Apryl

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Je me réveillai en sentant une respiration lente et régulière se mêler à la mienne. Surprise, j'ouvris brutalement les yeux, l'air affolé. Mais mon cœur se calma aussitôt lorsque je vis Julie, en équilibre sur les mains, ses paumes posées de chaque côté de ma tête. Un sourire éclatant illumina son visage.

Ça va, la Belle au bois dormant ? lança-t-elle avec malice.

J'allais répondre, mais elle me devança :

Tu as dormi exactement dix heures et quarante-cinq minutes.

Attends... quoi ? J'ai vraiment dormi tout temps ? questionnai-je, abasourdie.

Oui. Il est 21h50, le couvre-feu est déjà passé.

Julie fit le pont au-dessus de ma tête, se redressa souplement et commença à chanter d'une voix taquine :

Allez, allez, allez ! Un, deux, trois ! Apryl, réveille-toi ! Ça fait déjà dix bonnes heures que tu dors, dors, dors... On doit aller s'amuser dans une boîte de n—

Stop, stop ! Si jamais tu rates tes études, j'espère que tu n'auras pas l'idée de te lancer dans la musique.

Mais t'es méchante ! pleurnicha Julie en gonflant les joues.

Je la fixai avec un air vide, puis haussai les épaules. Elle me lança une robe noire, moulante, au décolleté plongeant, et déclara avec une excitation évidente :

Bref, on va en boîte. Prépare-toi vite !

Je lui jetai un regard blasé mais finis par céder. Je n'avais pas vraiment le choix si je voulais tisser une amitié.

Julie me lança un sourire espiègle, presque carnassier.

Ne t'inquiète pas pour ça... J'ai trouvé une sortie. Suis-moi.

Je n'eus pas le temps de répliquer qu'elle m'attrapa par la main et m'entraîna derrière le bâtiment A, celui où nous avions cours. Là, elle me montra une vieille grille en métal, rongée par le temps. Malheureusement, un cadenas la verrouillait solidement. Julie serra les poings, son visage s'assombrit, puis elle explosa de colère :

Putain ! Quel enfoiré, ce Malcolm !

Je l'observai silencieusement, incapable de trouver la moindre solution. D'ordinaire, c'était moi qui faisais des crises et qu'on calmait... Jamais l'inverse. Elle tenta alors de fracasser la grille avec ses talons. Soupirant, je fouillai dans mon sac et lui tendis un mascara.

Elle me dévisagea, hors d'elle :

Mais bordel, tu crois qu'on va casser une grille avec un mascara !?

Je restai imperturbable et répondis d'un ton calme, presque froid :

Ce n'est pas un simple mascara. C'est un modèle spécial, équipé d'un feu de charbon anthracite, renforcé par air comprimé. Suffisamment puissant pour faire fondre du métal de carrosserie... et certains aciers.

Julie me regarda, bouche bée, incapable de savoir si je plaisantais. Je repris d'une voix posée :

Et cette grille... je peux parier ma main qu'elle est en carrosserie.

Je repris l'objet de sa main tremblante, enclenchai le dispositif et une flamme bleutée jaillit, léchant le fer. Lentement, je traçai une ouverture grossière. Le métal ramolli céda sous mon coup de pied et un passage s'ouvrit.

Julie me fixa, abasourdie :

Je ne sais pas ce qui me choque le plus... Que tu trimballes une arme déguisée en mascara, ou que tu m'aies servi la définition exacte de Google.

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