Chapitre 26 / LA CHANSON D'HÉLÈNE (partie 2)

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...

Avant dans la maison
J'aimais comme nous vivions
Comme dans un dessin d'enfant

Tu ne m'aimes plus

Je regarde le soir
Tomber dans les miroirs
C'est ma vie

C'est mieux ainsi Hélène
C'était l'amour sans amitié
Il va falloir changer de mémoire

Je ne t'écrirai plus Hélène

L'histoire n'est plus à suivre
Et j'ai fermé le livre
Le soleil n'y rentrera plus

Tu ne m'aimes plus ...

C'est sur ces derniers mots qui me font l'effet d'une morsure que se termine cette lettre. Plus je la lis, plus il me semble que le style d'écriture se calque sur celle d'un homme dont j'ai déjà à maintes reprises parcouru les lignes. Mais quand au bas de la page les initiales E.H marquent à l'encre noire la fin de cette complainte, cela devient une évidence...

Il s'agit d'Ernest Hemingway mon aïeul et cette Hélène ne peut être que Hélène Lagonelle qui fut, le temps d'une éphémère saison la mère biologique de cette grand-maman qui me berçait si tendrement lorsque j'étais enfant.

Rappelez-vous ...

Hélène,
celle qui ne verra jamais plus sa fille grandir !
Celle, qui confira son unique enfant à l'amie de son amant,

Celui qui ne l'aimait plus !

Et se laissera cueillir par les eaux glacées de la Seine, où désormais elle repose comme l'inoubliable enfant des Capulet, qu'un éternel amour déchu a laissé sombrer dans l'oubli du passé...

Gertrude Stein, se chargera de l'éducation de la fillette et à la mort d'Hemingway, qui n'aura été pour elle qu'un père toujours absent. Elle se verra devenir la maîtresse de ce lieu.

La Péniche !

Le refuge de cet amour impossible entre un écrivain perdu au milieu des rôles controversés de ses personnages et une jeune femme, que les souvenirs d'un lointain Vietnam a rendu mélancolique au point d'en oublier de vivre.

En souvenir de cette mère, «  la petite orpheline d'Indochine » et en hommage à ce père qu'elle n'avait fait que croiser, elle baptisera la péniche du nom de cet amour perdu et oublié,

L' HÉLÈNE - WAY

... /...

Je dirais que mon passé me poursuit ou plutôt me rattrape ! Que je sois sur les bords de la Loire ou sur les bords de la Marne, il y a toujours un fleuve qui me conduit quelque part et je me sens soudainement troublée.

Troublée au point de verser des larmes, au point de perdre mon assurance et de me laisser aller dans les bras de Sadeck. La tête sur son épaule je me laisse emportée par une infinie tristesse et c'est le cœur et les yeux pleins de larmes que je me laisse tendrement câliner par cet homme qui compte énormément pour moi.

LES AMANTS DE SAÏGONOù les histoires vivent. Découvrez maintenant