28. Ed

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— Mais pourquoi elle est partie comme ça? marmonne Mino.

Je hausse les épaules. Je ne comprends pas non plus. Il y a deux cas de figure: soit elle est de notre côté, soit elle ne l'est pas. Mais, dans les deux cas, ce que nous lui avons dit ne semble pas assez important pour qu'elle disparaisse comme ça. 

— Bon. Ben, on fait quoi, du coup? 

C'est au tour de mon ami de hausser les épaules. Nous nous regardons, dépités, et commençons à marcher sans but précis entre les étagères. Au moins, essayons de trouver des informations sur Atocha. Le problème étant que nous avons déjà fait le tour de toutes les informations à avoir sur le lieu. 

— On devrait peut-être essayer dans le quartier des Arts, la prochaine fois, fait remarquer Mino. Pour en savoir plus sur les fantômes. On trouvera bien un taré qui est intéressé par ça. 

Je fais une moue approbatrice, ne sachant que faire d'autre. La journée a été plus bipolaire que ce qui est concevable. J'ai commencé dans l'euphorie, et là je suis en déception. 

Nous allons nous chercher un chocolat chaud à la caféterie de la bibliothèque, puis sortons dans la rue. Nous allons rentrer, quand une voix familière nous apostrophe:

— Hé, les gars ! Vous allez où?

Je me raidis sur-le-champ, et me retourne d'un bloc. Ainara s'approche de nous, venant d'une rue adjacente. 

— Ben, on se casse. Tu veux qu'on fasse quoi? 

Elle fronce les sourcils face à mon ton:

— Tu sais, tu peux arrêter de me faire la gueule.

Je ris sans joie.

— Je suis allée chercher Edmundo. Il veut bien vous parler. 

Je reste interdit, digérant la nouvelle. À quel moment s'est-elle...

— Vous voulez ou pas?

— Bien sûr, je me précipite. 

Elle lève les yeux au ciel, et tourne les talons. Elle nous invite à la suivre d'un geste de la main. Nous lui emboîtons le pas, retournant dans la rue par laquelle elle est venue.

Les rues sont, comme souvent, désertes. Mes doigts ne répondent que difficilement, et le ciel est d'un implacable gris clair. Nous passons par la calle Lope de Vega, tournons à gauche pour entrer dans une ruelle plus étroite. Arrivés vers sa moitié, Ainara s'arrête et toque à une porte rouge clair sur le mur droit. 

La porte s'ouvre sur l'homme que nous avons vu, cette fois démantelé et sans bonnet. Je remarque avec étonnement que la porte est du même ton de rouge que son manteau. Exactement le même. C'est... perturbant. 

Edmundo me lance un coup d'oeil nerveux, puis s'écarte:

— Bonjour. Entrez. 

Nous le remercions d'un signe du menton en obtempérant. 

Nous entrons dans un petit appartement sentant le renfermé, rempli d'étagères, de vases vides, de livres et de journaux absolument partout: sur les meubles, sous les meubles, en pile sur le sol, sur le canapé, même sur le porte-manteau. Je dois dire que la quantité exubérante de papier me choque. Il doit avoir un pognon...

Edmundo nous guide sans un mot de plus jusqu'au petit salon, encore plus désordonné que l'entrée. Il marmonne des choses inintelligibles à l'air froid qui nous entoure. Arrivés là, il disparaît par une porte sur la gauche. Ainara soupire et s'installe sur le canapé en déplaçant une pile de journaux. Elle nous invite à faire de même, et nous attendons le retour du maître des lieux. Il finit par revenir avec une carafe d'eau, et trois verres qui ont bien vécu. 

Atocha TI - Digne de VivreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant