Chapitre 5 - Tom

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A peine sorti de classe, Max s'est fait un malin plaisir à me matraquer avant de m'emmener en isolement pour je ne sais quelles excuses bidons. Je fulmine mais ne dis rien, je dois bientôt passer en commission alors je dois la jouer fine et me faire oublier. C'est pas gagné!

La vie ici n'est déjà pas facile, mais l'isolement c'est pire que tout. Enfermé dans 2m2, sans lumière, ni fenêtre, aucun contact avec l'extérieur, aucune sortie, aucun confort. On dort à même le sol en face d'un chiotte et d'un lavabo qui n'ont pas vu de désinfectant depuis des années.

On perd vite la notion du temps dans ces conditions, je ne sais pas quel jour ni quelle heure nous sommes. J'attends, c'est tout ce que je peux faire. On ouvre ma porte, un maton entre. Je me lève en pensant que je vais enfin sortir.

- Bouge pas LeatherFace, murmure Paul.

Je le vois regarder derrière lui, comme s'il avait peur qu'on le surprenne. Je ne vais pas sortir aujourd'hui. A mon air dépité, il comprend.

- Désolé mec, on est seulement mercredi. Je venais juste te dire que Max avait été mis à pied pour son manquement hier. On ne peut pas lever ton isolement, une histoire de présomption, enfin tu vois. Tu vas faire la semaine mais ça ne devrait pas entacher ton dossier, ok?

Je hoche la tête et m'affale au sol, prenant mon mal en patience. Paul fait demi tour, je l'interpelle avant qu'il ne ferme et il me sourit comme un con, que je fronce les sourcils.

- Elle va bien, les ariens ont été dégagé de son cours et Sean et moi allons nous relayer pour la seconder, me lance t il avec un clin d'œil.

Je me sens con mais soulagé. Il n'ajoute rien et ferme la porte en se marrant. Je n'ai pas eue le temps de lui poser la question qui me préoccupait et pourtant il savait ce que je voulais. Si je deviens si transparent, ça craint. J'ai 4 jours pour cogiter la dessus, vous avez un peu de temps?

Je ne sais pas ce qui m'a le plus troublé hier, les hématomes qu'elle cachait sous un couche de fond de teint, la force qui émane d'elle, sa détermination, sa douceur ou sa bienveillance. Quand j'ai lu les quelques mots qu'elle avait écrit sur ma copie, cela m'a perturbé. Face à ma copie vierge, elle s'est inquiétée de savoir si je savais lire, si j'étais capable de comprendre ses consignes. C'était si ... adorable, que j'ai agi comme je le fais toujours, avec calme et maturité bien sûr!

Cette femme me touche bien plus que je ne veux le reconnaitre et c'est mauvais, très mauvais pour moi. Pourtant je ne peux m'empêcher de m'inquiéter pour elle. Les matons s'occupent de sa sécurité mais quand même ... Abel ne va pas en rester là. Le poing qu'elle lui a collé, aussi magnifique soit il, lui est resté en travers. Il va se venger et ça sera perfide, vicieux et douloureux. Je sais que Dan et James veilleront aux grains également mais ne pas le voir de mes propres yeux, ça me tord les entrailles. A moins que ce soit de ne pas la voir elle.

Je revois son visage apeuré lorsqu'elle a compris que je voyais ses marques. Est ce que c'est de moi qu'elle avait peur? Elle le devrait de toute évidence. Ou est ce qu'elle avait peur que je découvre son secret? Trop tard. Il faut que j'appelle Marco. Si c'est son mec qui la frappe, il le découvrira rapidement. Une fois que je saurai qui la blesse, je m'occuperai de son cas, c'est encore ce que je fais de mieux. Ses beaux yeux méritent de briller de force et de courage, pas de peur et de tristesse.

Les heures s'égrainent lentement, je ne dors presque pas. Mon corps entier est endoloris, je ne peux même pas m'allonger sans cogner dans un mur visqueux, j'ai froid et commence à avoir des hallucinations. Ma tête me fait sentir des odeurs délicates de miel qui sont bien loin d'ici. Mes oreilles me font entendre des mots que personne ne me murmure. Ma peau me fait sentir des mains qui ne sont pas là. Je ne sais même plus si mes yeux sont ouverts ou fermés dans cette obscurité constante.

- Eh LeatherFace, c'est l'heure. Allez, lève toi, tu sors.

J'ouvre les yeux, Paul a sa main sur mon épaule et me secoue.

- Je sais que c'est horrible, mais tu vas pouvoir te reposer. On est dimanche, tu as une petite journée de répit.

Je hoche la tête et me déplie en grimaçant. Je lui tends mes poignets, mais il secoue la tête et me fait signe d'avancer. Il devrait me menotter, mais il ne le fait pas. Il a confiance en moi, il me connait depuis assez longtemps pour savoir que je ne m'en prendrai jamais à lui sans raison. Je le suis à travers les différents SAS. Une fois dans ma cellule, je récupère de quoi me laver et me changer, chose que je n'ai pas pu faire depuis 4 jours et sans un mot pour mes amis, je me dirige vers les douches.

Une fois propre je m'allonge sur mon matelas de quelques centimètres d'épaisseur qui me paraît aussi confortable qu'un mémoire de forme. La cellule reste silencieuse, même si j'ai conscience de la présence de mes codétenus. Je m'endors rapidement, la main sur ma lame.

Une main sur mon bras me réveille en sursaut. J'ouvre les yeux brusquement, ma lame à quelques millimètres de la jugulaire de James. Je mets une seconde à reprendre mes esprits et baisser mon arme.

- C'est l'heure de manger mec.

- J'arrive, je marmonne en reposant ma tête sur le matelas.

James s'éloigne avec Dan, me laissant émerger seul. Je prends mon temps avant de rejoindre le brouhaha du réfectoire. Je m'installe aux côtés de James alors que Dan me regarde avec cette lueur d'inquiétude paternelle dans les yeux.

- Ça va, je gronde.

- Hmm... Tu rayonnes c'est clair, raille James que je fusille du regard.

Je vois Abel et Franck se diriger vers nous tout sourire tandis que mes jointures blanchissent déjà sous la pression que je leur impose.

- Tiens, tiens, tiens, un revenant, roucoule Abel. Tu sais qu'à cause de ta petite pute je n'ai plus le droit d'assister à ses cours. Je me demande bien comment je vais pouvoir faire pour la baiser. Elle a l'air si fragile, tu ne trouves pas? Je suis sur de la transpercer en un coup de rein.

Je me lève si brusquement qu'il n'a pas le temps de réagir. Ma main se referme sur sa gorge et je frappe son visage sur la table avec tant de violence qu'elle se brise en deux. Abel se redresse et m'envoie son poing que j'esquive sans problème. Ça fait 4 putains de jours que je n'ai pas pu bouger et me défouler alors autant dire que je me fais plaisir. James s'occupe de retenir Franck. Je dois faire vite, parce que le reste des nazis accourent au loin tandis que les gardiens se décident enfin à bouger. Je le frappe encore et encore. Mes phalanges s'écorchent contre son visage de raciste ignoble. On finit par nous séparer, Paul soupire en me regardant.

- Je vais devoir faire un rapport, tu fais chier LeatherFace. Ta commission est dans un mois, tu ne peux pas rester tranquille bordel.

Il grogne pour la forme, mais je sais que son rapport tournera en ma faveur. Je retrouve ma cage pour la nuit et attends le lendemain avec impatience. J'ai besoin de revoir son visage en cœur, mon souvenir d'elle s'estompe, je ne perçois plus la couleur exacte de ses yeux, ni de celle de ses boucles. C'est en imaginant son petit corps contre le mien que je sombre dans un sommeil réparateur.

Au delà des apparencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant