Chapitre 22

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ATHENA

Il fait sombre et froid.

Ces deux facteurs s'expliquent par le fait que j'ai un bandeau devant les yeux et que je suis toujours vêtue de mon short et débardeur de pyjamas.

Quand des personnes viennent vous kidnapper, elles ne prêtent pas attention à votre confort personnel où à la manière dont vous êtes vêtus. Il n'y a aucun bruit. Le silence, je ne l'explique pas. J'ai perdu connaissance sur le trajet après que l'un de nos ravisseurs, un homme très peu patient, m'ait donné un coup sur la tête, là où dans la chambre d'hôtel, je me suis pris un vase.

Je ne sais pas où est Daria. C'est ce qui m'inquiète le plus. J'ai beau hurler son nom de toutes mes forces, elle ne répond pas. Mon cœur bat la chamade tandis que j'essaye de me rappeler l'entrainement que mon père m'a fait subir.

J'avais douze ans et une nuit, j'ai été réveillé par John qui me menaçait avec une arme. C'était un exercice d'agent. Les recruteurs observent la manière dont les futurs agents réagissent à l'imprévu. À douze ans, j'ai dû monter dans une camionnette les yeux bandés à observer le moindre mouvement de la voiture. J'ai dû apprendre à faire confiance à mes autres sens et à m'en sortir sans mes yeux et sans mes mains. La plupart des agents mettent environs trois heures avant de se libérer de leurs kidnappeurs. Trois heures, c'est long. Il m'a fallu 16 heures, pour me libérer des liens de mon père et sept heures encore pour retrouver le chemin de la maison. Je me rappelle encore du dégout qui a traversé le visage de mon père quand il m'a vu couverte de boue, de bleus et de sang. Il ne m'a pas félicité d'avoir réussi son exercice. Il m'a frappé en me disant que si je voulais survivre, je devrais faire beaucoup mieux que ça.

Je ne sais pas depuis combien de temps on nous a emmenés, si cela fait des jours ou des heures. Je n'en sais rien. Je tente de dégager mes mains des liens qui me rattache à une chaise. Le contact de la corde frotté contre ma peau me brûle, mais je ne fais aucun bruit. Si quelqu'un m'observe, il ne doit pas savoir ce que je trafique.

Ce que je sais pour le moment, c'est que je me trouve dans une grande pièce épurée. Lorsque je hurlais le nom de Daria, j'entendais ma voix se répercutait contre les parois. Une odeur salée me caresse les narines chaque fois que je hume l'air. À moins que nous nous trouvions dans un manoir peu meublé et que mes geôliers ait un petit creux, nous nous trouvions probablement près de la mer, dans un entrepôt vide. Nous sommes sur les docks.

Je ne sais pas exactement, quel chemin sera le plus rapide pour retrouver Rio ou une station de police, mais je sais que je peux y parvenir. Je me sens déjà mieux maintenant que j'ai des indications sur le lieu où je me trouve. Il ne me reste plus qu'à me libérer, trouver ma meilleure amie et foutre le camp d'ici. Je continue de frotter mes mains entre elle pour détendre les liens quand le bruit de bottes sur le ciment me parvient de loin. Je m'immobilise. Je sens la présence de la personne à ma gauche. Elle ne dit rien, mais me fixe.

Le visage de Rio se dessine derrières mes paupières closent. Ses yeux verts, ses cils charbonneux, sa mâchoire définit, ses lèvres pulpeuses. Je me demande s'il sait ce qui m'est arrivé et comment il a pris la nouvelle. Je me demande s'il essaye de me trouver ou si finalement l'idée de me voir partir le soulage. Mes sentiments à l'égard de Rio ont changé, mais ça ne veut pas dire que les siens pour moi sont différents. J'ai bousculé son train de vie, je me suis invité chez lui, dans son intimité et celle de ses amis. Je comprendrai qu'il ne vienne pas me secourir. Personne ne l'a fait dans le passé.

Je suis replongée dans l'instant présent, quand l'ombre se rapproche de moi et s'empare délicatement de l'une de mes tresses.

_ Tu sens bon, me dit un homme, la voie bourrue.

L'Agence 1.0Où les histoires vivent. Découvrez maintenant