Chapitre 16 - Tom

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Julia est blottie dans mes bras mais ne répond plus quand je lui parle. Son souffle caresse ma nuque mais je le sens de plus en plus faible. Paul, devant moi, ne cesse de se retourner pour vérifier son état, ce qui m'angoisse encore plus. Une demi-douzaine d'afro à l'avant et à l'arrière nous escorte.

Nous avons traversé le premier couloir sans encombre, il reste un étage et 2 couloirs jusqu'au SAS de sécurité qui mènera les matons et Julia vers l'extérieur. On arrive à l'étage supérieur lorsqu'on rencontre les hispaniques. A la vue des afros, les insultes et menaces fusent. Ils sont en guerre depuis la nuit des temps.

Les hommes de Maverick derrière nous bougent pour rejoindre les autres à l'avant. Ils forment une barrière humaine devant nous lorsque je croise le regard de Pablo. Je ne sais pas si c'est mon expression anéantie, le désespoir dans mes yeux ou moi tout simplement. Mais lorsqu'il me voit, il se fige et fronce les sourcils.

- Qu'est ce que vous foutez là les Blacks? Et toi LeatherFace?, demande Pablo.

- C'est pas le moment, on reviendra vous démontez dans 5 minutes. Mais là va falloir nous laisser passer, répond Roy.

Alors j'ai une idée. Nous sommes tous ennemis. Mais cette jolie brune à réussi à atteindre le cœur des Blacks alors pourquoi pas ...

- Julia se vide de son sang, on doit l'évacuer de toute urgence, je tente.

Pablo fronce les sourcils et fait un signe à Maverick pour qu'il s'écarte. Il fait un pas sur le côté, exposant Paul qui s'écarte très légèrement pour que l'hispanique voit son visage aussi blanc que neige dans mes bras.

- Vous n'y arriverez jamais seuls. Les nazis sont juste à côté et ils étaient une vingtaine quand on s'est barré. Les gars, ce joli cœur doit sortir rapidos. Alors encerclé le diamant et on démonte tout ce qui passe jusqu'au SAS.

Les hommes de Pablo lui répondent en un cri de guerre et c'est réuni qu'on avance côte à côte à travers cet avant dernier couloir. Comme je m'y attendais, les hommes d'Abel sont placés devant les grilles qui mènent au SAS de sécurité. Mais ils ne sont plus qu'une dizaine, apparemment du ménage a été fait.

Maverick, Pablo et leurs hommes se jettent sur eux, les faisant reculer rapidement, nous permettant l'accès à la grille. Je cours avec Paul et son collègue. ce dernier déverrouille la grille alors que Paul me tend les bras pour récupérer Julia. Je grimace à l'idée de l'abandonner mais je ne peux pas l'accompagner. J'aimerais tellement rester auprès d'elle, juste le temps d'être sûr qu'elle aille bien. Je regarde Paul mais il secoue la tête.

- Tu sais bien que c'est impossible. Je vais en prendre soin, je te le promets, ok? On la sort de là, elle sera prise en charge par un médecin à l'extérieur et je te donnerai des nouvelles dès que j'en aurai. Mura, il faut que tu me la laisses, insiste t il.

- Tiens le coup Princesse.

Je dépose Julia dans les bras tendus de Paul. Le voir s'éloigner avec elle me brise un peu plus et je m'effondre à genoux devant la grille qui se referme.

- Allez, LeatherFace, il faut te battre, pour elle, me dit Maverick en me soulevant pour me remettre sur mes pieds.

Les forces de l'ordre reprennent le contrôle de la prison en fin d'après-midi. Nous sommes tous consignés dans nos cellules pour les 2 jours à venir. Les gardiens qui tournent n'ont aucune nouvelle de Julia ou ne veulent pas m'en donner. Je deviens fou à tourner en rond en attendant de savoir si elle est vivante ou non. James et Dan n'osent pas me parler et restent sur leur matelas silencieux.

Paul prend un tour de garde au milieu de la nuit. Quand il passe devant ma cellule, il secoue la tête.

- Désolé, toujours pas de nouvelle.

Je m'arrache les cheveux la moitié de la nuit avant de finir par sombrer. Le lendemain matin, le petit déjeuner est servi dans les cellules. Nous n'aurons le droit à aucune sortie pendant 48 heures. Ce qui implique également les douches mais surtout le téléphone!

Paul vient devant notre cellule et appuie sur sa radio pour répondre à l'un de ses collègues. Je suis allongé sur mon lit, les bras derrière la tête, mes yeux rivés sur les ressorts du matelas de James

- Tu peux répéter, s'il te plait?, demande Paul.

- Un mec qui s'appelle Marco a appelé à l'accueil pour prévenir que Miss Hendrix était sortie du bloc. Apparemment, elle est en salle de réveil et devrait s'en tirer.

- Merci Kenny.

La radio s'éteint et mon cœur redémarre. Je remercie Paul, qui n'était certainement pas autorisé à me donner ses informations, alors qu'il s'éloigne. Dan vient tapoter mon épaule en signe de réconfort.

- Ca va aller Gamin.

Je ne revois pas Paul avant le soir et n'ai donc aucune autre nouvelle de la journée. Quand il prend son service en milieu de soirée, il vient nous apporter nos plateaux.

- Dans 15 minutes je repasse, soit discret, j'ai besoin de mon boulot.

Je ne comprends rien alors je prends mon plateau et découvre un téléphone portable à la place de la bouillie habituelle. Mon rythme cardiaque s'accélère, je m'empare de l'objet tremblant. Je ne connais pas le numéro de Julia, de toute façon je lui dirai quoi? Salut c'est le mec qui t'a empalé sur une tige en ferraille, ça va, bien dormi? Mais Marco aura sûrement des nouvelles récentes alors c'est son numéro que je compose. Il répond à la 3ème sonnerie.

- C'est Tom, je chuchote. Comment elle va?

- Salut mec, elle s'est réveillée en début d'après-midi. J'ai appelé pour qu'on t'en informe mais...

- J'ai su qu'elle était sortie du bloc ce matin mais le maton qui m'aide vient seulement de reprendre sa garde. Elle ... est ce qu'elle...

- Elle a demandé de tes nouvelles, elle était inquiète pour toi. Elle ne se souvient pas de comment elle est sortie. Le médecin a dit qu'elle pourrait sortir demain si tout va bien. La plaie a été recousu et ils l'ont transfusé, aucun organe n'a été touché. Tom, t'es là?

- Ouais, je ... c'est cool.

- Pourquoi tu m'appelles avec un portable? Tu risques gros!

- On est isolé pour 48 heures à cause de l'émeute.

- Ah ok. Mais tu ne devrais pas rappeler demain, c'est trop risqué et elle va bien.

- Je n'en n'avais pas l'intention. Elle se porte mieux loin de moi.

- Qu'est ce que tu racontes? Tu lui as sauv...

- Je l'ai empalé sur une tige en ferraille alors ne dis pas de connerie, tu veux? Je dois te laisser.

Je raccroche précipitamment. Elle va bien, elle est vivante, elle va bien. Je répète ses mots en boucle. Je ne rappelle plus Marco et je reprends ma vie merdique. J'ai accepté de faire des radios pour mes mains. Le médecin a plâtré la gauche et mis une attelle amovible sur la droite.

Il se passe 10 jours avant que je ne la revois. Un gardien est venu me chercher pour un parloir, lorsque j'arrive dans le box indiqué, je l'aperçois. Elle est magnifique, elle porte un pull en laine qui épouse ses formes, ses boucles encadrent son joli visage qu'elle a légèrement maquillé. Son visage s'illumine lorsqu'elle croise mes pupilles. Elle ne devrait pas rayonner ainsi, pas à cause de moi. Je ne prends pas la peine de m'asseoir et décroche le combiné brusquement. Le sien est déjà contre son oreille alors je lui souffle avec hargne :

- Ne reviens jamais.

Et fais demi-tour sans un regard. Le gardien me regarde surpris mais se passe de commentaire. Elle mérite d'être heureuse avec un homme bien qui pourra la combler. Je n'ai rien à lui offrir à part de la souffrance et de la violence. Elle doit prendre ses distances et obstinée comme elle est, je vais devoir le faire moi même. Je me désinscris de ses cours. Je ne la reverrai plus jamais. Le cœur que je ne pensais pas avoir se fracasse avec douleur sur le sol mais mes plaies sont pansées par une image d'elle, entourée d'enfants qui lui ressemble dans une maison à la campagne. Elle mérite d'être heureuse.

Au delà des apparencesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant