Le Domaine du Possible-1 (Dark-Romantasy)

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♫ Le Palais-Royal est un beau quartier, ♪

♪ Toutes les jeunes filles sont à marier♫

...

— Il va pleuvoir.

Marie regardait l'ombre du Jardin du Temps Perdu plongée dans une terne lumière grise sous un ciel plombé. À qui parlait-elle ? Mystère. À elle-même sans doute. Pépé déteignait sur elle visiblement.

La jeune femme pressa le pas et traversa le potager à grandes enjambées pour trouver refuge à l'intérieur de la maison couverte d'un épais feuillage de vigne vierge et surmontée d'un toit d'ardoise luisante dans la lumière d'orage.

Elle resta un instant à observer les bourrasques de vent agiter les arbres et siffler dans les frondaisons.

Le paysage frissonnait.

Il n'y avait pas que l'orage qui grondait.

Le jardin pleurait son jardinier.

Marie ferma la porte et, panier de radis, d'asperges et d'artichauts en main, se dirigea vers la cuisine.

La maison des Hirondelles était une vieille bâtisse avec le confort d'une autre époque, parfois rudimentaire. L'air à l'intérieur était froid et humide à cette saison. La cuisine était une pièce au sol de pierre, au mur enduit à la chaux avec une antique cheminée, un potager hors d'âge et un fourneau en fonte. Quelques meubles en bois patinés agrémentaient le lieu. Une fenêtre à petits carreaux dispensait une lumière triste.

Marie posa son fardeau au bout d'une massive table.

— Bonjour.

Le vieil homme assis dans un fauteuil dans un coin ne sembla pas réagir. Son regard éteint était perdu dans une perpétuelle rêverie.

— Bonjour Pépé !

Un infime mouvement sur son visage indiqua qu'il avait entendu. Décidément Pépé n'allait pas mieux. Après l'agitation frénétique, il était tombé dans le mutisme et l'immobilité. La jeune femme observa le vieillard.

Elle se posait beaucoup de questions sur lui depuis son arrivée au Domaine trois mois plus tôt. Qui était-il ? D'où venait-il ? Qu'avait-il ?... et après un grand nombre de discussions lunaires avec lui, elle était arrivée à la question : De quand venait-il ?

Marie remarqua qu'il serrait un papier dans la main, une feuille couverte de son écriture tarabiscotée et illisible.

Une lettre.

Encore une.

Pour Rosemary, sans doute.

Elle prit le document sans qu'il réagisse.

Marie s'approcha de la fenêtre pour avoir une peu plus de lumière et tenta de décrypter ce qui était écrit.

Oui, c'était bien ça. Une lettre dont les seuls mots discernables étaient « Rosemary », ainsi que des déterminants, des conjonctions et beaucoup de verbes qui n'éclairaient en rien le contenu du texte. Des conjugaisons du verbe être, avoir, aller, faire...

Au moins, il écrivait sur du papier.

Il y avait de l'amélioration.

La jeune femme soupira. Devait-elle envoyer ça à Rosemary ? Pour quoi faire ? Elle baissa le papier et plongea son regard vers l'extérieur. Les jardins s'agitaient dans une image déformée par les carreaux de verre.