Les pas hâtés que Magda et des triplés m'indiquèrent sans équivoque qu'ils étaient pressés et ne souhaitaient pas se faire repérer. Ils slalomaient entre les passants tout en nous lançant des regards par-dessus leur épaule pour vérifier qu'on tenait la cadence. Nous pénétrâmes rapidement dans un des nombreux buildings de verre dont était dotée la ville. Je fus surprise de constater qu'il y avait beaucoup moins de gens que je ne le pensais ; le peu de personnes qui étaient elles aussi entrées s'engouffraient d'ailleurs vers le fond de la salle. De gros écrans qui faisaient défiler des annonces, des images et des listes incompréhensibles recouvraient les parois vitrées. Quelques employés étaient assis derrière des bureaux, des hommes et des femmes plongés dans les textes que leur reflétaient leurs ordinateurs. Ils ne paraissaient pas dérangés ni embêtés par le groupe d'habitants qui convergeait vers l'arrière de la pièce. Nous restâmes plantés à l'entrée, examinant ce hall utopique avec les yeux écarquillés.
- Venez, nous n'avons pas de temps à perdre, fit Magda pour nous rappeler gentiment à l'ordre.
Elle s'engagea vers l'endroit où se dirigeaient tous les passants qui étaient rentrés avant nous. Nous aboutîmes à un cul-de-sac, où deux escaliers en colimaçon avaient été bâtis. La manière dont les marches rougeoyaient sans suivre de timing précis leur conférait quelque chose de vivant, voire troublant. Les deux escaliers s'enroulaient en spirale vers le haut, comme tout escalier en colimaçon qui se respecte, mais s'arrêtaient après s'être élevé à trois mètres du sol. Je fronçai les sourcils, l'utilité de ces escaliers qui menaient dans le vide m'échappant complètement. Surtout qu'une marche sur deux manquait à l'appel, créant un espace non négligeable entre deux échelons. Magda laissa échapper un juron martien puis se tourna vers ses enfants, posant ses mains sur les épaules de Marghau.
- Écoutez, il n'y a qu'onze marches. Amenez les Porteurs chez les Représentants, vous connaissez le chemin. Je vous rejoins dès que possible.
Les triplés hochèrent la tête, signe de leur obéissance, et se tournèrent vers nous. Après un instant d'hésitation, ils optèrent pour la démonstration, grimpant chacun sur une marche avant de nous signaler d'en faire autant. Je jetai un regard interrogateur aux autres avant de les imiter, néanmoins sceptique en prévision de ce qui allait se passer. Les autres ne tardèrent pas non plus, même si Fynn manqua de s'écraser par terre en voulant escalader les échelons pour parvenir à sa marche.
- Hum...vous ne pouvez pas prendre l'autre escalier ? demandai-je.
- Il est pour ceux qui descendaient, répondit gentiment Magda.
- Accrochez-vous bien, nous conseilla Marghau.
- Pardon ?
Lorsque Migor tapa du pied, les marches s'ébranlèrent. Je faillis perdre mon équilibre et tomber, mais parvins à me retenir de justesse. Nous montâmes en décrivant des spirales, lentement puis de plus en plus vite. Je me forçai ne de pas regarder en bas, de fermer les yeux, mais la sensation d'être sur un manège interminable à 400km/h ne faisait que s'accentuer. Je me tortillai pour essayer de donner à ma colonne vertébrale la raideur nécessaire afin tenir debout sur la marche qui s'évertuait à voler toujours plus haut. Un goût de bile m'envahit la bouche tandis que le nœud dans mon estomac se contracta.
À mon grand soulagement, la vitesse commença à diminuer. Les paupières toujours fermement pressées, je priai pour que le voyage se finisse rapidement. Mon imploration sembla avoir été entendue par une bonne étoile, car l'ascension ne perdura que quelques secondes avant que ma marche ne s'immobilise. Les marches s'étaient replacées sur un autre escalier en colimaçon, dans le même ordre que précédemment. Lorsque je dirigeai mon regard vers le bas, je manquai de chanceler violemment. Le rez-de-chaussée d'où nous nous étions envolés se situait à présent environ cent mètres plus bas. À l'inverse de tout à l'heure, où un simple couloir menait aux escaliers, la pièce qui contenaient les deux mécanismes était fermée. Les murs bétonnés reflétaient les lueurs émanant des LEDs bleues accrochées en hauteur. De la porte en verre, qui donnait sur une grande salle parcourue de passants, s'infiltraient un peu de lumière naturelle.
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La Clé de Mars
FantasyÀ la base, moi, je n'avais rien demandé. Déjà que j'allais devoir déménager à Bruxelles, changer d'école et de maison, loin de moi l'idée de m'engager dans une série d'évènements louches. Étrangement, quand j'ai rencontré un groupe d'élèves de mon â...