Casse-Noisette : Une histoire réinventée

Chapitre 12 : Confidences :

Plusieurs minutes venaient de passer, depuis que la barque avait quitté l'embarcadère et emmené loin de Tart'Amandine les deux partenaires en quête de la Fée Dragée. Bercés par les doux courants du fleuve, ils avançaient petit à petit au sein de l'immense forêt de menthe. Si leur avancée physique se profilait bien, il n'en était pas de même pour leurs facultés sociales qui faisaient profil bas. Une main sur le menton, la tête regardant ailleurs, Clara poussa un profond soupir, signe que son ennui n'était que plus profond. La glace n'était pas brisée entre Casse-Noisette et elle. Au contraire, elle prenait plus d'ampleur qu'elle ne fondait. La fille ne savait pas quoi faire. Lorsqu'elle regardait Casse-Noisette, il lui adressait à peine un regard, plongeant dans ses pensées en renfermant son visage. Après plusieurs heures à voyager avec lui, elle avait fini par comprendre comment le cerner avec ses émotions. Il était un livre ouvert. S'il était heureux ou excité par quelque chose, il respirait la joie de vivre et son visage de bois s'illuminait même quand les rayons du soleil avaient disparu. Mais s'il était nerveux ou en colère, il suffisait d'entendre le ton de sa voix et le regard de ses yeux verts pour le comprendre sans ajouter plus de mots. Attitude que prenait le soldat en ce moment-même.

Malgré ce silence pesant, Clara ne parvenait pas à mettre de l'ordre dans ses pensées. En particulier vis-à-vis de Casse-Noisette. Était-il en colère contre elle ? Très probablement. Il est vrai qu'elle n'avait pas été très tendre un peu plus tôt avec lui. L'accuser de mentir pour cacher plus de choses le concernant malgré sa vraisemblable sincérité ne l'avait pas enchantée plus que cela, n'aimant pas cette attitude alors que la situation était critique. Mais était-ce vraiment une raison pour bouder aussi longtemps ainsi ?

Un bruit caractéristique la fit sortir de ses pensées. Son téléphone, miraculeusement toujours fonctionnel, sonnait discrètement pour lui signaler un nouveau message. Sortant l'objet électronique du réticule, son destinataire était toujours le même depuis le début de la quête.

« D ».

D : Tu devrais t'excuser envers ton ami pour ton comportement. Ce n'est pas une bonne idée que vous restiez fâchez aussi longtemps.

Clara : Je ne suis pas amie avec lui. Seulement partenaire temporaire. Et depuis quand vous m'espionnez ?

D : Depuis le début.

Clara : Vous êtes un vrai cinglé !

D : Peut-être. Mais jusqu'à maintenant, si j'étais un vrai « cinglé », je t'aurais livrée depuis bien plus longtemps que cela au Roi des Rats. Ta signalisation est facile à indiquer. Et les rats n'auraient pas mis longtemps à te trouver.

Clara : Qu'est-ce-qui me prouve que ce n'est pas vous qui m'avez indiqué ma position quand j'étais à Paindépis ?! Et condamné un village entier par la même occasion ?!

D : Comme je te l'ai dit, je ne vois pas l'intérêt à l'idée de te livrer. De plus, les rats ne supportent pas vraiment les odeurs fortes.

Clara : Ça ne m'aide pas à savoir si c'est vraiment vous le responsable ou non !!

D : En effet. Je ne peux te prouver en ce moment mon innocence. Mais je pense surtout qu'actuellement, tu devrais parler avec Casse-Noisette.

Clara : Et pourquoi je devrais parler avec lui ?

D : Tu n'aimes pas ce monde. Car il te rappelle tes vieux démons.

- Non mais de quoi je me mêle ??!!

Clara hurla si fort et se leva si précipitamment du bateau qu'elle manqua de faire chavirer l'ensemble des passagers. D'ailleurs, elle tangua si fortement qu'elle manqua elle-même de tomber, et ne devait sa place dans la barque que grâce à la main tendue de Casse-Noisette venue instinctivement tenir la sienne. Trouvant un point d'équilibre, les deux acolytes purent se rasseoir dans la chaloupe qui se laissait toujours porter par le calme du fleuve. Bien que le danger de tomber par-dessus bord était temporairement écarté, ni l'un ni l'autre ne se quittait du regard pendant un instant. Étais-ce dû au fait que l'un comme l'autre pouvait avoir une réaction risquant de causer un désastre ? un nouveau silence s'installa tandis que le jeu de regard continuait.