Chapitre 31

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RIO

Je savais qu'elle ne m'écouterait pas. Elle ne le fait jamais.

Lorsque Paris m'a appelé, j'étais déjà en chemin pour la maison de John. Je ne suis pas surpris de la voir crocheter la serrure et entrer comme si de rien n'était. Elle est partie le matin même et pourtant le fossé qui s'est creusé entre nous me donne l'impression que ça fait des mois.

Je ne voulais pas lui faire de mal, mais il faut croire que je ne suis pas plus doué aujourd'hui qu'à l'époque pour prendre soin des gens que j'aime. Paris m'a dit qu'elle avait laissé la chambre d'hôtel dans un état démentiel et qu'il y a de fortes chances pour qu'elle ne soit plus en maitrise d'elle-même. Il m'a demandé de la laisser respirer, de lui laisser de l'espace. Je refuse. Je me moque de ce qu'il pense être le mieux pour elle, je sais qu'elle aura besoin de moi, même si elle ne le sait pas encore.

J'entre dans la maison cinq minutes après son arrivée. J'ai dû vérifier que le périmètre était bien sécurisé. Max m'a montré les photos du corps de John avant qu'il ne soit jeté dans la fosse commune de l'Agence, un endroit absolument confidentiel dont la plupart des agents ignorent l'emplacement. Je suppose qu'il savait que je ne le croirais pas sur parole et qu'Athéna aura besoin de preuve. J'ai ces photos dans la voiture et je comptais lui donner avant qu'elle ne décide de partir en exploration dans la dernière maison de John.

Le rez-de-chaussée est vide et pouilleux. Je suppose que c'est un miracle que John ait réussi à se cacher dans un endroit pareil assez longtemps sans qu'on ne le retrouve. Je reste en bas un long moment. Je n'ai prévu aucun plan pour supplier Athéna de me pardonner. Il faut qu'elle comprenne pourquoi je ne lui ai rien dit. Il faut qu'elle sache que tout ce que je fais depuis le début de cette mission a pour seul et unique objectif de la protéger. Je ne veux que ça et son bonheur. Alors si elle souhaite vraiment ne plus m'avoir dans sa vie, je m'éloignerais juste assez pour qu'elle ne me remarque pas. Mais je serais toujours là. Je ne me pensais pas capable de m'attacher à une personne en si peu de temps et de manière exponentielle. J'ai l'impression que plus le temps passe, plus je tombe plus loin dans des sentiments que j'ai trop peur de nommer. J'ai été un lâche dans le passé, mais je ne le serais pas maintenant.

Du verre qui se brise me ramène à la réalité. Je grimpe rapidement les marches et retrouve Athéna dans la chambre au bout du couloir. Elle est agenouillée autour de morceau de verre, les mains couvertes de sang. Elle pleure. Je ne l'ai jamais vu pleurer.

Elle n'arrive presque plus à respirer tandis que son corps est parsemé de spasmes. Elle ne réagit même pas lorsque je m'agenouille à côté d'elle. Du verre entaille ma paume, mais la douleur n'est rien en comparaison de ses pleurs. Je me cale contre le mur et la place entre mes jambes de manière a ce que son dos repose contre mon torse. Je l'entoure de mes bras et ne la relâche pas. J'aimerais la protéger du mal qui la ronge, mais je ne le peux pas. C'est à elle seule d'affronter ce qui la tourmente. Mon rôle à moi, c'est de la serrer dans mes bras en attendant qu'elle y parvienne.

_ C'est bon, je lui murmure. Tu peux lâcher prise, je suis là.

Je pose ma tête contre le mur et lui murmure un tas de choses sans importance à l'oreille. Les minutes défilent et aucun de nous ne bouge. Athéna pose sa tête contre mon torse en dessous de la mienne quand ses pleurs deviennent des râles de douleurs. Le silence envahit la maison de John, mais il ne me dérange pas.

_ Pourquoi... tu ne m'as rien dit ? elle demande d'une voix rendue rauque par ses cris.

Je prends une profonde inspiration. C'est le moment d'être honnête Rio.

_ Je savais qu'apprendre ça te ferait du mal. Je n'ai jamais voulu que tu souffres Athéna. Je voulais... je devais te protéger et j'ai échoué. Je voulais être là pour toi parce que...

L'Agence 1.0Où les histoires vivent. Découvrez maintenant