¹¹ 𝐌𝐨𝐬𝐜𝐚𝐭𝐨

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Plantée devant son casier, Hana écoutait d'une oreille absente le monologue de Sora Amano

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Plantée devant son casier, Hana écoutait d'une oreille absente le monologue de Sora Amano. Cette dernière avait passé un week-end palpitant à Tokyo, et à chaque fois qu'elle croisait l'une de ses amies dans les couloirs de l'établissement, l'étudiante devait bien évidemment le leur raconter. Dans les moindres détails. Détails qu'Hana avait la joie d'entendre pour la troisième fois au moins de la matinée.

Hana bâilla d'ennui, mais ni Amano ni ses amies n'y prêtèrent attention. Elles étaient toutes bien trop obnubilées par leur discussion pour réaliser que quelqu'un n'écoutait pas. Personne ne se rendit donc compte du regard complice qu'Hana échangea avec un autre étudiant qui passait par là, et personne ne fit le lien entre le message qui fit vibrer son portable et l'excuse bidon que la jeune femme inventa afin de s'éclipser.

D'un pas tranquille pour ne pas trop se faire remarquer, Hana sortit du bâtiment principal et le contourna. Sur son chemin, elle croisa une petite poignée d'élèves en passant à proximité du distributeur, mais aucun d'eux ne s'interrogea de la direction qu'elle prenait, ni même du fait qu'elle était la seconde personne en moins de cinq minutes à se diriger vers l'allée goudronnée que tous savaient condamnée.

Ce lieu, Hana l'adorait depuis la fois où elle l'avait découvert. Lorsque le temps le permettait, elle s'y réfugiait durant ses pauses afin d'admirer les jolies fleurs qui y avaient élu domicile. Elle préférait nettement la compagnie de ces charmantes plantes à celle de ses camarades un peu trop superficielles. Alors, dès qu'elle le pouvait, la brune balançait le premier mensonge qui lui venait à l'esprit pour s'y rendre.

Cependant, Hana n'était pas la seule à profiter de la quiétude de ces lieux. Un autre s'y trouvait souvent déjà lorsqu'elle débarquait, un tube orangé sur les lèvres et une lueur narquoise au fond de ses prunelles translucides. L'addiction à la nicotine poussait Keisuke à se rendre régulièrement dans ce cul-de-sac. Et si au début, la présence d'une intruse l'avait agacé, la donne avait bien changé depuis qu'un certain secret les liait.

Plusieurs semaines s'étaient écoulées depuis leur retenue à la bibliothèque. Ni l'un ni l'autre n'avaient pris la peine de revenir sur ce qui s'était passé. Et au fond, ils n'en avaient pas vraiment eu besoin ; les choses entre eux avaient pris une tout autre dimension sans qu'une discussion ne soit nécessaire, et les conditions de leur petit arrangement étaient plus que claires : pas de sentiments. Inutile de gaspiller sa salive en le disant à voix haute.

Une sorte de routine s'était installée entre eux. Dans les couloirs, chacun d'eux ne s'adressait jamais plus qu'un furtif coup d'œil. Ils agissaient comme si de rien n'était, comme deux personnes qui ne se connaissaient absolument pas. Mais à l'abri des regards, dans une salle de classe vide ou dans un coin reculé de l'établissement, la donne était bien différente. L'idée qu'ils puissent se faire prendre à tout moment ne rendait leur petit jeu que plus divertissant, les obligeant à se montrer de plus en plus inventifs pour n'éveiller les soupçons d'aucun de leurs camarades.

Âmes en peineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant