Casse-Noisette : Une histoire réinventée

Chapitre 19 : La valse

- Danser ? Vous êtes sûr de vous ?

- Parfaitement ! Venez !

S'aidant de la main tendue par le soldat pour se relever, celui-ci l'entraîna au centre de l'immense pièce dans laquelle ils se trouvaient. Il s'amusa à la faire tourner, avant qu'il ne reparte en direction de la porte par laquelle ils espionnaient les invités.

- Comment pourrions-nous danser sans musique ?, demanda Clara.

- Contrairement à ce que vous pourriez penser, le Château de Cristal est très sonorisé ! Surtout lorsqu'il s'agit des musiques ! Cela résonne dans presque toutes les pièces du palais !

- Pratique pour savoir ce qu'il se trame en bas, mais pas terrible pour dormir. J'aurais dû demander des bouchons d'oreilles si j'avais su...

- Cela doit vous paraître déroutant, c'est certain. Mais ce qui est sûr, c'est que dans notre cas, nous pouvons à peine ouvrir la porte que nous entendrons toute la musique de la pièce à côté !

- Mais... les invités ne risquent pas de nous demander ce que nous faisons là, au lieu d'être avec eux ?

- Honnêtement, je pense que nous sommes actuellement les cadets de leurs soucis. Ils dansent avec la Fée Dragée, nous sommes invisibles dans cette salle de bal. Alors, autant profiter d'avoir une salle pour deux !

- Mais... Je ne comprends pas ce que vous voudriez danser ?

- Et si je vous proposais un défi ?

- Pardon ?

- Parfaitement ! Je n'ai pas eu l'occasion de vous voir danser dans la salle de danse, plus tôt dans la journée ! Alors pour y remédier, je vous mets au défi de me suivre au son de la musique ! Je jugerais ainsi votre façon de faire !

- Oh ! Vous êtes vraiment sûr de pouvoir tenir le rythme ?!, dit la brune avec un léger ton de défi dans la voix. Parce que même si j'ai repris récemment, je ne compte pas me laisser faire !

- C'est parfait dans ce cas ! Car je ne compte pas me défiler non plus !

Un son puissant retentit dans la pièce. Tonitruant, réjouissant, et terriblement entraînant. Comme si des hommes venaient danser la kalinka en démontrant leur joie avec fierté dans une rythmée absolument saisissante. Casse-noisette expliqua alors :

- La Trépak. La danse préférée du Prince Chocotoff.

Sans perdre une seconde, lui aussi se mit à bouger au rythme de la musique. Ses articulations en bois gesticulaient partout dans l'air, ce qui faisait sourire Clara de toutes ses dents. Il était gracieux dans un sens, mais donnait terriblement envie à Clara de rire de bon cœur tant cette situation lui paraissait à la fois si bon enfant et pourtant tellement dénuée de sens. Elle se demandait par plusieurs moments de quelle énergie ce soldat pouvait se ressourcer pour la dépenser encore et encore. Même si par moment la brune crut que le soldat tournait sa tête à 360° comme un patin de bois possédé, elle se reprit vite lorsqu'elle le vit s'arrêter non loin d'elle, lui faisant un geste :

- À vous, maintenant !

- Quoi ? Vous êtes sérieux ?

- Je le suis ! Ne vous défilez pas ! Lâchez-vous ! Montrez-moi ce que vous valez ! Car je sais que vous en êtes capable !

Encouragée par ce défi, elle se mit à exécuter pirouettes et pas chassés, comme lors de sa renaissance en danse dans la salle de son hôte. Elle ne savait pas danser comme son acolyte, mais une part d'elle n'avait pas la moindre envie de rejeter ce petit défi enfantin qui la faisait vivre en ce moment-même. Bien que ses chaussures actuelles étaient loin des pointes qu'elle a pu porter quelques heures plus tôt, l'envie de danser était plus forte que la raison. Et tant pis si elle avait des ampoules aux pieds ! Suivant son instinct et son oreille musicale, malgré qu'elle ne connût nullement l'air sur laquelle elle s'était lancée, elle tourna, tourna, encore et encore. Se servant de ses connaissances en danse classique pour éviter d'avoir la tête qui tourne. Et malgré les pauses dans ce battle de danse improvisé, les deux amis se mirent à tourner ensemble. Et par moment, le soldat servait de faire-valoir pour que Clara puisse exécuter des pas plus poussés qui nécessitait un certain jeu de jambe. Un genou à terre, il posait ses mains en évidence pour que Clara s'en serve comme d'une barre de danse basse et puisse lever la jambe en un joli mouvement gracieux et rapide. Et ce, plusieurs fois d'affiler. Leurs regards se croisaient, quelques secondes, mais tellement la musique les entraînaient, cela ne durait jamais bien longtemps.