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♫Prom'nons nous dans les bois ♪

♪Pendant que le loup y'est pas ♫

...

— Si je te dis « rhododendrons », tu penses à quoi ?

Charles sentit le danger avant même que Paul-Jean ait prononcé la deuxième syllabe de rhododendron... Par réflexe, il s'écarta de son ami. Il se dirigea vers la fenêtre.

— Je dirais que tu ne me parles pas de botanique...

Voilà pourquoi Paul-Jean lui avait demandé de passer chez lui. Charles se doutait bien qu'il allait tôt ou tard apprendre son implication dans l'histoire des rhododendrons. Mais était-ce plus ou moins grave que de l'avoir conduit pieds et poings liés chez l'Odalisque pour le livrer à la Reine de Cœur.

— ... ni de jardinage.

Il ouvrit la fenêtre et observa la rue en contrebas. Une vie bruyante et lointaine allait et venait sur les pavés.

— C'est donc toi qui as entrainé ma fiancée dans les rhododendrons...

Charles se tourna vers l'intérieur du salon, s'appuya sur le bord de la fenêtre. L'appartement tombait peu à peu dans le chaos, à l'image de son habitant.

— Elle s'y est entraînée toute seule en fait.

Paul-Jean se trouvait assis dans un fauteuil, un verre à la main, le regard noir.

— Et je dois te croire ?

Charles plongea la main dans la poche intérieure de sa veste et en tira un étui métallique.

— J'ai l'habitude de te mentir ?

— L'odalisque ?

Touché.

— Oui, bon, disons que là, non.

Paul-Jean eut un sourire amer et porta son verre à ses lèvres. Charles sortit un cigarillo de l'étui.

— Je n'avais la moindre idée de comment ça allait tourner. Je voulais juste voir à quoi ressemblait la demoiselle Poubelle.

Le cigarillo au bord des lèvres, il prit une boîte d'allumettes dans sa poche. Paul-Jean plissa les yeux. Il faisait tourner machinalement l'alcool dans son verre.

— Je savais que les dames Homont-Duprez allaient à la promenade rituellement à jour et heure fixes. J'ai tenté ma chance.

Charles craqua une allumette.

Lumière

Odeur de soufre.

— Je n'ai pas été déçu du voyage.

Un nuage de fumée douçâtre l'enveloppa. Il souffla la flamme et jeta les débris de l'allumette par la fenêtre.

— Ce très émotif monsieur Guirodou, murmura Paul-Jean.

— Émotif ?

Charles retint un rire moqueur.

— Ce n'est pas vraiment une demoiselle de bonne famille à qui j'ai eu affaire.

Il porta le cigarillo à ses lèvres, prit le temps d'une bouffée avant de reprendre.

— Elle savait très exactement ce qu'elle faisait...

Il regarda les volutes de fumée.

— ... Elle sait très bien émouvoir un homme de manière volontaire.

Le Domaine du Possible-1 (Dark-Romantasy)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant