Hôtel La Villa d'Ometa, chambre deux cent huit.
« — Elliot non ! Elliot ! Mon dieu !
Je cours dans la chambre de ma mère pour la réveiller.
— Maman ! Maman ! Réveille-toi, Elliot...il a un problème, il saigne maman. Viens vite ! Maman ? Maman ?
Je la secoue pour qu'elle se réveille, elle est allongée sur son lit, on dirait qu'elle dort.
— Maman ! Réveille-toi, Elliot saigne maman, il s'est accroché au plafonnier ! Je ne sais pas comment il a fait mais...
Je recule car en posant la main sur le bras de ma mère, je constate qu'il est froid, je détaille son visage, puis son corps. Elle est dévêtue, du sang est présent entre ses cuisses.
— Maman, tu saignes toi aussi, dis-je en revenant vers son visage.
Ses yeux viennent de s'ouvrir, ses globes oculaires sont rouges, des larmes de sang s'échappent du coin de ses yeux, longeant ses tempes. Elle me regarde puis je vois qu'elle commence à me sourire.
— Maman ?
Elle part dans un grand rire et son visage se disloque. Je hurle de terreur. »
Je me retrouve debout à côté du lit, les mains sur les oreilles, je ne sais pas si j'ai crié. Je ne pense pas. Depuis que j'ai assisté à l'exécution de ce type, mes cauchemars ont pris une autre tournure, tout ce mélange dans ma tête, des visions d'horreur se succèdent. Je redoute mes nuits de plus en plus, préférant les passer dans les bras d'un mec, qui peut me faire oublier pour un temps, ce qu'est devenue ma vie. Mais pour l'instant, je ne peux plus faire de speed dating, je dois la jouer discrète, me fondre dans la masse. Devrais-je quitter la Sicile ? Mais pour aller où ? Et puis, mon oncle aurait plus de facilité à me retrouver si je sors de ce pays. Non décidément, la meilleure solution est d'essayer de retrouver la famille de ma mère, en espérant être accueillie les bras ouverts, même si d'après ce que j'ai compris, se marier avec un policier a été considéré par sa famille comme une trahison. Elle n'aurait pas dû épouser un « infâme » comme ils l'auraient surnommé aux dires de ma mère.
Je récupère mon portable, vérifie l'heure. Waouh, j'ai dormi presque cinq heures, juste après mon repas. Il est déjà dix-sept heures. J'ouvre internet et commence à taper dans la barre de recherche le nom de jeune fille de ma mère, Conti, puis viticulteur, on ne sait jamais. Les premières lignes ne me donnent pas ce que je veux. Il y a Conti Monaco, les machines à expresso. Tiens, je n'y avais pas pensé. Puis, Albert Conti, né en dix-huit cent quatre-vingt-sept, décédé en dix-neuf cent soixante-sept, un acteur autrichien, de ce que je peux en lire, donc rien à voir avec un vigneron. Mais encore mieux, Conti tout le confort de l'habitat ! Flute, ça me gonfle. Je vois que des Conti, il y en a autant qu'un curé peut en bénir. Je rajoute Sicile à ma recherche et là, bingo ! Domaine Conti, producteurs. Leur production est faite de vins puissants à forte personnalité au bouquet fruité et floral. Tu m'étonnes forte personnalité ! Ils ont viré ma mère !
Je cherche l'adresse du domaine et finis par la trouver. Elle se situe à Avola, dans la province de Syracuse, Avola est célèbre pour le vin Nero d'Avola. En fait, la première greffe de la vigne a été faite sur le territoire de la commune. Ok, je crois que je viens de retrouver ma famille ! Je recherche sur la carte de la Sicile où je me situe par rapport à leur position, ça fait froid dans le dos. Si je dois y aller à pied, je ne suis pas près d'arriver. Deux cent soixante-quinze kilomètres, soixante-quatre heures de marche, soit pratiquement trois jours sans s'arrêter ! Va falloir que je trouve un autre moyen. Je peux y aller en bus, le premier fait un arrêt à la station de bus de Syracuse, après trois heures de route, mais celui m'amenant jusqu'à Avola ne prend la route que le lendemain à cinq heures. Si je ne veux pas l'attendre et partir à pied, j'en ai encore pour cinq heures de marche alors que le bus, ne mettra que quarante minutes. Le problème, c'est que je risque d'être repérée dans un bus. Si peu que je tombe sur des habitués, ils vont de suite savoir que je ne suis pas du pays. Je ne doute pas que les personnes à ma recherche, ne mettront pas longtemps à me retrouver. Purée de moines, que faire ? Je crois que je n'ai malheureusement pas beaucoup de solutions, il faut que j'aille m'acheter de quoi me nourrir pendant une semaine et je vais devoir prendre la route à pied. De toute façon, je n'ai plus rien d'autres à faire alors, ne dit-on pas que les voyages forment la jeunesse ? Ils risquent de m'user les pompes également.
Je regarde les chemins de traverse qui ne longent pas les routes principales, notant tout sur une feuille de papier, petit calpin mis à ma disposition pour noter ma satisfaction ou non, des services de l'hôtel. Au départ, je me suis dit que mon portable serait mon GPS, mais au bout de deux jours, je crois que la batterie aura rendu son dernier souffle, me laissant sans indication. Le papier sera plus utile, je ne me vois pas demander la possibilité de le recharger dans un endroit public alors que j'aurai tout fait pour passer incognito.
Un coup frappé à la porte me fait sursauter, je m'avance vers celle-ci, à pas de loup, colle mon oreille à la porte. Rien. Un autre coup suit.
— Mademoiselle, je viens vous apporter vos vêtements propres.
Ok, service rapide. Je déverrouille pour pouvoir la laisser entrer.
— Excusez-moi, j'étais dans la salle de bains.
S'il y a un menteur, il n'est pas loin.
— Vous avez été rapide. Merci pour votre efficacité.
— De rien Mademoiselle, bonne fin de journée.
— Merci, bon courage à vous.
Je referme après avoir récupéré mes fringues de ses bras, les pose sur le lit, vire le peignoir et les enfile dans la lignée. Toujours être prête, on ne sait jamais. Je range mon portable dans mon sac à dos avec ma feuille de papier, je pose le tout sur la chaise près de la fenêtre puis ouvre cette dernière en grand, respirant cet air marin dont je ne me lasse pas, avant de quitter cet hôtel.

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Anime Perdute
Ficción GeneralOn ne pense pas toujours que le loup peut être dans la bergerie, on l'apprend à ses dépens. Fuir un loup pour tomber dans la tanière d'un autre, est-ce mon destin ? Lequel des deux me stoppera ? Lequel des deux me retirera le droit de respirer ? Fui...