sur la joue du jeune homme. Surpris par ce geste, il en perdit son latin.

- Merci, reprit-elle.

- Merci... merci pourquoi?

- De m'avoir écoutée, d'être mon ami, de me supporter, de m'avoir déposée, pour... pour tout en fait. T'es un ami en or.

- Hmm, et c'est pour ça que tu en profites pour me crier dessus?

- Oh je... je suis vraiment désolée pour mon comportement de tout à l'heure au restau. J'ai... je me suis pas contrôlée...

- Heyy, l'interrompit-il en lui prenant la main. Ça va, respire Lyze, je te taquinais juste... Heyyy, tu pleures? Me fais pas ça s'il te plaît.

- Je suis désolée je... j'arrive pas à me retenir. Ça fait tellement longtemps que je garde toute cette douleur en moi.

- Bon, et si on faisait une chose. Un ciné demain, ça te dit?

Elle lâcha un rire bref au milieu de ses larmes.

- Je rêve ou Romann Djenguè vient de m'inviter au ciné? C'est pas toi qui disais que le ciné c'est du gaspillage d'argent et que tu préfères encore mater les films sur ton PC dans ta chambre?

- Si mais... là c'est différent.

- En quoi?

- Le but c'est de te changer les idées, d'être là pour toi. Alors autant faire un truc que toi tu aimes... Quoi? Pourquoi tu me regardes comme ça ?

- T'es vraiment un ange.

- Vous voulez pas prendre une chambre d'hôtel tant qu'on y est?

Les deux adolescents levèrent leurs regards et apperçurent la propriétaire de cette voix rauque.

- Bonsoir à toi aussi Anaëlle!

- Salut Romy! Alors quoi de neuf?

‐ Ça roule comme d'habitude!

- Merci de me l'avoir ramenée en un morceau!

Analyze roula des yeux et fit aurevoir de la main à Romann. Ce dernier hocha la tête et remit son casque. En regardant sa montre, il se rendit compte qu'il avait déjà enfreint le couvre-feu imposé par sa mère. Il ne restait plus que 10 minutes pour que sonne 21 heures et Calavi n'était pas la porte à côté. Quoi qu'il en fut, il était déjà dans la mouise. Il se contenta donc de démarrer et de reprendre la route. Analyze le regarda s'en aller avant de sortir la clé du portail. Mais au moment où elle s'apprêtait à l'ouvrir, sa sœur lui lança une nième pique.

- Tu comptes lui dire quand qu'il te plaît Analyze? Hum?

- La ferme Anaëlle!

- C'est la vérité qui fait mal!

Analyze jeta un œil au tronçon invisible que Romann avait tracé derrière lui. Il n'était déjà plus dans la rue de Fidjrossè où siégeait leur villa. Au fond, elle espérait qu'il rentre chez lui sain et sauf. Sur ce vœu, elle poussa le portail et referma derrière elle.

En pénétrant le salon, Analyze fut accueillie par un visage qui lui donnait des envies de meurtre depuis quatre ans : Jedida. Cette dernière était arrêtée près d'un divan, les bras croisés. Sans lui adresser la moindre salutation, Analyze continua sa route.

- Hep hep hep! Mais où est-ce que tu penses aller comme ça ?

- Écoute Jedida, je n'ai pas envie de me prendre la tête ce soir alors s'il te plaît pousse-toi...

- Ou sinon quoi? Hein? Ou sinon quoi petite insolente? C'est comme ça que ta mère t'a appris à parler à tes aînés?

Le souffle court, Analyze se rapprocha de sa marâtre.

- C'est la première et la dernière fois que tu oses parler de ma mère. Est-ce que tu m'as bien entendue espèce de folle?

- Ah ah! C'est moi que tu traites de folle ?

- Laisse-la tranquille Jedida!

- Quoi?! Isaac, c'est tout ce que tu trouves à dire face à l'insolence de ta fille?

- Je t'ai dit de lui foutre la paix Jedida et je ne me répèterai pas.

Ébaubie, Jedida ravala sa fierté et disparut dans sa chambre en claquant la porte. À son tour, Analyze dépassa son père sans lui adresser le moindre mot. Ce dernier ne tenta pas de l'arrêter. Il savait que cela ne servait à rien et depuis le décès d'Auriane, il ne savait plus comment s'y prendre avec les filles. Alors il laissait le destin s'en charger, espérant que tout irait pour le mieux.

Avec Anaëlle, tout semblait aller bien. Mais Anabelle avait sombré dans la drogue et dans bien d'autres substances peu recommandables. Isaac se berçait d'illusions comme quoi c'était la fleur de l'âge. Quant à Analyze, il ne savait pas trop quoi penser. Elle n'acceptait toujours pas son mariage avec Jedida. Et surtout, il savait que si elle devait sombrer, elle ferait pire qu'Anabelle. Il croisait donc les doigts et comptait sur son étroite amitié avec Romann pour la canaliser. Pour faire court, il avait enterré son rôle de père en même temps que la mère de ses trois filles.

Isaac balaya du regard ce grand salon où rien ne manquait. Rien à part la présence de sa chère Auriane. Et comme beaucoup d'autres soirs, il récupéra ses clés sur la table basse et se dirigea vers le garage. C'était parti pour une soirée arrosée dans l'un des bars huppés du pays. Avant de partir, il rappela au gardien, un grand noir baraqué, de veiller à la sécurité de sa famille recomposée : Anaëlle et Analyze, Jedida son épouse malgré lui et leurs deux jumeaux Esaï et Ysham. Anabelle pouvait rentrer à n'importe quelle heure, ou même pas du tout. Depuis qu'elle était une junkie, plus personne n'avait de contrôle sur elle.

La Malédiction Des Jumeaux : Un Nouveau Chapitre De Dr Djenguè Où les histoires vivent. Découvrez maintenant