PROLOGUE

497 70 238
                                    

— C'est bientôt fini, petite sœur.

En effet, le vacarme cessait depuis plusieurs minutes. Là, sous la table, deux jeunes filles se cachaient. La plus âgée des deux étreignait de ses bras la plus jeune.

Des bruits de pas se précipitèrent dans le couloir. Puis, la poignée de la porte tourna lentement. Les jeunes filles reculèrent sous la table, effrayées.

La silhouette d'un homme se dressait dans l'encadrement. Ses iris dorés brillaient ardemment dans la pénombre, et sa bouche, entrouverte, dévoilait des canines monstrueusement énormes. Un liquide pourpre ruisselait depuis la commissure de ses lèvres, et se déversait sur le torse de sa chemise déchirée. Poing serré et doigts crispés, il s'avança en titubant, comme s'il empoignait un objet précieux.

Quand il aperçut les deux jeunes filles, ses yeux s'humidifièrent. Il tomba à genoux face à elles.

— Papa ! s'exclamèrent ces dernières, rassurées de le voir.

Elles abandonnèrent leur cachette pour se précipiter dans ses bras. Brusquement, elles se rétractèrent, préoccupées de son état.

— Papa, que s'est-il passé ? s'enquit la plus âgée des jeunes filles.

Elle savait que son père ne se métamorphosait que très rarement, mais ce n'était pas cela qui inquiétait l'aînée de seize ans. C'était ce sang, encore frais, qui n'était pas le sien.

— Je suis tellement désolé, mes filles, lâcha-t-il les larmes roulant sur ses joues. Pardonnez-moi... mais je dois le faire avant qu'ils arrivent.

Il posa sa main sur la plus jeune, âgée seulement de dix ans. Les paupières de l'homme-métamorphe se fermèrent, et nous n'entendîmes plus que ses respirations lourdes. Après un long moment, la plus petite perdit l'équilibre. Elle s'écroula dans les bras de sa grande sœur, le regard livide.

— Mais qu'est-ce que tu as fait ? s'alarma l'ainée.

Ils entendirent des hurlements lointains.

— C'est trop tard, murmura le père.

L'homme-métamorphe se précipita en trombe vers son bureau. Il farfouilla à la hâte dans ses tiroirs, puis manipula quelque chose pendant un certain temps. À la suite de cela, il saisit un parchemin pour y inscrire quelques lignes tandis que la jeune fille secouait la cadette.

— Kara, réponds-moi ! implora la grande sœur.

— Sara, écoute-moi ! s'écria gravement le père en s'adressant à l'ainée. Partez ! Ne leur dis rien, ne...

Un homme fit irruption dans la pièce. Une cape en fourrure animale recouvrait ses épaules, et son regard, sombre, dévisagea les deux filles. Ses yeux se posèrent sur l'homme-métamorphe.

Ce dernier se rapprocha de lui.

— Mon ami... Tu sais ! clama le père. Ce n'est pas...

Sans crier gare, l'homme à la cape planta profondément ses ongles dans le ventre de l'homme-métamorphe. Frappé par l'effroi et la stupeur, il contempla le bras de son ami plongé dans son abdomen.

Le père ne lutta pas. Un râle s'échappa de ses lèvres, et ses énormes canines se rétractèrent. Même ses yeux, dorés, redevinrent de cette couleur noisette.

Un autre homme pressa le pas, juste derrière celui à la cape. Une moustache grisonnante couvrait sa lèvre supérieure, et il revêtait une armure digne des chevaliers d'antan. De ses deux mains, il empoignait vigoureusement un katana ensanglanté, dont le pommeau s'ornait d'un diamant bleu scintillant à la lueur de la pièce.

GUILDE : HéritageOù les histoires vivent. Découvrez maintenant