Petite note : désolée, mini chapitre...
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♫Si tu veux faire mon bonheur ♪
♪Marguerite, Marguerite, ♫
...
— Je...
Les mots moururent sur ses lèvres et s'effacèrent de son esprit. Rosemary émergeait lentement d'un néant brumeux tout juste consciente de la lumière bleutée qui perçait autour d'elle.
Aucune pensée
Aucun souvenir
Juste l'engourdissement et une douleur maintenue en cage qui attendait son heure pour fondre sur elle. Combien de temps lui fallut-il pour comprendre qu'elle avait les yeux ouverts ? Le temps était une notion qui lui échappait. Il n'y avait ni après ni avant, seulement un présent qui lui échappait.
Un plafond.
Elle ne le reconnut pas.
Une question.
Où était-elle ?
Elle était allongée.
Où ?
Dans un lit ?
Où ?
Elle bougea avec précaution.
Douleur
Engourdissement.
Son bras droit refusa tout mouvement.
Elle s'agita en vain. Son corps refusait de lui obéir. Un éclair de douleur traversa sa poitrine comme un coup de poignard. Le brouillard de sa conscience se déchira, lui livrant des bribes de sa situation.
Mauvaise
Catastrophique même.
Comment avait-elle pu oublier ses blessures ? Elle se concentra sur sa respiration, s'appliqua à inspirer lentement, souffler... et recommencer. Elle cligna des yeux. Si le voile s'était déchiré, son esprit en restait embrumé et ne lui avait pas apporté la réponse à « où » elle était. Ce n'était pas un cerveau qu'elle avait, mais de la purée de pois.
L'hôpital ?
Vu Monsieur Homont-Duprez, cela était peu probable. Il l'aurait laissée crever sur le tapis du salon plutôt que de lui donner le moindre soin. La jeune femme chercha à se redresser, sans succès. Son corps n'était qu'un mélange de douleur et d'engourdissement.
L'image d'une piqure administrée de force lui revint.
Ah.
Oui.
Le médecin.
Les De Fort-Tournivel.
L'enlèvement.
Sa main gauche se serra d'agacement.
Au moins, elle n'était plus chez les Homont-Duprez.
Ses doigts rencontrèrent de la résistance. Elle tenait quelque chose. À la raideur de ses articulations, sa main s'était crispée sur l'objet depuis un long moment. Tourner la tête sur le côté lui demanda un effort terrible qui lui arracha une grimace de douleur.
Elle ne tenait pas quelque chose, mais quelqu'un.
La main de Paul-Jean.
Son cœur se serra, l'air était épais.
Son fiancé se tenait assis à côté du lit, appuyé sur le bord du matelas, la tête posée sur son bras sur le drap, les yeux clos, la respiration imperceptible. Il dormait.
Que faisait-il là ?
Son visage exprimait une grande fatigue, ses cheveux étaient en bataille, sa chemise froissée, ses joues s'ombraient de barbe naissante. Il était épuisé et vulnérable. Rosemary s'obligea à desserrer sa main. Elle eut l'impression qu'elle allait sombrer, happée par la douleur et la solitude. Elle caressa l'intérieur de sa paume du bout des doigts. Son visage frémit, il bougea et retomba dans son sommeil.
Il était si proche.
D'un mouvement approximatif, elle tendit la main vers le visage du jeune homme, caressa sa joue râpeuse. Son pouce frôla ses lèvres.
L'aurait-elle choisi dans d'autres circonstances ?
Il lui plaisait, elle ne pouvait le nier et son baiser sous les rhododendrons l'avait touchée bien plus que de raison. Mais il y avait ce fichu mariage, il y avait Monsieur Homont-Duprez. La douleur lui coupa le souffle, la colère, l'impuissance, le désespoir... Elle ferma les yeux, engloutie par le vide.
Elle voulait rentrer chez elle.
Elle sentit qu'on lui attrapait la main, qu'on l'empêchait de se noyer. Elle réouvrit les yeux. Il était réveillé et la fixait avec inquiétude...
Ses yeux.
Elle se damnerait pour son regard.
Il se redressa, le visage las, engourdi par le sommeil et la mauvaise position qu'il avait eu pour dormir.
— Bonjour, murmura-t-il.
Elle ouvrit la bouche, mais ne formula aucun mot, c'était au-dessus de ses forces. Elle serra ses doigts autour des siens, d'un geste sans force, elle chercha à l'attirer vers elle. Son regard s'abima dans le sien. Elle voulait qu'il... elle voulait... Elle voulait rentrer.
Sa raison vacilla...
Il se pencha sur elle, ses lèvres effleurèrent les siennes.
... et, dans les brumes médicamenteuses, laissa tomber l'armure dont elle se protégeait.
Elle voulait rentrer chez elle et qu'il vienne avec elle.
...
♫Si tu veux faire mon bonheur ♪
♪Marguerite, donne-moi ton cœur. ♫
...
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Le Domaine du Possible-1 (Dark-Romantasy)
FantasyPartie 1 : Le temps des souvenirs Le 10 avril 1903, un entrefilet dans le quotidien "La dépêche de la Vallée" annonce les fiançailles de Rosemary et de Paul-Jean. Cela aurait été merveilleux pour eux, enfin peut-être, sauf qu'ils ignorent tout de l'...